Les adjoints souhaitent renforcer leur participation au capital des officines

© Laurent Ardhuin

Les adjoints souhaitent renforcer leur participation au capital des officines

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Publié le 7 juillet 2025
Par Elisabeth Duverney-Prêt
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Jérôme Parésys-Barbier vient d’être réélu à la tête de la section D de l’Ordre des pharmaciens qui représente notamment les pharmaciens adjoints. Il pointe la volonté de ces mêmes adjoints d’être reconnus à leur juste valeur en renforçant notamment leur participation au capital des officines. Un levier nécessaire pour l’attractivité et la lutte contre la financiarisation.

Quelques jours avant votre réélection, la section D a publié une enquête sur le métier de pharmacien adjoint. Quel était son objectif ?

Jérôme Parésys-Barbier : Nous voulions donner la parole aux pharmaciens et mettre toujours plus en lumière la fonction d’ajoint qui a considérablement changé ces vingt dernières années. En 2002 déjà, nous l’avions fait requalifier pour passer du mot d’assistant à celui d’adjoint. Depuis, beaucoup de choses ont évolué et aujourd’hui, les adjoints n’ont qu’une idée en tête : ils souhaitent véritablement s’impliquer davantage dans les officines à travers toutes les missions y compris la délégation de maître de stage adjoint. Le métier attire, puisque les adjoints sont de plus en plus nombreux, mais ils se sentent parfois mal compris et souhaitent être pleinement reconnus dans leurs fonctions. Cette reconnaissance passe notamment par la participation au capital des officines. Depuis 2009, il leur est possible d’acquérir 10 % des parts de capital. Ce n’est plus suffisant selon eux et ils appellent à une révision de cette participation. Cela leur permettrait de mieux comprendre la notion d’associé, avant de devenir titulaire. Ce serait un signal fort de la profession qui dirait ainsi aux adjoints : « On croit en vous, on a besoin de vous ». Les adjoints – qui sont majoritairement des femmes – ont envie d’investir financièrement dans les officines. Leur donner la possibilité d’acquérir 25 % ou 30 % des parts serait gagnant-gagnant pour tout le monde.

Craignez-vous un désintérêt des adjoints pour la profession si cette possibilité ne leur était pas offerte ?

Ce n’est pas une crainte, c’est une réalité. Notre enquête a permis de comprendre que si dans cinq ans rien n’a changé, une grande partie des adjoints vont se poser la question de changer de métier, ou même de quitter la profession. Ils veulent pouvoir s’impliquer pleinement dans leurs métiers.C’est une menace qui peut peser à terme sur les officines. On ne veut pas perdre tous ces jeunes. Mais aujourd’hui ils ont le sentiment d’être des sportifs de haut niveau que l’on entraîne pour participer aux Jeux olympiques et au final on ne leur permet pas d’y participer réellement.

Cette entrée plus importante dans le capital pourrait-elle être un moyen de lutte contre la financiarisation ?

Le dernier rapport du Sénat est très clair sur le sujet : la « financiarisation sauvage » n’est pas possible. Il faut que les Ordres, que toutes les professions, se mobilisent pour qu’on arrête des montages plus ou moins étranges. À l’heure où de nombreux titulaires réfléchissent à la suite, ou même à leur départ, il est essentiel de faire confiance aux adjoints. Ces derniers sont de formidables partenaires pour agir contre la financiarisation si on leur permet d’entrer davantage au capital des officines. C’est un beau levier d’action, et qui n’est malheureusement pas suffisamment utilisé.

Votre enquête a également permis de mettre le doigt sur un problème de communication. Pouvez-vous nous en dire plus ?

Effectivement, il y a un besoin de communication au sein des équipes officinales qui fragilise parfois les relations professionnelles et qui suscite du mal-être chez les adjoints. En tant qu’Ordre, nous pouvons essayer de prévenir, d’éviter des quiproquos, des incompréhensions de toute nature en aidant les équipes à mieux se comprendre. Nous allons commencer par informer nos inscrits sur l’ensemble des recommandations qui figurent sur le site internet de l’Ordre à ce sujet. Nous allons rendre tout cela plus visible afin qu’ils puissent accéder facilement à des informations qui pourront les aider. Ensuite nous réfléchissons à la possibilité de mettre au point des outils qui aideraient les adjoints au sein des équipes à réagir en cas de situations complexes.

Il faut débloquer la parole pour pouvoir lancer une réflexion constructive. Il faut renforcer un lien au sein de l’officine mais aussi entre l’Ordre et les pharmaciens. Nous le voyons bien d’ailleurs lorsque nous sommes saisis d’une plainte qui concerne l’équipe : la conciliation, qui est prévue par les textes, peut permettre d’atténuer les conséquences de certaines situations.

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Quels sont vos autres projets pour votre nouveau mandat ?

Nous souhaitons renforcer encore l’efficacité de la section D. Les élus sont à l’écoute des pharmaciens partout en région. Nous mettrons tout en œuvre dans les trois prochaines années pour les accompagner et valoriser leur place dans le parcours de soins. Nous allons tirer les enseignements des réponses issues du questionnaire « Avenir des métiers et indépendance professionnelle » pour agir, et nous nous emploierons à modifier les articles du Code de la santé publique qui ne sont plus en adéquation avec la réalité des pratiques professionnelles. Notre priorité est et restera d’apporter une oreille attentive aux sollicitations de nos ressortissants.