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Les infirmiers pourront diagnostiquer et prescrire
Aujourd’hui encore, aucun soin infirmier ne peut être réalisé sans ordonnance. Même pour une simple aide à la toilette ou un pansement, la prescription médicale reste obligatoire. Cette exigence pourrait bientôt tomber, dans certains cas, grâce au projet de loi réformant le métier d’infirmier, en cours de finalisation au Parlement.
Adopté par l’Assemblée nationale en mars, puis validé par le Sénat en mai, le texte doit être harmonisé par les parlementaires réunis en commission mixte paritaire. Un compromis est attendu rapidement, tant le projet suscite l’adhésion des différentes parties prenantes.
Une reconnaissance officielle du diagnostic infirmier
Au cœur de la réforme : la reconnaissance de 267 diagnostics infirmiers, qui permettront d’intervenir directement auprès de patients sans passer par un médecin. « L’infirmière pourra estimer si une plaie est simple, agir seule, ou bien juger qu’un avis médical s’impose », détaille Grégory Caumes, juriste en santé.
Cette faculté d’analyse clinique, revendiquée depuis vingt ans par la profession, ancre l’infirmier dans un rôle de soignant autonome à part entière, capable de décider d’une orientation ou d’un traitement de premier niveau.
« C’est une réforme historique », affirme Daniel Guillerm, président de la Fédération nationale des infirmiers. « Elle structure enfin notre rôle propre, ce que nous faisons déjà mais sans cadre juridique clair », complète Gaëlle Cannat, du collectif Infirmiers libéraux en colère.
Prescription d’antalgiques de palier 1
Autre bascule majeure : l’ouverture d’un droit de prescription. Les infirmiers pourront prescrire certains médicaments simples, notamment des antalgiques de palier 1 comme le paracétamol. « Il est quand même assez fou qu’un patient puisse s’acheter Doliprane en pharmacie, mais qu’un soignant hospitalier ne puisse pas l’administrer à un patient qui souffre », dénonce Sylvaine Mazière-Tauran, présidente de l’Ordre des infirmiers.
Ce droit ne concernera pas que les libéraux. Il s’étendra aussi aux infirmiers scolaires, du travail, hospitaliers, soit potentiellement les 640 000 professionnels en exercice, dont 145 000 en libéral.
Fluidifier le parcours de soins
Le projet vise avant tout à faciliter la prise en charge des soins non programmés, pour désengorger les services d’urgence et offrir aux patients des solutions de proximité. « Il s’agit de multiplier les portes d’entrée dans le système de santé, pas de remplacer les médecins », insiste Daniel Guillerm.
En cas de sortie d’hospitalisation sans ordonnance ou de perte d’autonomie légère, l’infirmier pourra intervenir directement, sans attendre de prescription, dès lors que la situation est conforme à ses compétences propres.
« Pour les petits bobos et les soins du quotidien, les patients auront un accès direct, immédiat, encadré », synthétise Grégory Caumes, ancien directeur adjoint de l’Ordre des infirmiers.
Une meilleure connaissance du patient
La réforme valorise enfin l’observation clinique à domicile, au-delà du soin technique. « L’infirmier voit comment vit le patient, ce qu’il mange, s’il suit son traitement. C’est une photographie précieuse de la situation réelle », insiste Ghislaine Sicre, présidente de Convergence infirmière.
Ces éléments, transmis au médecin traitant, enrichiront la prise en charge. « On donnera beaucoup d’indications au médecin sur la réalité du quotidien, ce que le patient ne dit pas toujours en consultation », poursuit-elle.
Une sécurité juridique pour les soignants
La loi corrigera également des situations aujourd’hui ubuesques. Comme ces soins réalisés dans l’urgence sans prescription, que certains médecins refusaient de couvrir rétroactivement. « Il arrivait que l’infirmier paye de sa poche le soin effectué », témoigne Daniel Guillerm.
En sécurisant ces pratiques et en les inscrivant dans un cadre légal clair, la réforme reconnaît le rôle réel des infirmiers dans l’accès aux soins primaires. Et, en filigrane, réinterroge l’équilibre entre les professions de santé.
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