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Pourquoi les franchises au comptoir signeront la fin du tiers payant
Le 4 septembre 2025, les projets de décrets doublant les franchises sont soumis au conseil de la Caisse nationale de l’Assurance maladie pour avis. Objectif ? Mettre en œuvre dès à présent les annonces estivales du Premier ministre sans attendre le PLFSS. Si le recouvrement est transféré au comptoir, l’officine se retrouve sans accès aux cumuls de montants en temps réel et donc exposée à des impayés. Dans ces conditions, le tiers payant généralisé pourrait devenir inopérable.
En choisissant la voie réglementaire, soit la transmission des décrets liés au doublement des franchises au conseil de la Cnam le 4 septembre, le gouvernement accélère l’application d’un dispositif qui reconfigure la chaîne de paiement en médecine de ville. Les pharmaciens sont formels : si l’on fait basculer la collecte au comptoir, le tiers payant ne tient plus.
« Ce qui est sur la table » : le pourquoi et le quand
La saisine de la Cnam pour passer par décret le doublement des franchises a surpris l’ensemble des acteurs de la santé. Objectif implicite du gouvernement : sécuriser rapidement des rentrées d’argent sans dépendre du calendrier parlementaire. La mesure prévoit ainsi: 200 € de plafond annuel cumulé (deux poches de 100 €), des plafonds journaliers doublés, 4 € par consultation et des exclusions inchangées. Ironie du sort : les pharmaciens devraient être, selon les plans du gouvernement, les collecteurs de cette nouvelle charge financière pour les patients. En pratique, cette cinématique augmente au fil de l’année le nombre de patients atteignant le plafond des franchises et densifie les cas de reste à charge en officine.
« Pourquoi le comptoir ne peut pas encaisser »
Or, transférer la collecte à l’officine revient à déstructurer l’acte de délivrance. D’abord, l’information manque en temps réel. Le pharmacien ne voit ni le cumul déjà prélevé chez le médecin, le kiné ou l’infirmier, ni l’atteinte des plafonds journaliers et annuels chez un patient qui alterne plusieurs pharmacies. Ensuite, industrialiser des vérifications acte par acte sur un portail externe ralentit la file, brouille la sécurité de délivrance et consomme du temps clinique. Enfin, la multiplication de petits restes à charge répétés accroît les impayés et fait naître des contentieux d’exception. Au total, une usine à gaz incompatible avec la fluidité qui fonde le tiers payant depuis deux à trois décennies.
« Inverser le risque » : une logique assurantielle bousculée
En outre, ces nouvelles franchises déplacent mécaniquement le reste à charge vers les patients les plus fragiles notamment polypathologiques (douleurs chroniques, cardio-métabolique, troubles du sommeil), ceux qui atteignent automatiquement les plafonds ; les faibles consommateurs, eux, restent en deçà. On s’éloigne de la règle « On cotise selon ses moyens, on reçoit selon ses besoins » pour glisser vers un paiement à la maladie. Dans un réseau qui perd environ 30 officines par mois en 2025 chaque friction supplémentaire au guichet freine l’accès aux traitements.
« Ligne rouge » : la position syndicale
Les deux syndicats représentatifs – la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF) et l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO) – refusent que l’officine devienne guichet de recouvrement. Si l’Assurance maladie retenait les sommes et renvoyait la récupération vers les pharmacies, la FSPF annonce la suspension du tiers payant côté officines, avec remboursement direct des patients par la Cnam.
« Au-delà des chiffres : un choix de modèle »
La question touche au contrat pratique du soin de ville : qui calcule, qui encaisse, qui explique et à un choix de société qui ne manquera pas d’impacter les patients les plus fragiles et, souvent, les plus précaires.
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