Traitement de choc pour état de crise

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Publié le 21 février 2004
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La crise hospitalière est psychologique, financière, organisationnelle, démographique… Autant de malaises admis par tous, y compris à l’intérieur de l’hôpital public, et relevés à l’occasion de l’élaboration du plan Hôpital 2007 censé éviter l’implosion du système. Pourtant, depuis l’entrée de plain-pied dans la réalisation de ce plan, c’est au mécontentement de la plupart des différents acteurs de l’hôpital que l’on assiste, des praticiens aux agents.

Les restructurations hospitalières sont aujourd’hui indispensables au maintien d’un bon niveau de qualité du service rendu.

Les premières applications sur la nouvelle « gouvernance » de l’hôpital, voulues par Jean-François Mattei, devaient être expérimentées en février. Des expériences qui font suite à la signature, mi-janvier, du relevé de conclusions sur le premier volet de discussions du plan Hôpital 2007, censé circonscrire la crise hospitalière.

Souvent observée à travers le prisme de l’insuffisance de moyens, cette crise est désormais généralisée. Tout le monde à l’hôpital est d’accord pour dire qu’une réforme est désormais nécessaire… pour sauver le système. Etant admis par beaucoup que le simple ajout de moyens ne constituerait qu’un palliatif. Pourtant la réforme entamée par Jean-François Mattei dans le cadre d’Hôpital 2007 a d’emblée été dénoncée comme une attaque contre le système de santé (à but purement comptable) par des représentants de l’ensemble des métiers de l’hôpital, défiance concrétisée par l’appel à la mobilisation du 16 décembre dernier pour le retrait de ce plan regroupant la plupart des syndicats d’agents jusqu’aux représentants des chirurgiens.

Selon les intersyndicats, l’Institut national des praticiens hospitaliers (INPH) (1) et la Confédération des hôpitaux généraux (CHG), « ce projet de réforme non seulement ne prend pas en compte les difficultés actuelles majeures de l’hôpital en termes de moyens et de démographie, mais il va détériorer durablement la place et les responsabilités des médecins à l’hôpital et donc la qualité des soins ». Mais, dans le même temps, certains organismes, moins nombreux (CFDT Santé-Sociaux, UNSA, le Syndicat national des cadres hospitaliers, CFE-CGC), réaffirmaient dans un communiqué commun la nécessité d’une réforme : « S’opposer à la réforme en cours en se focalisant sur la seule question des moyens […] serait faire le choix de restructurations subies aux conséquences sociales imprévisibles. »

Dans les faits, l’inédit front syndical entre praticiens et personnels hospitaliers, constitué en novembre, se sera vite lézardé. Certains syndicats de praticiens (2) ont finalement signé le « relevé de conclusions » rédigé par le ministère de la Santé suite aux discussions, « traduisant leur accord sur la réforme de l’organisation interne des hôpitaux publics », selon les termes du ministère. Sur le terrain, la nouvelle mobilisation du 22 janvier, à laquelle appelaient sept syndicats de praticiens et de personnels, s’est avérée très décevante (13,42 % du côté des médecins de CHU selon le ministère, 18,79 % chez les personnels).

Entre-temps, chacun (praticiens, agents hospitaliers, cadres, directeurs de personnels paramédicaux, directeurs d’établissements…) avait tenté d’être entendu sur des points précis du projet et obtenir une place dans le futur exécutif des hôpitaux. Tout le monde ou presque s’est dit déçu. Les futurs conseils exécutifs des hôpitaux associeront médecins et personnels de direction. Du coup, les paramédicaux se sentent de fait exclus d’un des futurs organes de pouvoir de l’hôpital… In fine, seuls les praticiens ont réellement pu discuter le mois dernier sur le thème de la gouvernance et pu ainsi conserver l’existence des services, prés carrés menacés par Hôpital 2007 qui crée des pôles d’activité avec des exécutifs forts (lire encadré p. 25).

La formation continue du personnel est suffisante.

Inorganisation et désenchantement.

La nouvelle directrice générale de l’AP-HP (environ 15 % de l’activité hospitalière française), Rose-Marie Van Lerberghe, ne semble pas adulée par les médecins et personnels hospitaliers, c’est le moins que l’on puisse dire. Cela étant, son discours résume à lui seul le malaise qui transparaît. Son constat ? « Celui de la grande qualité des personnels, leur grande conception du service public – la canicule a confirmé cela – mais aussi un sentiment d’épuisement, de désenchantement, d’inquiétude face à ce qu’ils appellent la montée du consumérisme chez les malades, le poids terrifiant de la multiplication des normes, l’inadaptation du personnel en termes d’organisation des services, au vieillissement de la population (difficultés d’adaptation aux rythmes des personnes âgées, problématique des polypathologies…)… » La patronne de l’AP-HP parle aussi d’un « sentiment d’étranglement budgétaire, chacun se considérant pénalisé par rapport au voisin. Mais ce ressenti au plan microéconomique ne correspond pas au constat que l’on peut faire au plan macroéconomique, assène-t-elle, en mettant le doigt sur des « problèmes d’allocation ».

« Au terme « efficience », on substitue le terme « générosité ». Pourtant, on sait très bien qu’un gaspillage dans un service se traduira par un manque ailleurs ! », analyse aussi Stanislas Johanet, anesthésiste-réanimateur à l’hôpital Trousseau (Paris). Avant de constater que certains services ou établissements ont objectivement, de ce point de vue, trop de moyens. D’où la nécessité de responsabiliser les praticiens aussi sur le plan de la gestion des moyens à l’hôpital.

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Besoins de médecins managers ?

Auteur d’un ouvrage intitulé La Crise des professions de santé, l’économiste Jean de Kervasdoué estime que « la crise hospitalière n’est pas économique », mais qu’il s’agit plutôt d’une « crise des élites médicales, peu habituées à ce qu’on leur demande des comptes et qui ont du mal à descendre de leur piédestal ». Au-delà de cette charge un peu provocatrice, il note le retrait du corps médical dans l’organisation hospitalière, d’où une véritable « séparation du corps médical du reste du personnel hospitalier ». La volonté d’indépendance des médecins en général aboutit selon lui à une division considérable du travail qui se traduit concrètement à l’hôpital par une organisation par services indépendants sans aucun management de l’ensemble.

Management. Le mot maudit est lancé : pour de nombreux observateurs, les médecins doivent devenir de véritables cadres supérieurs et s’impliquer dans l’organisation. « Une révolution pas encore acceptée par nos chers collègues ! », lance Jean de Kervasdoué. « Ne nous leurrons pas, tant que les syndicats n’auront pas intégré la dimension managériale de l’hôpital, les hôpitaux ne changeront pas ! », dénonce Louis Omnes, directeur de l’hôpital Georges-Pompidou (Paris). Pour ces syndicats, polyvalence serait synonyme de disqualification… Oui mais, dans le même temps, les médecins ne veulent en aucune manière se retrouver subordonnés au pouvoir administratif. Alors pour évoluer, il ne faudra pas compter sur la vertu des médecins, se plaît à rappeler Alain Coulomb, directeur de l’ANAES. « L’intérêt que l’on aura d’évoluer, ce sera de récupérer des crédits d’investissement », confirme la directrice de l’AP-HP. On en arrive à la carotte : le robinet des crédits sera ouvert… pour ceux qui se restructurent et qui entament des projets concrets d’investissement.

En attendant, « l’organisation du travail à l’hôpital se fait non pas en fonction des besoins des malades, mais de la catégorie professionnelle la moins nombreuse ce jour-là dans l’établissement », lance Jean de Kervasdoué. Inorganisation qui se double d’un problème de pénurie (lire encadré p. 24) dont l’origine est double : d’une part un déficit de diplômes, d’autre part une fuite de certains vers le privé.

J’ai confiance en la capacité de l’établissement à conserver en nombre suffisant le personnel soignant.

Segmenter le malaise.

Trois rapports d’envergure ont été réalisés l’an passé en prélude à la mise en oeuvre d’Hôpital 2007, dont les conclusions et les préconisations se recoupent et, une fois n’est pas coutume, vont être en grande partie prises en compte. Celui corédigé par Guy Vallancien (3), chef du département urologie à l’Institut Montsouris (Paris), a tenté de « segmenter » le malaise. Un malaise apparemment perçu par la grande majorité des 1 500 personnes du monde hospitalier interrogées dans le cadre de ce rapport (1 000 en direct, 500 via Internet) : « Les freins au bon fonctionnement des établissements sont connus : le renforcement de la tutelle dans la gestion ; un conseil d’administration le plus souvent déresponsabilisé ; un cloisonnement et une lutte des pouvoirs entre les médecins, les soignants et l’administration. […] Dans les services, le cadre jongle avec la mise en place de la RTT, il subit la pression des médecins qui souhaitent travailler selon leurs souhaits, celle des personnels revendiquant leurs droits à la RTT, avec un mécontentement relayé par les syndicats. […] Du côté de l’administration et des services techniques, les journées s’allongent car les moyens ont diminué et il faut boucler les dossiers. »

Côté personnels, « malgré les multiples protocoles et la mise en place de la RTT, les signaux passent de l’orange au rouge : absentéisme en hausse, détérioration des conditions de travail, tension dans les équipes par manque de communication, sentiment de non-reconnaissance, manque de respect, démotivation et demain désintérêt », relève-t-on.

Côté budgets, « nous continuons à doter les services en personnel en fonction de l’histoire même de la structure de soins, du poids politique dans l’établissement, de son chef de service et de soi-disant ratios personnel/lit de malade qui n’ont guère de sens ». Et à travers la vingtaine de commissions que compte un établissement, ce sont des centaines de milliers d’heures qui sont passées chaque année en réunions, a-t-on calculé.

Résultat ? « Manque de lits, attente aux urgences, infections nosocomiales, stress au travail, risque médicolégal, accumulation des procédures inappliquées et inapplicables… Le chapelet est interminable, signe de non-qualité à tous les niveaux », analyse le rapport. Et les experts mandatés par le ministère de conclure qu’« il faut lancer en même temps deux moteurs pour remettre un hôpital rénové dans le sens de la marche : l’évaluation de la qualité et la tarification à l’activité ».

Qualité égale économies.

D’autres préconisations sont faites dans la foulée de cette révolution économique : fournir les moyens humains suffisants ; simplifier et annuler nombre de procédures administratives inutiles ou obsolètes et coûteuses… quand elles sont applicables ; mettre en place une véritable politique managériale et développer la « notion de contrat » impliquant la responsabilité des personnels en interne, notamment les praticiens, développer le principe d’intéressement collectif (l’intéressement individuel étant globalement rejeté par les personnels).

Au plan sanitaire, l’organisation passera de plus en plus par le niveau régional. Il est probable que l’on verra ainsi les agences régionales de l’hospitalisation, rassemblant déjà de plus en plus de pouvoir notamment au plan économique, se muer en agences régionales de santé. Un point qui concernera forcément à terme les soins de ville et l’officine !

Ces constats sont largement partagés au sein de l’hôpital. « Alors pourquoi les choses ne se mettent pas en place ?, interroge Louis Omnes. Clairement, en raison du conservatisme et du corporatisme. Le corporatisme cloisonne les métiers et le conservatisme cloisonne les territoires de savoir et de pouvoir. »

Mieux répartir les primes.

Pourtant, tous les observateurs sont d’accord pour constater que, dans le désordre ambiant et les soucis financiers, c’est le dévouement des personnels qui maintient le système sanitaire efficace depuis plusieurs années. Une forme de paradoxe. C’est pourquoi René Couanau, président de la mission d’information de la commission des Affaires sociales de l’Assemblée nationale sur l’organisation interne de l’hôpital, insiste sur le fait que « la perte de moral des personnels hospitaliers est aussi dangereuse que tous les autres aspects de la crise ». Il insiste lui aussi sur l’importance de la mise en place de l’intéressement (au moins collectif par pôle, service…) des personnels dans le cadre de la réforme : « Il n’y a persistance des bonnes volontés que si elles sont intéressées. » Et c’est peut-être là qu’est l’os, car si Hôpital 2007 prévoit un gros effort financier pour l’investissement, aucun fonds n’a été prévu pour la mise en place de la réforme. « La réforme de l’hôpital, c’est un 747 qui roule sur le tarmac derrière celui des retraites et devant celui de la réforme de l’assurance maladie, décrit Guy Vallancien. Pour éviter le crash, il faudra appuyer rapidement sur la manette des gaz – aller le plus vite possible en quelques mois, fixer des dates – et, surtout, avoir le plein de kérosène : l’argent. Si les gens sur le terrain ne voient pas vite venir des moyens, cette réforme sera un échec. »

(1) INPH : premier intersyndicat de l’hôpital public regroupant les syndicats de médecins, de pharmaciens (Synprefh), d’odontologistes et de sages-femmes.

(2) Coordination médicale hospitalière, Syndicat national des médecins des hôpitaux publics ainsi que la FHF, des conférences de directeurs généraux et de présidents de commissions médicales d’établissement, de la CFDT, de l’UNSA, du SNCH, de la CFE-CGC, la conférence des directeurs de centre hospitalier ayant manifesté son soutien sans signer.

(3) Projet Hôpital 2007 : mission sur « la modernisation des statuts de l’hôpital public et de sa gestion sociale ».

Les grandes lignes du plan Hôpital 2007

Le plan gouvernemental Hôpital 2007 est censé remettre à plat :

– la « gouvernance » de l’hôpital (qui a le pouvoir de décision, de gestion ?) ;

– les statuts des praticiens hospitaliers ;

– le statut des directeurs d’établissement ;

– le dialogue social à l’hôpital (possibilité de signer des accords locaux sur des thèmes comme la formation, les conditions de travail, les primes…) ;

– le régime budgétaire et comptable des hôpitaux (mise en place d’un état prévisionnel des recettes et des dépenses dès 2005 ou 2006, soit un encadrement des dépenses, avec un suivi régulier par l’agence régionale de l’hospitalisation (ARH) au cours de l’année.

La mise en oeuvre de la tarification à l’activité (T2A, instaurée par le PLFSS 2004) et l’ordonnance de simplification administrative (pouvoir renforcé des ARH, publiée en septembre 2003) en sont deux piliers. Y est également inclus le rapprochement des statuts du public et du privé ; la rénovation des modes d’achats des hôpitaux (regroupements en centrales d’achats…) ; un dispositif de sécurité en cas de dérive de gestion (pouvoirs d’injonction ou de mise sous tutelle par l’ARH) ; une organisation simplifiée sous forme de pôles d’activité ; un exécutif fort et resserré ne dépendant plus directement du conseil d’administration…

Le volet incitatif du plan prévoit 10 milliards d’euros d’investissements, soit 6 milliards d’euros supplémentaires dans l’hôpital (+ 30 % en volume)… Avec introduction de la sphère privée dans l’hôpital public, pour la réalisation des projets immobiliers notamment (en matière de construction, de location…).

1 010 établissements de santé publics (sur 3 076 établissements).

600 000 lits d’hospitalisation.

240 000 lits de court séjour (150 000 dans le public, 90 000 dans le privé).

60 % de taux d’occupation des « lits aigus », alors que l’hôpital manque dans le même temps de lits de moyen et long séjour…

68 % de taux de vétusté des équipements en 2000.

12 millions d’hospitalisés par an.

13 millions de visites aux urgences.

Les dysfonctionnements majeurs de l’hôpital

Selon les conclusions du premier volet de discussions du plan Hôpital 2007 mis en place par le gouvernement :

– « Les directeurs ploient sous les textes, règlements et autres contraintes sécuritaires.

– Les médecins s’inquiètent de la bureaucratie, de l’augmentation des poursuites, du manque de personnel soignant, de l’insuffisance d’investissement en matériels et plus généralement d’une pénurie […].

– Les personnels hospitaliers qui se dévouent au quotidien ont pris de plein fouet la réglementation des trente-cinq heures qui n’a fait qu’aggraver une situation déjà précaire.

– L’absence de prise en compte de la pénibilité et de la responsabilité dans les rémunérations est régulièrement évoquée.

– Les malades et leurs familles se plaignent d’une absence de prise en charge globale de leur cas, en insistant sur les difficultés d’information qu’ils rencontrent, sur les délais d’attente aux urgences et sur la pauvreté des établissements de soins de suite et de long séjour. La gestion du parcours des patients (admission, séjour, soins de suite et retour à domicile) est souvent inadaptée et les personnes âgées souffrent le plus de ces dysfonctionnements.

– Les administrations administrent plus qu’elles ne gèrent ou dirigent, les médecins n’ont guère de culture du management et prescrivent sans prendre en compte le coût de leurs décisions, les usagers voudraient avoir le SAMU sur leur paillasson sans débourser un euro et les élus s’opposent presque toujours aux restructurations nécessaires par crainte du verdict populaire. »

– Le rapport dénonce en outre « la capacité d’immobilisme des hospitaliers publics. Le statut très protecteur amène les agents à considérer que leur fonction ne saurait être remise en cause et par là même compromet (ou retarde) toute redéfinition des missions de leur hôpital ».

A retenir

RÉGIONALISATION

L’ordonnance de simplification administrative (de septembre 2003) a opéré un transfert de compétences de l’Etat aux agences régionales de l’hospitalisation (ARH). Par exemple, la possibilité de suspendre le droit d’exercice des médecins, pharmaciens hospitaliers, sages-femmes…, l’autorisation ou la suspension de PUI (pharmacies à usage intérieur)… L’ARH définit le territoire de santé de chaque établissement et devient maître de toutes les autorisations.

Les groupements de coopération sanitaires peuvent désormais associer hôpitaux publics et privés, s’ouvrir aux établissements médico-sociaux et professionnels de santé libéraux pour gérer des équipements communs ou des PUI.

Une réelle pénurie

Le constat est unanime et touche à la fois les infirmières – les pouvoirs publics ont d’ailleurs décidé de faire passer le quota par promotion d’infirmières de 26 000 (depuis 2000) à 30 000 – et les praticiens (seule la moitié des postes créés en 2003 dans le cadre de la RTT a pu être pourvue). Les petites structures, notamment, et les plus isolées connaissent de plus en plus de difficultés pour recruter. D’où la nécessité de trouver des accords de temps partagé avec de plus gros établissements, notamment pour éviter aux établissements en difficulté de recrutement un certain nombre de pratiques douteuses. Au dernier forum Economie Santé 2003 organisé par Les Echos, Stanislas Johanet, anesthésiste-réanimateur à l’hôpital Trousseau, spécifiait que « le cours de l’anesthésiste au marché gris des hôpitaux de sous-préfecture en grande détresse (sic) » se situait à 6 000 euros la semaine (fin novembre 2003), « sachant que ce mercenaire peut être employé à temps plein ailleurs ». Le même praticien déclarant froidement que 50 % des anesthésies en France sont réalisées par des infirmières anesthésistes…

Alors que la chirurgie représente le gros de l’activité hospitalière, « demain nous n’aurons plus de chirurgiens », note Jacques Domergue, lui-même chirurgien et député de l’Hérault.

Ici comme dans d’autres secteurs de santé, la solution passera par le numerus clausus et les transferts de compétences (par exemple créer des formations de quelques mois pour former les infirmières comme assistantes de médecins).

A court terme, 82 MEuro(s) ont été débloqués par les pouvoirs publics pour inciter les médecins à travailler au-delà de leurs 48 heures hebdomadaires.

2 000 postes de praticiens hospitaliers créés en 2003, dans le cadre de l’application des 35 h, dont la moitié seulement ont pu être pourvus (750 prévus en 2004, autant en 2005).

26 600 postes non médicaux créés en 2002 et 2003 ; 10 400 doivent s’y ajouter en 2004.

150 métiers sont dénombrés à l’hôpital.

1,029 million de personnes y travaillent dont 158 000 médecins (public + privé).

66 % pourcentage des salaires dans les frais hospitaliers (6 % pour le médicament).

Les pôles d’activité, base de restructuration

Les hôpitaux sont censés en finir avec la « balkanisation » des niveaux de décision et de responsabilité en créant ce que le plan Hôpital 2007 intitule des « pôles d’activité » (par exemple en gériatrie, urgences, psychiatrie, odontologie, etc.). Chaque établissement est censé choisir l’organisation qui lui convient en principe d’ici le 1er janvier 2007. Les syndicats de praticiens n’ont jamais renoncé à faire pression sur Jean-François Mattei pour que l’organisation par pôles d’activité ne soit pas obligatoire. Et pour cause. Elle se heurte à la logique territoriale et corporatiste actuelle. Dans le plan initial, ils devaient conduire à la suppression des services en tant qu’entité juridique et territoriale. Mais les syndicats de praticiens ont obtenu le maintien des services en tant qu’équipes médicales. « Lorsqu’un chef de service décidera d’intégrer un pôle, il devra bien sûr être en accord avec les objectifs fixés par le pôle dans une logique de contractualisation », a commenté Jean-François Mattei.

Les CHU de Lille et Nantes ont déjà expérimenté ce principe. A Nantes, le directeur général Jean-Paul Guérin parle « d’une avancée spectaculaire » au plan stratégique (lisibilité) mais se dit incapable de vérifier que des économies de gestion ont ainsi été réalisées. Rachel Bocher, praticien au CHU de Nantes mais aussi présidente de l’INPH (premier intersyndicat hospitalier entre médecins, pharmaciens, odontologistes, sages-femmes), craint le « danger d’un système girondin dictatorial » si un pôle est créé sans « dynamique volontaire de regroupement », ce qui selon elle s’est passé à Nantes dès 1999.

La direction des pôles sera en principe dédiée à des praticiens ayant en plus une fonction managériale identifiée prise en compte dans le temps de travail et aura une délégation de gestion de la part de la direction du CHU.