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Économie officinale : les pharmaciens obligés de rogner sur leur rémunération
Avec une croissance de + 5,03 %, le chiffre d’affaires des officines semble bien orienté en 2024. Trompe-l’œil. « L’essentiel de cette hausse repose sur les produits chers, qui ne génèrent que peu de marge », analyse Bastien Legrand, président de CGP, réseau national d’experts-comptables spécialisés dans la gestion des officines. « Ils représentent aujourd’hui 42,13 % des ventes, soit une hausse de 13,93 % par rapport à l’an dernier. »
Dans le même temps, les honoraires de dispensation baissent de -1,85 %, une première depuis leur instauration, confirmant la baisse des volumes et de la fréquentation dans les officines. Un phénomène qui touche particulièrement les officines de moins d’1 million d’euros de chiffre d’affaires (- 4,11 %), alors que celles de plus de 2,5 millions d’euros restent globalement stables.
Des charges qui grignotent la rentabilité
Si les ventes augmentent, l’EBE, indicateur de la rentabilité des pharmacies, recule de – 10 000 euros en moyenne. Une dégradation principalement liée à l’explosion des charges :
– les charges externes progressent de + 6 %, sous l’effet de l’inflation énergétique et des contrats de leasing contractés en 2022-2023. Elles ont augmenté de 22 % sur trois ans ;
– les frais de personnel enregistrent une hausse moyenne de +14 000 euros par officine, atteignant désormais 38,8 % de la marge.
« Chaque année, la même tendance se confirme : les charges augmentent plus vite que la marge. On vend plus, mais on gagne moins », constate Bastien Legrand.
Les petites officines en première ligne
La baisse de l’EBE touche toutes les typologies d’officines, mais pas avec la même intensité : -11 % pour les officines de moins d’1 million d’euros, mais – 1 % seulement pour celles dépassant 4 millions d’euros.
« Plus l’officine est petite, plus son modèle est fragilisé. À l’inverse, les structures les plus importantes réussissent mieux à absorber les hausses de charges », explique Bastien Legrand. Résultat : les petites pharmacies voient leur capacité d’investissement et de remboursement se réduire, tandis que leur attractivité en cas de cession diminue.
Le pouvoir d’achat des pharmaciens en recul
L’évolution sur dix ans confirme un affaiblissement du revenu des pharmaciens. Entre 2014 et 2024, l’EBE moyen a progressé de + 5 % (soit + 0,5 % par an), mais sur la même période, l’inflation a atteint + 23 %.
« À euros constants, le pouvoir d’achat des pharmaciens s’est érodé. Ils travaillent plus pour gagner moins », souligne Bastien Legrand. « Le risque, c’est de voir de plus en plus de titulaires contraints de rogner sur leurs investissements ou leur propre rémunération pour maintenir l’équilibre de leur officine. »
Quel avenir pour l’officine ?
La situation économique des pharmacies en ressort fragilisée, notamment pour les structures les plus modestes. L’augmentation du chiffre d’affaires ne garantit plus une rentabilité stable, et l’inflation des charges continue d’alourdir les comptes d’exploitation.
« Le modèle économique de l’officine est petit à petit en train de décrocher. Si rien n’est fait pour rééquilibrer la rémunération du pharmacien, on risque de voir de plus en plus de pharmacies en difficulté d’autant plus qu’il y a un réel besoin de modernisation pour intégrer les nouvelles missions. L’équation devient complexe s’il n’y a pas suffisamment de trésorerie », prévient Bastien Legrand.
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