PLFSS 2025 : les PME pharmaceutiques françaises craignent pour les 50 000 emplois de la filière

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PLFSS 2025 : les PME pharmaceutiques françaises craignent pour les 50 000 emplois de la filière

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Publié le 30 octobre 2024
Par Christelle Pangrazzi
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Les mesures de réduction budgétaires du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025 inquiètent les entreprises pharmaceutiques françaises. Elles redoutent la perte de la souveraineté et de possibles licenciements tout comme l’aggravation des pénuries

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, actuellement en discussion, prévoit une réduction de près d’un milliard d’euros dans les dépenses de médicaments. Cette coupe, la première d’une telle ampleur depuis 2019, suscite l’inquiétude des acteurs de la production pharmaceutique française. Les PME de santé (Amlis), les producteurs de principes actifs (Sicos), les sous-traitants (CDMO France) et les entreprises de taille ETI (METI) — qui assurent la production et l’approvisionnement de 35 % des médicaments essentiels fabriqués en France et en Europe — alertent sur le risque accru de pénuries. En juin dernier, une étude du GERS pour l’AMLIS avait déjà établi un lien entre les faibles prix de vente et les ruptures d’approvisionnement.

Des médicaments à bas prix, sous tension

L’année 2023 a été marquée par la mise en tension ou la rupture d’approvisionnement de plus de 2 000 médicaments remboursables, représentant près de 300 millions de boîtes pour des traitements essentiels (maladies chroniques, pathologies cardiovasculaires, neurologiques, gastroentérologiques, etc.). 94 % des médicaments concernés sont vendus à moins de 10 euros, et 84 % à moins de 5 euros, des prix de plus en plus insoutenables pour les fabricants.

Les patients, premiers affectés par ces pénuries, doivent souvent faire face à des substitutions plus coûteuses ou moins efficaces, ou à des délais prolongés avant de pouvoir accéder à leur traitement. La baisse prévue des prix, combinée à une pression accrue pour maintenir les stocks obligatoires, pourrait aggraver cette situation et entraîner un désengagement de la production sur le territoire français, voire des délocalisations.

Menaces sur la souveraineté sanitaire et industrielle

Alors que les pouvoirs publics appellent à renforcer la souveraineté pharmaceutique, la politique de prix actuels fragilise la production locale. « Il n’existe aucun alignement entre le ministère de l’Industrie, qui appelle à relocaliser, et le ministère de la Santé, qui favorise indirectement la délocalisation en poursuivant les baisses de prix », soulignent les PME du secteur. Les entreprises dénoncent ainsi une approche à court terme qui ne fait qu’exacerber les risques de pénuries.

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Les acteurs de la filière appellent à une réforme

Face à ces défis, les représentants de la filière ont formulé plusieurs propositions visant à garantir un accès durable aux médicaments essentiels. Parmi ces mesures, ils appellent à une réduction de la pression fiscale sur les produits de santé essentiels, un moratoire sur les baisses de prix pour les médicaments à bas coût, et un soutien renforcé aux circuits d’approvisionnement locaux dans les appels d’offres publics.

La mise en place d’un fonds d’investissement européen pour la relocalisation et la souveraineté sanitaire figure également parmi les solutions envisagées pour renforcer la production française et européenne.

Une indépendance sanitaire en jeu

Pour les entreprises de la filière, la situation actuelle constitue un tournant. Elles insistent sur l’urgence d’une action coordonnée entre acteurs publics et privés pour éviter une érosion de l’indépendance sanitaire française, ainsi qu’une dépendance croissante aux importations. Avec 50 000 emplois et 130 sites industriels en jeu, la filière pharmaceutique appelle le gouvernement à revoir les priorités du PLFSS afin de préserver à la fois la santé publique et la résilience industrielle de la France.

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