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Régulation de l’installation : les sénateurs LR avancent leur contre-proposition
À rebours du texte transpartisan récemment adopté à l’Assemblée nationale, le groupe Les Républicains du Sénat entend peser dans le débat sur la démographie médicale. Le 9 avril, les sénateurs LR ont présenté une contre-proposition à la régulation de l’installation des médecins libéraux, sous la forme d’une proposition de loi déposée par Philippe Mouiller, président de la commission des affaires sociales. Le texte sera examiné en commission le 6 mai, puis en séance publique le 12 mai.
Une territorialisation assumée de la politique de santé
Composé de 19 articles, le texte sénatorial s’articule autour de cinq chapitres et met l’accent sur un pilotage territorial renforcé. Le premier chapitre entend confier aux conseils départementaux un rôle moteur dans les politiques locales d’attractivité, en soutenant l’installation de professionnels de santé dans les zones sous-dotées. Il propose également la transformation de l’actuel Observatoire national de la démographie des professions de santé en un Office national doté de déclinaisons locales, afin de produire une évaluation plus fine et utile aux décideurs.
« L’outil actuel ne fonctionne pas. Ce n’est pas un problème de compétences, mais de moyens et de précision », a expliqué Philippe Mouiller, pointant les limites de l’appareil statistique centralisé. L’objectif est de mesurer non seulement le nombre de professionnels, mais surtout le temps médical disponible pour la population, à l’échelle locale.
Une régulation différenciée selon les spécialités
Au cœur de la proposition LR figure une régulation différenciée de l’installation des médecins libéraux. L’article 3 prévoit que les généralistes puissent toujours s’installer en zones surdotées à condition d’exercer une activité partielle en zone sous-dense. Pour les spécialistes, l’installation dans les zones surdotées serait subordonnée au départ concomitant d’un confrère de même spécialité.
Deux dérogations sont toutefois prévues : un engagement à temps partiel en zone sous-dotée, ou une autorisation exceptionnelle accordée par le directeur général de l’ARS en cas de besoin identifié. Cette approche se veut plus souple que celle portée par l’Assemblée, en introduisant une régulation par incitation plutôt que par contrainte.
Cabinets secondaires, dépassements, coopérations : un arsenal incitatif
Plusieurs articles viennent compléter le dispositif en facilitant l’ouverture de cabinets secondaires, en autorisant les dépassements d’honoraires en zone sous-dense (article 5), ou en simplifiant le recours à des CDD dérogatoires dans les centres de santé (article 7). Le texte valorise également les pratiques avancées, avec une meilleure rémunération pour les infirmiers IPA (article 14), ainsi que des coopérations étendues entre professions de santé (article 11).
Le rôle des pharmaciens d’officine est explicitement renforcé dans la prise en charge des pathologies bénignes, dans le sillage de l’expérimentation Osys (article 12).
Les Padhue orientés vers les zones en tension
Les articles 8 à 10 ciblent spécifiquement les praticiens à diplôme hors Union européenne (Padhue), avec pour ambition de clarifier leur situation administrative, simplifier leur validation de compétences – désormais localisée sur le lieu d’exercice – et les orienter prioritairement vers les zones sous-dotées.
Suivi démocratique et visibilité parlementaire
L’article 18 prévoit une présentation annuelle des résultats des politiques d’accès aux soins devant les commissions parlementaires compétentes, instaurant un suivi régulier et public. Une façon de répondre à la demande de transparence et d’évaluation, au moment où la question de l’efficacité des politiques de lutte contre les déserts médicaux demeure centrale.
Une réponse à la coercition adoptée à l’Assemblée
Cette contre-proposition intervient alors que l’Assemblée nationale vient d’adopter en première lecture un dispositif de régulation de l’installation plus contraignant. Philippe Mouiller réfute tout calendrier opportuniste, mais reconnaît la nécessité d’affirmer une alternative. « Il aurait fallu coconstruire dès le départ. Nous ne sommes ni dans la complémentarité ni dans l’opposition frontale. Le Sénat a simplement voulu faire entendre sa voix, vite », explique-t-il.
En toile de fond, la crispation monte. Tandis que les syndicats de médecins libéraux restent silencieux, les syndicats d’étudiants, d’internes et de jeunes praticiens ont déjà appelé à une mobilisation nationale les 28 et 29 avril, pour contester la coercition portée par le texte voté à l’Assemblée. Dans ce climat tendu, le Sénat s’impose comme un contre-pouvoir législatif, porteur d’une vision plus incitative et territorialisée de la régulation médicale.
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