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Baisse de prix des médicaments : « Sans moratoire, nous allons droit vers des ruptures massives »
Pour Laurent Filoche, président de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO), la suspension de l’arrêté du 4 août n’est qu’un trompe-l’œil. Tant que les baisses de prix décidées par le Comité économique des produits de santé (CEPS) ne sont pas gelées, l’approvisionnement des officines reste menacé.
« Nous nous sommes tous réjouis trop vite », prévient Laurent Filoche, président de l’Union des groupements de pharmaciens d’officine (UDGPO). La suspension de l’arrêté du 4 août, qui abaissait les plafonds de remise sur les génériques, ne règle rien : le Comité économique des produits de santé (CEPS) a annoncé, le 18 septembre, une baisse des prix des médicaments génériques à hauteur de 200 millions d’euros.
« Si la réunion du 3 octobre avec le CEPS n’aboutit pas à un moratoire, ce sera une victoire à la Pyrrhus », tranche-t-il.
Des prix français devenus non compétitifs
Le président de l’UDGPO n’hésite pas à brandir le spectre des ruptures massives d’approvisionnement : « Un flacon vendu 0,67 € en France s’écoule 4 € en Espagne ou en Italie. Les industriels feront leur choix, et il est compréhensible : ce sont des entreprises privées. »
Il réfute l’argument officiel selon lequel les pénuries seraient mondiales : « Elles sont concentrées sur notre pays et elles vont s’accélérer avec les baisses de prix. »
Selon lui, 2 millions de patients pourraient perdre l’accès à leurs traitements ou devoir aller se soigner à l’étranger.
« Plus de pilote dans l’avion »
Pour Laurent Filoche, la politique du médicament se réduit depuis des années à une mécanique comptable. « Le CEPS est en roue libre. Quand le pouvoir politique est faible, les agences appliquent toujours les mêmes recettes : raboter le prix du médicament. Sauf qu’on est à l’os. Ce nouveau coup de rabot mettra autant en péril l’économie de l’officine que la baisse des remises. » Autrement dit, le rabot n’est plus seulement un outil conjoncturel : il structure désormais toute la régulation du médicament. Et les données publiques viennent l’attester.
La seule variable d’ajustement
La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) a publié son bilan annuel : en 2024, les prix des médicaments ont reculé de – 1,7 %, contre – 4,3 % en moyenne les années précédentes. Un ralentissement trompeur, souligne Laurent Filoche : « Les baisses massives de 2025 vont inverser la tendance. Le médicament reste la seule variable d’ajustement du système de santé, mais cette variable ne peut plus varier. »
Repenser le financement
Au-delà du constat, le président de l’UDGPO met en cause la soutenabilité du modèle. « L’État est en faillite. Il n’a plus les moyens de financer seul la santé. Il faut préserver un filet de sécurité pour les plus fragiles et trouver d’autres sources : assurances privées, mutuelles… Mais on ne peut plus réduire indéfiniment le prix de produits qui ont une valeur. »
« Un modèle construit pour une autre époque »
Laurent Filoche rappelle que lors de la création de la Sécurité sociale, en 1945, 6 actifs cotisaient pour 2 inactifs. Aujourd’hui, le rapport est inversé : 3 actifs pour 6 inactifs.
« On ne peut pas reposer sur un système pensé il y a 80 ans, il faut avoir l’intelligence d’en inventer un autre. »
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