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Remises sur les génériques : recours, colère et front commun contre l’arrêté
L’arrêté sur les remises, publié ce 6 août au Journal officiel, a déclenché la colère des pharmaciens. Face à un texte jugé déstabilisant pour l’économie officinale et le système de santé, la riposte s’organise : front syndical, recours juridiques et perspectives de soutien politique.
Après les derniers mois de mobilisation, d’alertes et de négociations restées sans effet, l’arrêté encadrant les remises commerciales sur les médicaments génériques, hybrides et biosimilaires a été publié ce matin au Journal officiel. Bien qu’attendu, il suscite de vives réactions au regard de son impact sur la viabilité des pharmacies de proximité et des conséquences pour l’accès aux médicaments des patients. Dans la foulée, les syndicats dénoncent fermement ce texte, vécu comme une trahison, et amplifient leur mobilisation à travers un communiqué intersyndical. L’objectif étant de se mobiliser dès maintenant pour préparer la lutte, anticiper l’impact de l’arrêté et tout mettre en œuvre afin d’en obtenir l’annulation.
La voie juridique activée de tous côtés
Du côté de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), la riposte est quasi immédiate avec la parution, dans la matinée, d’un communiqué de presse qui annonce la couleur : « Remises génériques : l’USPO attaque l’État en justice ». Pierre-Olivier Variot, président, est ferme : « On va attaquer, ça c’est sûr. ». Il précise que le syndicat envisage plusieurs leviers : un recours devant le Conseil constitutionnel via une question prioritaire de constitutionnalité, dans lequel il s’agira démontrer le caractère inconstitutionnel de cet arrêté issu de la loi de financement de la Sécurité sociale 2025, et un recours devant le tribunal administratif pour inaction en matière d’accès aux soins. Il reconnaît que « la période estivale n’aide pas à s’organiser, mais nous ferons le point dans les jours qui viennent pour identifier toutes les voies de recours possibles » et et assure que le syndicat « ne lâchera rien ».
A la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), son président Philippe Besset rappelle que le syndicat avait déjà annoncé son intention « d’attaquer le Conseil d’État ». Il précise aujourd’hui que, malgré « les vacances judiciaires », la FSPF va travailler avec son avocat pour préparer « un arsenal juridique » et « donner des consignes aux pharmaciens, à la fin du mois d’août ».
Federgy, la chambre syndicale des groupements et enseignes de pharmacies, et l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO) comptent également mener des actions juridiques, notamment auprès de l’Autorité de la concurrence, afin de défendre les remises déjà contractualisées entre laboratoires et officines, dans un contexte où les perspectives de négociation restent floues.
Laurent Filoche, président de l’UDGPO, qualifie cet arrêté de « péril majeur pour toute la profession » et précise que « la stratégie de la profession, c’est d’attaquer sur tous les angles possibles : chacun se concentre sur la partie où il a le plus de maîtrise ». L’UDGPO, reconnue pour son expertise juridique, entend s’appuyer sur son avocat habituel, avec lequel elle a déjà remporté des procès complexes, notamment contre Leclerc ou devant la Cour de Justice de l’Union européenne.
Alain Grollaud, président de Federgy, se dit lui aussi « en ordre de bataille au niveau juridique ». L’objectif est de vérifier si l’arrêté est conforme au droit de la concurrence, puis d’envisager un recours constitutionnel. Selon lui, il est « inacceptable que, malgré toutes les économies possibles, l’État décide de taper sur les pharmaciens ». Il ajoute que « c’est dramatique dans un pays qui est la 7e puissance mondiale. Après les déserts médicaux, on va avoir des déserts pharmaceutiques. Au final, c’est le grand public qui sera le grand perdant. »
Une pression politique
Parallèlement, les syndicats comptent bien peser dans les prochains débats parlementaires. Ils souhaitent préparer des amendements à déposer lors de l’examen du PLFSS (Projet de loi de financement de la Sécurité sociale). L’UDGPO avait écrit à tous les parlementaires il y a un mois, et « prévoit de les recontacter pour travailler à l’introduction d’amendements au PLFSS, afin de revenir sur cet arrêté ».
Le soutien politique ne semble pas manquer : Federgy et la FSPF assurent avoir eu « des retours de la quasi-totalité de la classe politique » et « de nombreuses prises de parole de parlementaires sont allées dans le sens de la profession ». Pierre-Olivier Variot précise que le syndicat « n’a jamais reçu autant de courriers de parlementaires y compris d’anciens ministres de la Santé comme Marisol Touraine, Aurélien Rousseau ou Agnès Firmin-Le Bodo »,
Front commun affiché
L’heure est à la mobilisation, et l’unité intersyndicale est clairement affirmée : il faut faire bloc. « Les syndicats doivent avancer unis », insiste Laurent Filoche. « On n’a pas le droit d’être divisés. »
Pour autant, chaque organisation a pour l’instant mandaté son propre avocat. Il reste encore à déterminer si une action juridique conjointe est souhaitable et réalisable. La stratégie dépendra des analyses juridiques attendues dans les prochains jours.
Pierre-Olivier Variot rappelle l’enjeu de la journée de fermeture du 16 août : « Fermer un jour pour ne pas fermer toujours. ». Laurent Filoche appelle également à y participer : « La colère des pharmaciens doit s’exprimer avant septembre. Il ne faut pas rester les bras croisés. ». Alain Grollaud confirme le soutien de Federgy à toutes les mobilisations lancées depuis juillet. Il se dit « absolument favorable » au mouvement du 16 août pour les pharmacies qui peuvent s’y joindre, et rappelle « garder le cap pour la journée nationale du 18 septembre ».
Côté FSPF, Philippe Besset précise qu’il n’y aura pas de mot d’ordre national en août. « Toute action locale est la bienvenue, à condition que les pharmaciens s’assurent que les patients soient avec eux. » Les actions coordonnées de la FSPF débuteront « au 15 septembre, à la rentrée parlementaire ».
Cette journée du 6 août acte un combat qui se poursuit et s’intensifie. Face à un arrêté jugé destructeur, la profession ne compte ni se taire, ni céder.
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