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Remises génériques : quelles stratégies pour faire tomber l’arrêté ?
L’arrêté du 6 août plafonnant les remises commerciales sur les génériques a déclenché une contre-offensive sans précédent de la part des pharmaciens. Aujourd’hui, trois leviers – exécutif, judiciaire et législatif – sont activés par les professionnels pour obtenir l’abrogation du texte. La bataille institutionnelle engage à la fois la survie économique des officines et l’équilibre du maillage territorial, indispensable aux patients.
Derrière l’arrêté publié au cœur de l’été se cache un enjeu financier de taille : environ un demi-milliard de marge en moins à l’horizon 2027. Pour un réseau par ailleurs déjà fragilisé – une trentaine d’officines ferment chaque mois depuis janvier-, le choc est jugé insupportable. « On ne retire pas un demi-milliard au réseau sans provoquer une vague de fermetures supplémentaires », note Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF). À l’instar de son homologue, l’Union des syndicats de pharmaciens d’officines (USPO), la FSPF a donc décidé d’attaquer le texte sur tous les terrains institutionnels à la fois.
L’exécutif : obtenir un moratoire
Première cible, le gouvernement. Aujourd’hui, Philippe Besset et Pierre-Olivier Variot, président de l’USPO exposeront leurs arguments à Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles et Yannick Neuder, ministre chargé de la Santé et de l’Accès aux soins. Le vendredi 5 septembre prochain, ils seront reçus à Matignon par Louis Marguerite, directeur de cabinet du Premier ministre. Le message est simple mais non négociable : un moratoire ou le retrait pur et simple de l’arrêté.
Avant même le début de la bataille judiciaire ou parlementaire, il s’agit de convaincre l’exécutif que le coût politique d’un arrêté impopulaire dépasse ses gains budgétaires. Le plaidoyer est imparable : la fragilisation du maillage et le risque de rupture d’accès pour les patients, argument hautement sensible tant pour l’opinion que pour les élus locaux.
Le Conseil d’État : contester la légalité
La négociation gouvernementale pouvant potentiellement s’enliser, les deux syndicats USPO et FSPF ont donc enclenché de manière coordonnée un second levier : le recours en annulation devant le Conseil d’État. Chacun des syndicats déposera donc un recours avant le 4 octobre, date limite du délai contentieux.
L’argumentaire repose sur un point juridique essentiel : l’absence d’étude d’impact économique préalable. Imposer une réforme évaluée à un demi-milliard d’euros de pertes sans base chiffrée solide pourrait être jugé contraire aux principes de bonne administration. Une suspension ou une annulation de l’arrêté, redonnera de l’air au réseau et contraindra le gouvernement à renégocier.
Le Parlement : reprendre la main
Enfin, les deux syndicats visent un levier législatif. La FSPF comme l’USPO préparent un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) visant à réécrire l’article L.138-9 du Code de la Sécurité sociale. Depuis 2014, la fixation des plafonds avait été déléguée au pouvoir réglementaire. Désormais, la Fédération veut rendre au législateur la maîtrise du dispositif, avec un plafond inscrit dans la loi à 40 %, contre 20 % aujourd’hui.
Cette stratégie repose sur un constat politique : les députés et sénateurs, plus proches du terrain, sont sensibles aux conséquences territoriales de la fermeture des officines. Pour les mobiliser, la FSPF a lancé le site jesoutiensmapharma.fr. La plateforme publiera quasi en temps réel la position de chaque parlementaire sur l’amendement. Objectif affiché : atteindre 289 soutiens, soit la majorité absolue à l’Assemblée. La pétition nationale, qui cumule déjà près de 500 000 signatures, sert d’appui populaire à ce lobbying intensif.
Une bataille institutionnelle totale
En combinant les trois leviers – exécutif, judiciaire et législatif – les syndicats construisent une stratégie de redondance : si l’un échoue, l’autre prend le relais. Mais l’ambition est plus large : contraindre l’État à rouvrir un débat sur l’avenir du modèle économique officinal.
« Nous n’avons pas d’autre issue que l’abrogation », martèle Philippe Besset. Car derrière les pourcentages de remise se joue une équation plus large de service et de santé publics : le maintien d’un réseau essentiel à la population et aux patients.
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