1/6 – Physiopathologie et hygiène de vie : repères pour comprendre et soulager l’insuffisance veineuse

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1/6 – Physiopathologie et hygiène de vie : repères pour comprendre et soulager l’insuffisance veineuse

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Publié le 4 septembre 2025 | modifié le 5 septembre 2025
Par Mathilde Combel
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« À force de piétiner, j’ai les jambes comme du plomb ! ». La sensation de jambes lourdes est une manifestation précoce de la maladie veineuse chronique (MVC), trouble vasculaire résultant d’une stase veineuse prolongée dans les membres inférieurs. Le traitement repose principalement sur la compression médicale, à laquelle peuvent s’ajouter phytothérapie ou aromathérapie.

Pour rappel, le retour veineux est assuré à 90 % par le réseau veineux profond situé dans les muscles et à 10 % par le réseau superficiel sous-cutané (les veines saphènes). Ces deux réseaux sont reliés par les veines perforantes. Plusieurs mécanismes entrent en jeu pour faire « remonter » le sang au cœur. Lors de la marche, les veines de la semelle plantaire sont écrasées, les muscles se contractent (pompe du mollet) et compriment les veines profondes. Les valvules, replis membraneux à l’intérieur des veines, empêchent le sang de refluer sous l’effet de la gravité. Parallèlement, lors de l’inspiration, le système abdomino-diaphragmatique contribue à « aspirer » le sang veineux vers le cœur.

Lorsqu’un dysfonctionnement survient, la pression veineuse dans les membres inférieurs augmente, entraînant une inflammation chronique et un remodelage des parois veineuses, qui se dilatent et perdent leur élasticité. L’auto-entretien et l’auto-aggravation du trouble conduisent progressivement à des manifestations plus sévères.

Étiologies

Trois mécanismes principaux sont à l’origine de la maladie veineuse chronique.

  • L’insuffisance veineuse fonctionnelle se caractérise par un retour veineux inefficace malgré des veines structurellement normales. Cette situation résulte le plus souvent d’une dysfonction de la pompe musculaire du mollet, aggravée par l’immobilité, une ankylose de la cheville ou une amyotrophie. Elle est fréquente chez le patient âgé.
  • L’insuffisance veineuse primitive (maladie variqueuse) est liée à un dysfonctionnement valvulaire entraînant une dilatation permanente des veines appelée varices. Ceci concerne principalement les veines saphènes. L’insuffisance veineuse profonde est très rare.
  • L’insuffisance veineuse secondaire regroupe le syndrome post-thrombotique qui résulte de séquelles chroniques faisant suite à une thrombose veineuse profonde (ayant obstrué la circulation ou endommagé les valvules), générant ainsi une hyperpression veineuse persistante, et les syndromes veineux compressifs, plus rares (tumeurs pelviennes, syndrome de Cockett*).

*Insuffisance veineuse du membre inférieur gauche due à la compression de la veine iliaque gauche par l’artère iliaque droite.

Facteurs de risque

Intrinsèques. Non modifiables, ce sont l’âge (le risque de maladie veineuse chronique augmente avec le vieillissement), l’hérédité et le sexe (apparition plus fréquente et plus précoce chez les femmes, notamment en période prémenstruelle et lors des grossesses).

Liés au mode de vie. Il s’agit essentiellement de la station debout prolongée (qui favorise la stase veineuse), de l’insuffisance d’activité physique et de l’obésité ou d’un surpoids.

Signes cliniques

Les manifestations cliniques de l’insuffisance veineuse chronique sont variées, allant des symptômes fonctionnels les plus fréquents aux formes plus rares, jusqu’aux signes visibles comme les varices.​​​​​

  • Les plus fréquents. Sensation de lourdeur des jambes, douleurs, crampes et/ou démangeaisons, parfois œdème de la cheville à recrudescence vespérale et disparaissant après un repos allongé (sans rétention hydrosodée et prise de poids). Ces signes sont majorés en présence de facteurs de risque : station debout ou assise prolongée, grossesse, fortes chaleurs, parfois prise d’œstroprogestatifs. Ils s’améliorent au cours d’un exercice physique, du port d’une compression veineuse, de la surélévation des membres inférieurs et d’une exposition au froid.
  • Plus rarement. Impatiences nocturnes (besoin de mobiliser ses jambes), brûlures et rougeurs du pied nocturnes, claudication veineuse intermittente en cas d’insuffisance veineuse secondaire à une obstruction chronique (entraînant une douleur à la marche cédant lorsque le membre est surélevé).
  • Varices. Ce sont des veines sous-cutanées d’un diamètre supérieur ou égal à 3 mm en position debout, avec un trajet tortueux et une circulation pathologique liée au reflux veineux. Elles sont à distinguer des télangiectasies (ou varicosités : confluents de veinules intradermiques d’un diamètre inférieur à 1 mm) et des veines réticulaires (veines sous-cutanées d’un diamètre inférieur à 3 mm), qui provoquent surtout une gêne esthétique.

Complications

Avec les années, des troubles trophiques tendent à apparaître par suite du retentissement tissulaire de la maladie : eczéma, dermite ocre (coloration brunâtre de la peau), atrophie blanche (zone cutanée dépigmentée, sans capillaires, conséquence d’une ischémie progressive), ulcère variqueux. Les varices exposent à un risque de thrombose veineuse superficielle notamment, plus rarement de thrombose veineuse profonde, rarement d’hémorragie en cas de rupture.

Recommander un avis médical

  •  En urgence en cas de cordon chaud, rouge, douloureux au niveau de la jambe ou de la cuisse (signes de thrombose veineuse superficielle), d’œdème, de douleur et de chaleur (signes de thrombose veineuse profonde), d’hémorragie d’une varice ;
  • En cas de symptômes de jambes lourdes et/ou de varices pour faire un bilan de l’état veineux et prévenir les risques de complications.

Hygiène de vie

À tous les stades de la maladie, les conseils d’hygiène de vie permettent d’améliorer le retour veineux et de limiter les symptômes et l’aggravation de la maladie veineuse.

  • Perdre du poids. Cela diminue la pression veineuse au niveau des jambes (donc améliore le retour veineux) et facilite le mouvement et la pratique d’une activité physique, chez les personnes en surpoids ou obèse.
  • Pratiquer une activité physique adaptée et régulière. La marche, simple à mettre en place, permet de propulser le sang vers le cœur sous l’effet de l’écrasement des veines de la voûte plantaire et de la pompe du mollet. Des sports qui font travailler les muscles des jambes en les déchargeant du poids du corps (aquagym, natation, vélo) sont également intéressants. Dans tous les cas, toute activité sportive est plus bénéfique que la sédentarité. Des exercices de pédalage des jambes ou des massages de la cheville vers le haut des jambes aident aussi à soulager les symptômes en activant la circulation veineuse.

Automassage : exercices simples à pratiquer en cas de jambes lourdes

Source : « Préserver le capital veineux de ses jambes », Assurance maladie, 26 février 2025.

  • Limiter autant que possible le piétinement. De même, éviter la station debout immobile prolongée ainsi que la position assise jambes pendantes et/ou croisées : le sang circule mieux jambes étendues et surélevées. En cas de station debout ou assise prolongée, conseiller de marcher un peu toutes les 2 heures et/ou faire des exercices activant les muscles : flexion/extension de la cheville, « ronds » avec sa cheville, se mettre sur la pointe des pieds plusieurs fois de suite, etc.
  • Lutter contre la constipation et les efforts de poussée associés. Ils augmentent la pression dans l’abdomen ce qui peut comprimer la veine cave inférieure et ralentir le retour veineux.
  • Privilégier une alimentation riche en vitamine C et antioxydants. La consommation de fruits et légumes, notamment, est toujours bénéfique pour les capillaires et vaisseaux sanguins. Encourager également une bonne hydratation. Le rôle néfaste du tabac, facteur de risque reconnu de thrombose artérielle, n’est pas prouvé dans la survenue d’une maladie veineuse chronique.

S’adapter au quotidien

Quelques mesures simples d’hygiène de vie permettent de soulager les symptômes et de prévenir l’aggravation de l’insuffisance veineuse au quotidien.

  • La nuit, surélever les pieds du lit de 10 à 15 cm pour améliorer le retour veineux.
  • Limiter l’exposition à la chaleur, qui favorise la dilatation des veines et augmente l’œdème : bains chauds, sauna, hammam, épilation à la cire chaude, exposition prolongée au soleil, chauffage par le sol, etc. Préférer les douches fraîches en remontant le jet d’eau jusqu’aux cuisses.
  • Porter des vêtements amples qui n’entravent pas la circulation dans les jambes, éviter les ceintures serrées.
  • Choisir des chaussures avec un talon de 2-3 cm permettant un bon appui et déroulé du pas. Les bottes qui compriment le mollet sont à éviter. Un bilan podologique et la prescription de semelles orthopédiques peuvent corriger des troubles de la statique ou des appuis plantaires pendant la marche.

Classification CEAP

La classification CEAP (clinique, étiologique, anatomique, physiopathologique) est utilisée pour évaluer et classifier les maladies veineuses. L’item clinique distingue 6 catégories.

  • C0 : pas de signe visible ou palpable.
  • C1 : présence de télangiectasie ou de varicosité.
  • C2 : varices (≥ 3 mm).
  • C3 : œdème chronique avec ou sans varices.
  • C4 : troubles trophiques (pigmentation, dermite ocre, eczéma, etc.).
  • C5 : troubles trophiques et cicatrice d’ulcère veineux.
  • C6 : troubles trophiques et ulcère ouvert.

À noter : le terme « insuffisance veineuse chronique » (IVC) est réservé aux stades avancés (à partir du C3) selon la Haute Autorité de santé.

Avec l’aimable collaboration du Dr Stéphane Lo, angiologue au CHU de Lyon (Rhône).

Article issu du cahier Formation du n° 3574, paru le 6 septembre 2025​​​​​.

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