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Grève des gardes : la justice vous protège !
Après Strasbourg, Toulon. En moins de dix jours, deux tribunaux administratifs ont suspendu des arrêtés préfectoraux imposant des réquisitions systématiques de pharmaciens en grève. Un coup d’arrêt juridique à la stratégie préfectorale face au mouvement déclenché contre la réforme des remises sur les génériques.
Le 11 juillet 2025, le juge des référés du tribunal administratif de Toulon a suspendu l’arrêté préfectoral du 27 juin qui réquisitionnait les officines du Var pour assurer les gardes et urgences, malgré le préavis de grève des pharmaciens. Saisi par l’USPO 83 et une pharmacienne titulaire réquisitionnée, le juge a estimé que le préfet avait porté une « atteinte grave et manifestement illégale » au droit de grève, en maintenant un dispositif de garde identique à celui pratiqué en temps normal.
Une mesure disproportionnée censurée
En pleine mobilisation contre la réforme des remises génériques, le préfet du Var avait imposé un tour de garde complet, de jour comme de nuit, aux officines, sans réduction des plages horaires ni limitation du nombre d’établissements concernés.
Or, rappelle le juge, le préfet ne peut prendre que des mesures proportionnées aux nécessités de l’ordre public et à la continuité des soins. La réquisition ne saurait, en période de grève, se borner à reproduire le dispositif habituel sans évaluation des besoins essentiels.
« C’est un signal fort envoyé à toutes les préfectures », souligne l’USPO 83. « Cette ordonnance confirme que le droit de grève des pharmaciens est protégé et que les réquisitions ne peuvent l’anéantir sous prétexte de continuité des soins. »
La notification irrégulière des réquisitions écartée
Les requérants contestaient également la notification des réquisitions par simple mail, via l’ARS, sans remise en main propre ni envoi recommandé. Si le juge de Toulon n’a pas retenu cet argument pour annuler l’arrêté, il a toutefois rappelé que l’atteinte au droit de grève suffisait à suspendre la décision préfectorale.
Strasbourg avait ouvert la voie
Quelques jours plus tôt, le 4 juillet, le tribunal administratif de Strasbourg avait déjà suspendu un arrêté similaire pris dans le Bas-Rhin. Saisi par l’USPO Grand Est, le juge avait censuré la réquisition automatique des titulaires pour les 5 et 6 juillet, soulignant lui aussi le caractère disproportionné et non justifié de la mesure.
« L’ARS avait réquisitionné toutes les pharmacies du tableau de garde avant même que la grève ne soit officiellement déclarée », dénonçait Delphine Lienhardt, présidente de l’USPO Alsace. Là encore, le juge avait estimé que le préfet n’avait pas évalué d’autres options pour concilier continuité des soins et exercice du droit de grève.
Un précédent syndical assumé
Ces décisions ont également conforté la légitimité des actions syndicales. À Strasbourg, l’État avait tenté de contester la recevabilité de la requête de l’USPO Grand Est, arguant de l’absence de mandat valide. Le juge a balayé cette argumentation, validant la procédure du syndicat et lui accordant 1 000 euros au titre des frais de justice.
« Cette grève se poursuit avec conviction. Nous allons au combat pour défendre notre profession et notre modèle économique. Le droit est aussi une arme, et nous comptons bien continuer à nous en servir », résume Delphine Lienhardt.
Un avertissement juridique pour l’État
La décision de Toulon confirme la portée nationale du conflit. Face à un mouvement inédit de la profession officinale, la justice administrative trace clairement les limites des pouvoirs de réquisition.
Elle rappelle que la continuité des soins ne peut servir de prétexte à des réquisitions systématiques et massives. Et qu’en matière de libertés fondamentales, le droit de grève des pharmaciens mérite, lui aussi, d’être respecté.
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