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Génériques : 85 000 € en jeu, les pharmaciens prêts à se remobiliser
Ce n’est ni un avantage accessoire, ni une variable marginale. Selon les estimations consolidées de Bastien Legrand, président du groupement d’experts-comptables CGP, les remises génériques représentent en moyenne 85 000 € par an et par officine, combinant 36 % de remises sur facture et 15 % d’accords commerciaux.
Ce montant pèse lourd : il correspond à 40 à 45 % de l’excédent brut d’exploitation (EBE). « C’est tout simplement l’équivalent du salaire annuel d’un pharmacien adjoint, estimé à 66 000 € », souligne Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO). Charges patronales comprises, le coût avoisine les 85 000 euros. À titre de comparaison, la rémunération moyenne du titulaire tourne autour de 60 000 €, mais chute à 28 000 € pour les pharmacies de moins d’un million d’euros de chiffre d’affaires.
2 juillet 2025 : le couperet réglementaire
Le décret de plafonnement à 2,5 % des remises génériques entrera en vigueur le 2 juillet 2025, sauf accord dérogatoire d’ici là. L’arrêté, publié début juin, impose un retour au droit commun. D’après l’USPO, cela entraînerait une chute immédiate des marges, sans compensation prévue.
Autre point de friction : les remises biosimilaires, que le syndicat défend comme levier économique, ont été intégrées à une enveloppe budgétaire contrainte, fusionnée avec celle des génériques. « C’est inacceptable : cette enveloppe devrait être additionnelle, pas soustraite », fustige Pierre-Olivier Variot.
Du côté de l’Assurance maladie, la ligne est claire : c’est Bercy qui pilote, avec l’objectif assumé de faire baisser les prix en comprimant les marges. Les génériqueurs, confrontés à des hausses de coûts de production, plaident eux aussi pour une réduction des remises.
Une équation intenable pour les officines
L’USPO a mené un sondage du 3 au 10 juin 2025 auquel ont répondu 2 400 pharmaciens. Les résultats sont sans appel :
– 40 000 € de perte moyenne par officine si le plafond passe de 40 à 20 % ;
– 70 % prévoient une baisse de masse salariale ;
– 69 % redoutent des problèmes de trésorerie ;
– 63 % envisagent de geler leurs investissements matériels ou en formation ;
– 52 % projettent une cession ou cessation d’activité dans les cinq ans.
Autrement dit, une pharmacie sur deux pourrait quitter le marché à moyen terme. « Cela prouve que nos conditions de travail sont profondément dégradées », alerte Pierre-Olivier Variot. Le taux de substitution des pharmacies répondantes dépasse les 90 %, signe d’une forte exposition à cette remise.
Le compte à rebours est lancé
« Nous avons rendez-vous à Bercy dans les prochains jours, mais le 2 juillet approche et le plafond actuel de 40 % va disparaître si aucun texte n’est adopté. C’est une urgence économique », prévient le président de l’USPO. 90 % des pharmaciens sondés se disent prêts à se remobiliser, comme lors de la grande manifestation du 31 mai 2024.
« Il va falloir se battre »
« On perd déjà 10 000 € d’EBE cette année, et on nous demande d’en faire plus, sans compensation. Il va falloir que les contreparties à la baisse des remises soient à la hauteur des pertes. Sinon, c’est tout le modèle qui vacille », insiste Pierre-Olivier Variot.
Et de conclure : « Nous sommes prêts à redescendre dans la rue si nécessaire. Le générique n’est pas un bonus, c’est l’un des piliers de notre équilibre économique. Le fragiliser, c’est prendre le risque d’un effondrement silencieux du réseau officinal. »
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