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© Getty Images - Young team during virus lab tests. Multi ethnic scientists focused on work. Wearing protective workwear
Les biosimilaires, promesse ou mirage ?
Aujourd’hui, les pouvoirs publics misent sur les biosimilaires pour améliorer l’économie officinale. Mais derrière l’affichage politique, le marché demeure inégal, timide et incertain.
En ville, les biosimilaires ne représentent encore que 35 % des prescriptions. Bien loin de l’ambition de compenser la chute brutale des marges liées aux génériques : depuis septembre 2024, le Comité économique des produits de santé (CEPS) a dévalorisé 52 génériques, entraînant 38 M€ de pertes pour le réseau officinal.
Surtout, l’accès aux biosimilaires reste très inégal. « Un quart des pharmacies capte à elles seules 50 % des volumes de biosimilaires, tandis qu’une moitié concentre 80 % des biomédicaments substituables », observe David Syr, directeur général de Gers Data. Autrement dit, une majorité d’officines ne voit encore aucun bénéfice tangible.
Une économie sans commune mesure avec les génériques
Pour Julien Chauvin, président de la commission Études et stratégie économiques de la Fédération des syndicats des pharmaciens d’officines (FSPF), l’écart est flagrant : « Dans la plupart des cas, une pharmacie ne vend guère plus d’une boîte de biosimilaire par mois et par référence. » Sur l’ensemble du réseau, les biosimilaires représentent moins de 100 M€ de rémunération supplémentaire, quand les génériques dépassent 1 Md€ chaque année.
La substitution, un exercice de diplomatie
Aux obstacles structurels s’ajoute la résistance des prescripteurs et des patients. « Il faudrait commencer par accorder aux pharmaciens une liberté totale de substitution, sans passer par le médecin. Trop de praticiens bloquent encore », estime l’économiste Frédéric Bizard, plaidant pour un programme national de formation afin que les officinaux deviennent les référents sur ces biothérapies.
Le terrain montre aussi l’ampleur du travail pédagogique. « La substitution d’un biosimilaire ne se décrète pas : elle exige de longues explications, souvent face à des patients âgés et méfiants », constate Laurent Keizer, directeur général du groupement Aprium. Même constat pour Jérôme Radiguer, directeur marketing de Giphar, qui parle de « diplomatie au comptoir ». Un effort d’autant plus lourd qu’aucune campagne nationale n’est venue soutenir les pharmaciens.
Des succès… et des échecs
L’arrêté du 20 février 2025, qui a élargi le droit de substitution à 9 groupes biologiques similaires, a permis un bond du taux de pénétration : de 36 % au départ, il atteint désormais 49 %. Certaines molécules tirent le marché, comme l’Enoxaparine, passée de 20 % à 60 % en quelques mois et représentant aujourd’hui plus de la moitié des ventes en volume.
Mais d’autres stagnent. Le Ranibizumab peine à décoller, faute de seringues préremplies. « Le dispositif d’administration doit correspondre aux besoins des patients, c’est l’enjeu principal des prochains biosimilaires », souligne David Syr.
Des bio-blockbusters en attente
À moyen terme, le potentiel est considérable. Pas moins de 34 biologiques tomberont dans le domaine public d’ici 2 030. Dès novembre, le biosimilaire d’Eylea ouvrira la voie, suivi par des molécules stratégiques. Et surtout, les brevets de deux géants, Keytruda (MSD) et Opdivo (BMS), devraient expirer en 2028.
« Selon nos estimations, la substitution en officine pourrait apporter un surcroît de croissance de 1,5 Md€ au marché français d’ici 2030, avec un taux annuel moyen de + 20 %, quel que soit le scénario », analyse Hélène Sagnes, directrice du secteur pharmacie-santé des Echos Études.
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