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Baisse des remises sur les génériques : le spectre d’un marché parallèle
En plafonnant les remises sur les médicaments génériques et les biosimilaires, le gouvernement voulait rationaliser les dépenses. Mais selon Pierre-Olivier Variot, président de l’Union des syndicats de pharmaciens d’officines (USPO), la réforme risque d’avoir un effet pervers : pousser certains laboratoires à contourner les règles et alimenter un système occulte de ristournes, échappant à tout contrôle fiscal.
Jusqu’ici, les remises commerciales consenties par les génériqueurs étaient légales, encadrées et fiscalisées. Les laboratoires versaient des ristournes aux officines ou aux groupements, intégrées dans les comptabilités et soumises à TVA.
Avec la réforme, qui abaisse brutalement les plafonds de remises (30 % sur les génériques, 15 % sur les biosimilaires), Pierre-Olivier Variot craint un glissement : « Aujourd’hui, c’est transparent et déclaré. Demain, si l’on met brutalement un terme à ce système, certains laboratoires étrangers proposeront des schémas illégaux, via des circuits financiers opaques. »
Les premières alertes
Selon le président de l’USPO, certains laboratoires auraient déjà évoqué des méthodes de contournement :
– remises créditées sur des cartes bancaires prépayées ;
– transit des fonds par des sociétés écrans à l’étranger (Luxembourg, Inde, etc.) ;
– utilisation d’avoirs ou de “ristournes en nature” échappant au radar des autorités fiscales.
« Concrètement, un laboratoire m’a proposé une carte bancaire alimentée depuis l’étranger. L’argent n’apparaît plus nulle part, il est intraçable et non fiscalisé. C’est une double illégalité : fiscale et sociale », alerte Pierre-Olivier Variot.
Une réforme contre-productive
Le paradoxe, selon les syndicats, est que la réforme risque de fragiliser les acteurs les plus vertueux. « Les grands laboratoires qui jouent le jeu de la transparence sur le sol français, seront pénalisés. D’autres acteurs à l’étranger, eux, trouveront toujours un moyen de contourner », souligne Pierre-Olivier Variot.
Au lieu d’assainir le système, la baisse des remises pourrait donc créer un marché parallèle, non contrôlé, qui affaiblirait la compétitivité des laboratoires dits historiques et compliquerait encore le travail des pharmaciens.
Le risque pour les officines
Pour les pharmaciens d’officine, la menace est double :
– perte immédiate de marge, estimée entre 20 000 et 40 000 € par an selon la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France ;
– pression commerciale accrue avec des circuits opaques et potentiellement risqués juridiquement.
« Les pharmacies ne veulent pas vivre sous perfusion de subventions. Elles veulent être rémunérées par leur travail, de façon claire et stable », rappelle le président de l’USPO.
Un enjeu politique et fiscal
La question dépasse le seul cadre officinal : un marché parallèle représenterait un manque à gagner fiscal pour l’État, qui perdrait la TVA et l’impôt associé aux remises déclarées. « En voulant économiser quelques centaines de millions, le gouvernement prend le risque de faire basculer tout un pan du secteur dans l’opacité », conclut l’USPO.
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