Quel syndicat vous va le mieux ?

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Publié le 13 mars 2010 | modifié le 28 août 2025
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Dans quelques mois, chaque titulaire pourra élire des représentants syndicaux dans le cadre des Unions régionales des professionnels de santé (URPS). Une première qui devrait bouleverser le paysage syndical de la pharmacie. Qui sont ces syndicats qui convoitent vos voix ? Quels dossiers vont-ils défendre ? Séance d’essayage avant de trouver chaussure à son pied.

Pharmacien, une profession plus corporatiste que les autres ? A la différence des médecins, les officinaux battent des records de syndicalisme. Notre sondage Direct Medica révèle que plus d’un titulaire sur deux adhère à un syndicat (68 %), alors que, toutes professions confondues (salariés et employeurs), ce taux peine à franchir le cap des 8 % en France. Ce n’est pas l’esprit de corps qui motive les pharmaciens à franchir la porte d’un syndicat, mais surtout le souci d’avoir des informations sur leur profession (50 %). L’attachement à ces structures est donc fort, même si les pharmaciens ne seraient pas contre quelques retouches. Ainsi, une majorité (58 %) trouve que les syndicats ne défendent pas suffisamment la profession et que leur désaccord sur certains dossiers nuit à la profession (76 %). Ils sont unanimes (96 %) pour dénoncer un certain manque de mordant pour défendre la marge et la rémunération des pharmaciens. Presque un titulaire sur deux (44%) les trouve néanmoins proches des préoccupations du terrain. Les prochaines élections syndicales devraient donc être suivies avec attention.

Les URPS : un enjeu de taille

Les pharmaciens vont siéger aux URPS (Unions régionales des professionnels de santé) par l’intermédiaire de leurs représentants syndicaux. C’est la première fois que les pharmaciens vont être confrontés à des élections pour désigner leurs représentants syndicaux. Tous les titulaires pourront voter à ces élections organisées dans 26 régions. « De leur résultat dépendra la nouvelle distribution du paysage syndical », explique Gilles Bonnefond, président délégué de l’USPO. Si les statuts et le fonctionnement de ces structures – dont les élections devraient avoir lieu en novembre – seront prochainement fixés par décret, les URPS ont été instaurées par la récente loi HPST. « La création des Agences régionales de santé (ARS) invite à organiser la représentation à l’échelon régional de l’ensemble des professionnels de santé exerçant à titre libéral. Chargées de gérer l’offre de soins (…), les futures agences auront en effet besoin d’interlocuteurs fiables, représentatifs, qu’ils s’agissent des associations de patients ou des syndicats de professionnels de santé libéraux », lit-on dans le projet de loi initial (article 27). La loi HPST est donc claire, les URPS doivent contribuer, à l’échelle régionale, à l’organisation de l’offre de santé et des rapports entre les professionnels de santé et l’assurance maladie (via des conventions nationales), mais elles pourront également assurer des missions particulières à travers des contrats conclus avec les ARS, comme des actions de santé publique ou des campagnes d’information auprès des patients. Elles percevront une contribution obligatoire de chaque professionnel de santé libéral. Un décret devrait fixer prochainement le taux annuel de contribution. Elles pourront également reçevoir des subventions liées à leurs missions. Une enquête de représentativité sera organisée afin de déterminer les syndicats les plus représentatifs au regard de plusieurs critères, notamment une ancienneté minimale de deux ans et une présence dans au moins un quart des départements et des régions. L’élection sera organisée selon un scrutin proportionnel à la plus forte moyenne. Pour signer un accord ou une convention, les syndicats devront avoir réuni au moins 30 % des suffrages exprimés au niveau national. Ils seront élus pour cinq ans.

Dans le paysage officinal, c’est la FSPF qui est, de loin, le plus important des syndicats avec environ 10 000 adhérents déclarés. Avec plus de 130 ans d’existence, cette structure complètement décentralisée se veut garante des trois piliers de l’officine : le monopole, une propriété indivisible et le respect de la répartition démographique des pharmacies. A côté de ce poids lourd syndical, l’USPO affirme sa volonté de changement. Née il y a presque dix ans, elle regroupe maintenant 3 000 adhérents. Enfin, l’UNPF fédère des officines qui partagent une vision libérale. Ce syndicat, qui fédère un millier d’adhérents, rassemble des pharmacies dont le chiffre d’affaires excède 1,8 fois la moyenne nationale. En dépit de nets clivages, s’il y a bien un sujet sur lequel il y a plutôt consensus, ce sont les nouvelles missions qui seront bientôt confiées aux pharmaciens. La FSPF, l’USPO et l’UNPF se battent ensemble pour obtenir une rémunération de services, tels que le dépistage ou le suivi des pathologies chroniques via des « consultations » pharmaceutiques, à l’officine. Philippe Gaertner, président de la FSPF, plaide pour la création « d’un protocole des différentes interventions possibles du pharmacien ». Celui-ci doit donc d’abord cibler les patients qui requièrent une intervention spécifique pour faire de la prévention, du dépistage ou de la surveillance de pathologies chroniques. Or, pour justifier d’une rémunération supplémentaire, le pharmacien devra, d’après la FSPF, prouver que son intervention améliore l’état de santé ou le suivi du patient. C’est pourquoi Philippe Gaertner prône la création de « méthodes évaluatives permettant de mesurer objectivement l’accompagnement des patients ».

Claude Japhet, président de l’UNPF, propose de fonder « une nomenclature qui établirait une codification de tous les services, hierarchisés selon le niveau d’intervention du pharmacien ». Enfin, Gilles Bonnefond, président délégué de l’USPO, qui avoue « s’être bagarré pour que ces nouvelles missions soient inscrites dans la loi HPST», cherche, lui, à négocier, dans le détail, la rémunération du pharmacien. « Il faudra faire prendre en charge le conseil pharmaceutique et les médicaments par les organismes complémentaires dans le cadre du 1er recours et en privilégiant le tiers payant. Nous devons construire une rémunération mixte, qui reposera à la fois sur la marge et l’entretien pharmaceutique. Il faudra aussi rémunérer les actes de prévention, de dépistage et le service à la personne.» Le président délégué de l’USPO envisage aussi « un partenariat avec l’industrie pharmaceutique pour obtenir des molécules récentes et adaptées au conseil des pharmaciens. »

APLUS, cet autre en quête d’une nouvelle représentativité

Né il y a dix ans, APLUS (Action pharmaceutique libérale d’union syndicale), syndicat dirigé par Pascal Chassin, a connu ses heures de gloire au début des années 2000. Avec plus de 2 000 adhérents, il participait aux débats et négociations de la profession au même titre que la FSPF, l’UNPF et l’USPO. Aujourd’hui, il a perdu sa représentativité. « Lors des discussions sur la convention pharmaceutique, nous avons été politiquement mis à l’écart et nous avons dû faire face à une défection importante d’adhérents, regrette Pascal Chassin. Par conséquent, nous ne pouvons plus participer aux débats sur la profession. » Le syndicat a donc lancé une procédure (pour le moment en appel) pour regagner sa représentativité. En attendant, APLUS tente de se relever. « Nous continuons à faire des appels à cotisations (de l’ordre de 290 euros par an) et à diffuser nos circulaires d’informations auprès d’un millier d’adhérents. » Le syndicat dispose toujours de locaux et d’un conseil d’administration. « Nous défendons un exercice professionnel tourné vers le patient et militons depuis plusieurs années pour que les pharmaciens puisse proposer des prestations pharmaceutiques rémunérées. Les nouvelles missions du pharmacien contenues dans la loi HPST constituent la philosophie d’APLUS », résume son président. Pascal Chassin continue de « mener des discussions officieuses sur le terrain avec les députés ». Son prochain chantier? Négocier une rémunération de l’acte du pharmacien, remboursé par la Sécurité sociale. APLUS milite pour « une profession individuelle et indépendante sous monopole ». Aussi Pascal Chassin se montre-t-il réservé sur les holdings. « Si les holdings ne sont pas verrouillées, elles peuvent devenir un outil de trust pharmaceutique. » Et pas touche à la répartition des officines.

Quatre dossiers sur lesquels ils se battent

L’ouverture du capital

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La décision européenne, l’an dernier, a sonné le glas de l’ouverture des officines à des capitaux extérieurs. Pour autant, la question reste ouverte. Sur ce point, la FSPF est inflexible. « Dès 2008, nous étions les seuls à déclarer qu’il ne fallait pas ouvrir le capital », martèle Philippe Gaertner. Le président de la FSPF n’a pas bougé d’un iota. « Le titulaire doit être majoritaire dans le capital et les droits de vote. C’est une condition essentielle de l’indépendance. » Si, de son côté, l’USPO refuse l’entrée de capitaux extérieurs, le syndicat demande une souplesse pour « rendre le métier plus attractif pour les jeunes ». Gilles Bonnefond souhaiterait « favoriser l’entrée d’un jeune pharmacien dans le capital d’une officine en créant des outils permettant des passations de parts sans être surtaxés. L’adaptation des SEL et des SPFPL doivent avoir cet objectif en priorité. ». Claude Japhet milite, lui, pour une ouverture du capital aux pharmaciens pour permettre à un adjoint d’accéder à plus de responsabilités. « Nous avons toujours séparé les revenus du travail et du capital, explique-t-il. Le capital peut être partagé avec les adjoints car un pharmacien peut être investisseur dans plusieurs pharmacies. »

Les regroupements

Pour les trois syndicats, les regroupements doivent être favorisés. Cette réflexion est, pour la FSPF, étroitement liée à une analyse de la répartition démographique des pharmacies. Philippe Gaertner souhaiterait établir « une cartographie du réseau idéal des officines avec les différentes typologies d’exercice et des besoins en terme de santé publique à l’horizon 2010-2050 ». Conscient qu’il « existe des officines en surnombre », le patron de la FSPF adhère au principe que « des licences doivent pouvoir être supprimées ». L’USPO travaille à la création d’outils fiscaux afin de « permettre à toutes les officines d’être éligibles dans de meilleures conditions au regroupement si elles le souhaitent ». Claude Japhet suit le même axe et prône également une panoplie fiscale pour inciter au regroupement.

La formation continue

Sur ce point, les trois syndicats divergent. Pour Philippe Gaertner, la formation continue fait partie des dossiers prioritaires. « La formation ne doit pas être un dispositif imposé, mais décidé par le titulaire et son équipe », assure le président de la fédération, qui milite pour l’application de la formation conventionnelle prise en charge. Autre cheval de bataille défendu par la FSPF : la formation des préparateurs. « Nous devons déterminer quelles sont les formations qu’il faut donner aux préparateurs dans les officines. » A l’USPO, le dossier formation est plutôt vu sous un angle pratique. « Il faut que toutes les formations à distance soient éligibles au développement professionnel continu. Pour un pharmacien et son équipe, le développement du e-learning est indispensable », explique Gilles Bonnefond. Pour l’UNPF, il y a du ménage à faire dans les formations proposées aux équipes. « Les thèmes doivent être davantage orientés sur la pratique au comptoir et s’éloigner des apprentissages fondamentaux, précise Claude Japhet. Par exemple, apprendre l’évolution d’une cellule cancéreuse dans le corps humain ne permettra pas au pharmacien de mieux conseiller un patient cancéreux. »

L’économie

Avec la conjoncture et la baisse des marges, c’est LE dossier des syndicats. La FSPF souhaite « trouver de nouveaux paramètres de marge car les critères du prix fabricant et du nombre d’unités ne progressent plus. » L’UNPF et l’USPO remettent en cause le blocage des remises à 2,5 % pour les achats via les grossistes-répartiteurs. « Ce blocage est inadapté. Avec le déclin de l’activité des officines, il n’y a plus de raison de rester dans un système encadré », explique Claude Japhet. De son côté, Gilles Bonnefond veut arrêter les grands conditionnements et s’insurge aussi contre le blocage des remises « qui constitue un véritable frein pour la compétitivité ». Le président délégué de l’USPO va même plus loin. « Il est inacceptable, qu’en raison du blocage des remises, les officines ne soient pas sur un pied d’égalité dans leur politique d’achats avec les pharmacies à usage intérieur. » Les syndicats souhaitent aller vers une modification des tranches de marge. L’UNPF souhaite « revoir le système pour rendre la marge moins dégressive et plus linéaire ». Gilles Bonnefond, en revanche, craint « qu’une revalorisation de la première tranche conduise à déstabiliser les pharmacies car elle risque de se faire au détriment de la création d’une nouvelle tranche. »

Sondage directmedica

Sondage réalisé par téléphone entre le 22 et 23 janvier 2010 sur un échantillon représentatif de 100 pharmaciens titulaires, en fonction de leur répartition géographique et de leur chiffre d’affaires.

Etes-vous syndiqué ?

Si oui, quelle est la raison principale ?

Si non, quelle est la raison principale ?

Les syndicats défendent-ils suffisamment la profession ?

Les syndicats devraient-ils être plus actifs sur :

– Les questions économiques

(SEL, holdings…)

– L’évolution de la profession, comme l’ouverture du capital

– Les questions sociales

– Les marges et la rémunération

Pensez-vous que les syndicats travaillent dans le bon sens afin que les nouvelles missions du pharmacien prévues dans la loi HPST se réalisent de façon satisfaisante ?

Quel service principal attendez-vous d’un syndicat ?

Trouvez-vous que le désaccord des syndicats sur certains points nuit à la profession ?

Trouvez-vous que les syndicats sont proches de vos préoccupations quotidiennes ?

Comment fonctionnent-ils ?

La FSPF et sa démocratie participative

La FSPF est dotée d’une structure lourde. Si seulement 11 permanents travaillent au siège parisien du syndicat, la FSPF est constituée de 81 syndicats départementaux dirigés par une centaine de personnes, d’un conseil d’administration où siègent 26 personnes et d’un bureau. Aucune décision n’est prise sans obtenir l’accord préalable du conseil d’administration. Cette structure collégiale et démocratique, Philippe Gaertner la défend contre vents et marées. « Il y a un sens de la représentativité. Les syndiqués ont le sentiment de participer aux décisions de la profession, et donc à l’évolution du métier.» Revers de la médaille, certains soulignent un risque de « manque de réactivité » de cette structure.

A l’USPO, un bureau chargé de prendre les décisions

Jeune syndicat, l’USPO est quand même constitué de 40 antennes départementales. « Nous sommes représentés dans tous les départements car les pharmaciens peuvent aussi adhérer directement quand il n’y a pas d’antenne régionale », explique Gilles Bonnefond. Comme tout syndicat, les décisions sont prises par une assemblée générale et un conseil d’administration, qui définissent les grands axes, lesquels sont portés par le bureau au quotidien. « Dans les négociations, le conseil d’administration donne au bureau des mandats préalables, avec des fourchettes de décision, si bien que nous pouvons signer une convention ou un accord sans avoir besoin de le convoquer à partir du moment où la négociation entre dans le cadre de la politique fixée. »

A l’UNPF, une organisation centralisée

Le syndicat a choisi de ne pas avoir d’antennes départementales « pour être plus réactif et ne pas risquer une déperdition d’information », explique Claude Japhet. Toujours est-il que, comme toute structure associative, l’UNPF organise une assemblée générale (une à deux fois par an) et est constituée d’un conseil d’administration. Celui-ci élit un bureau, qui choisit son président. « Les décisions sont prises par le bureau par délégation, tant qu’elles ne sortent pas du champ des grandes orientations fixées par le conseil d’administration. »

Repères

FSPF

Date de création : 1878

Nombre d’adhérents déclarés : 10 000

– Coût de la cotisation : 500 à 900 euros par an

Président : Philippe Gaertner

Coordonnées : Maison des pharmaciens, 13, rue Ballu, 75311 Paris cedex 09, tél. : 01 44 53 19 25

http://www.fspf.frUSPO

Date de création : 2001

Nombre d’adhérents déclarés : 3 000

– Coût de la cotisation : 270 euros par an

Président délégué : Gilles Bonnefond

Président : Patrice Devillers

Coordonnées : 43, rue de Provence, 75009 Paris, tél. : 01 46 47 20 80

http://www.uspo.fr

UNPF*

Date de création : 1899

Nombre d’adhérents déclarés : 1 000

Coût de la cotisation : de 550 à 950 euros par an

Président : Claude Japhet

Coordonnées : 57, rue Spontini, 75116 Paris, tél. : 01 53 65 61 71

http://www.unpf.org

* Union nationale des pharmacies de France

Quels services offrent-ils à leurs adhérents ?

A la FSPF, des structures connexes

Les adhérents peuvent solliciter un expert sur des questions liées à leur exercice professionnel. La FSPF s’appuie également sur des structures connexes. Ainsi, les adhérents bénéficient de l’expertise de Résopharma. Ce concentrateur technique se fait l’interface entre les pharmaciens et les organismes d’assurance maladie (télétransmission, assistance tchnique…). La Fédé édite un mensuel, Le pharmacien de France, diffusé par abonnement à 10 000 exemplaires (dont 7 500 adhérents). Le syndicat envoie à ses adhérents un tableau de bord complet constitué d’une série d’indicateurs (chiffre d’affaires, marge, part des médicaments remboursables, de l’OTC…) réalisé par Pharmastat à partir des données de 13 700 pharmacies.

A l’USPO et l’UNPF, une proximité avec le terrain

Les adhérents de l’USPO bénéficient d’un service juridique pour les aider dans leurs opérations de transferts, de regroupements ou encore d’acquisitions. Une ligne téléphonique leur permet de poser des questions en droit social. Des circulaires sont envoyées aux adhérents pour les informer de nouvelles réglementations ou de modifications de prix. Le syndicat peut aussi aider les pharmaciens en cas de litige avec les organismes d’assurance maladie. L’UNPF offre le même type de prestations à ses adhérents (service social et juridique). Une procédure a également été mise en place dans les cas de recours contre l’Assurance maladie. « La demande d’un adhérent est traitée dans la journée », insiste Claude Japhet. Une lettre d’informations hebdomadaire est adressée aux adhérents.

Quelle vision de la profession défendent-ils ?

Pour l’UNPF, le pharmacien est d’abord un chef d’entreprise

L’UNPF, porté par Claude Japhet, est le plus libéral de tous… et ne s’en cache pas. « Nous avons toujours défendu la liberté du pharmacien de contracter, de négocier ses conditions commerciales et de communiquer sur son activité professionnelle, tout en respectant bien entendu les obligations réglementaires », affirme le président de l’UNPF. Son fil conducteur ?

« La pharmacie est une structure de services. Le rôle du syndicat est alors d’adapter les pharmacies à la demande du consommateur. » Libre-accès, Internet, dépistage à l’officine, spécialisations, comptoirs isolés… L’UNPF mise clairement sur le développement de nouveaux services à l’officine, mettant en avant la dimension de chef d’entreprise du titulaire. « Il faut faire sortir le pharmacien de son officine, insiste Claude Japhet. Avec le vieillissement croissant de la population, les patients se déplaceront de moins en moins à la pharmacie. C’est au pharmacien de s’adapter. Ce défi, c’est aussi celui du monopole. »

Pour l’USPO, les consultations pharmaceutiques avant tout

Le service, c’est aussi la valeur défendue par l’USPO. « Nous avons créé l’USPO pour faire évoluer la profession », insiste Gilles Bonnefond. Comparé à l’UNPF, l’angle est d’avantage orienté vers la santé et l’accent est mis sur le rôle du pharmacien correspondant. « La politique de l’USPO, qui s’inspire de l’exemple suisse, est construite autour du pharmacien de coordination des soins qui va pouvoir prendre en charge les patients chroniques autour d’entretiens, » confirme le président délégué du syndicat.

La FSPF mise sur la formation et la stabilité de l’exercice professionnel

Le plus gros syndicat de la profession défend une vision orientée vers le professionnel de santé. C’est la raison pour laquelle le président de la FSPF, Philippe Gaertner, s’efforce de « prendre des décisions stables et de s’y tenir pour permettre au pharmacien de conduire son action à moyen et long terme. » Pour lui, « le rôle de chef d’entreprise n’est pas prioritaire, c’est un appui opérationnel, l’avenir de l’officine étant d’abord tourné vers celui de professionnel de santé ». Autre idée forte défendue par la fédération : la défense des intérêts économiques de ses adhérents. Outre un tableau de bord édité par Pharmastat – la marque commune entre IMS et la FSPF – le syndicat réalise, chaque année, une étude des bilans de ses adhérents (sur un échantillon de 1 000 pharmacies) et une analyse de la trésorerie des pharmaciens.

Bernard Vivier, directeur de l’Institut supérieur du travail

Le syndicalisme a-t-il baissé en France ?

Oui, le nombre d’adhérents a considérablement baissé. En 30 ans, il a été divisé par trois. Ces chiffres sont d’abord liés à l’évolution de la société, qui fonctionne moins en système collectif et plus en réseaux sociaux. Or, ceux-ci n’incitent pas aux engagements collectifs. Il faut également noter l’absence croissante de services réservés aux adhérents, ce qui ne pousse guère les personnes physiques, dirigeants ou salariés, à se syndiquer. C’est pourquoi la France est le pays dont le taux de syndicalisation (8 %) est le plus bas de tous les pays industrialisés.

Quel rôle doit jouer un syndicat ?

Le rôle d’un syndicat est, avant toute chose, de défendre les intérêts d’une branche professionnelle, dans un souci de solidarité corporatiste. Il donne à ses membres le sentiment d’appartenir à une même communauté de travail. Les dirigeants de petites structures ont tendance à se syndiquer pour appliquer les règles sociales (négociées par leur syndicat) sans plancher sur des questions sociales souvent complexes.

Quels sont les services qu’il faut en attendre ?

Un syndicat doit, au minimum, pouvoir fournir à ses adhérents un conseil juridique, ce qui est très appréciable pour une petite structure. Les adhérents doivent aussi pouvoir avoir accès à des informations à caractère professionnel sur les principales négociations en cours, par exemple sur le temps de travail ou les diplômes. Ils doivent également pouvoir échanger des informations avec d’autres personnes faisant le même métier.

Propos recueillis par Stéphanie Bérard

ce que vous en pensez

Quel est le syndicat dont vous rêvez ?

Richard Statius, GONDECOURT (Nord)

Un syndicat se doit d’abord de rassembler toutes les pharmacies, petites ou grandes, rurales ou citadines. C’est la seule façon de mieux défendre la profession. Un syndicat se doit aussi d’aller jusqu’au bout de son action : si les discussions politiques n’apportent rien ou aboutissent à un médiocre compromis, il ne doit pas hésiter à engager des actions « coup de force », comme des grèves de plusieurs jours du tiers payant. Les pharmaciens ont beaucoup à apprendre des médecins qui sont plus soudés et unis derrière leurs syndicats. Notre profession doit arrêter de courber tout le temps l’échine.

Jean-Pierre Messager, LORIENT (Morbihan)

Une représentation plus forte de nos syndicats, nationale mais aussi locale, est une évidence. Dans chaque département, leur présence devrait être renforcée sur le terrain pour faire passer les messages des responsables nationaux et faire remonter les informations de la base. Les syndicats ne peuvent pas se couper d’une partie de la profession. Leur notoriété passe par une meilleure communication auprès des non-syndiqués afin qu’ils les rejoignent : il faut plus d’adhérents militants ! Leur travail serait facilité s’il y avait plus d’élus pharmaciens. Il faut enfin mieux définir les périmètres d’action des syndicats et des groupements. Les seconds marchent trop sur les plates-bandes des premiers. La confusion des genres dessert la profession. Les groupements défendent souvent leurs intérêts avant celui de leurs adhérents.

Michel Pannet, VIVIER-AU-COURT (Ardennes)

Chaque syndicat a la conviction de défendre les intérêts de tous ses adhérents mais ce n’est que pure utopie. Les attentes syndicales diffèrent entre un confrère qui a 25 ans et celui qui en a 60. Le syndicalisme à la carte, ça n’existe pas ! Son action ne peut être faite que de compromis. Ce qui fait aujourd’hui la puissance d’un syndicat, c’est sa capacité de nuisance. Mais je ne rêve plus. Si le besoin s’en faisait sentir, les pharmaciens ne seraient jamais unis dans l’effort pour nuire à leur partenaire principal, l’assurance maladie, en raison de la concurrence entre les officines. Selon moi, un bon syndicat n’est pas offensif à tous crins mais doit être revendicatif et savoir anticiper les évolutions, devancer les événements.

Propos recueillis par François Pouzaud