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PLFSS : Une promenade de santé
Fort d’une écrasante majorité au Parlement, Jean-François Mattei a fait passer sans anicroche la loi de financement de la Sécurité sociale 2004. Comme si chacun regroupait déjà ses forces pour le vrai choc : la réforme de l’assurance maladie et la LFSS 2005.
Jean-François Mattei a pu tranquillement s’assurer du vote, les 26 et 27 novembre, sans gros amendement, de sa loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) pour 2004, « texte de stabilisation des déficits [NdlR à – 10,9 MdEuro(s), pour un objectif de dépenses de 129,7 MdEuro(s)] et de clarification des finances ». Cette loi fait en effet surtout figure de projet d’attente, l’UDF ayant elle-même avoué se réserver pour la prochaine réforme de l’assurance maladie.
Demi-taxe sur le générique.
Côté pharmacie, c’est la réforme de la taxe ACOSS (sur le CA des fournisseurs de l’officine) qui inquiétait le plus. Elle prévoyait une taxe de 5,5 % sur l’augmentation du CA. Les fabricants de génériques, qui connaissent les plus grosses progressions, étaient dans l’oeil du cyclone, et donc, indirectement, les conditions commerciales que les officinaux peuvent en espérer. Générique oblige, les parlementaires ont ramené cette taxe à 2,25 % et les produits dont le prix dépasse 150 Euro(s) PFHT en sont exclus. « Mais l’exonération des spécialités génériques n’était pas justifiée, a estimé Jean-François Mattei. Elle ne semble pas nécessaire à l’attractivité du marché des génériques en France, déjà largement assurée depuis l’accord du 5 juin 2002.» L’autre partie de la taxe, assise sur le CA, a en revanche été passée de 1,7 à 1,9 % en seconde lecture. Mauvaise nouvelle, car on imagine mal les répartiteurs ne pas répercuter ce manque à gagner.
Autre article lié au générique, celui prévoyant que « l’AMM peut être délivrée avant l’expiration des droits de propriété intellectuelle de la spécialité de référence ». L’Afssaps pourra donc inscrire un générique au Répertoire 60 jours après avoir obtenu son AMM. Gain financier estimé à terme : 22 MEuro(s). Et comme de nouvelles molécules grossiront d’un tiers le Répertoire des génériques en 2004…
400 000 « mauvais Français ».
La taxe sur la promotion des laboratoires est-elle réformée en deux parties : d’une part une « contribution exceptionnelle » devant rapporter 100 MEuro(s) en 2004, d’autre part une taxe sur les dépenses de promotion devant rapporter 50 MEuro(s). La promotion sur certains dispositifs médicaux (de traitement ou d’aide à la vie quotidienne et articles pour pansements remboursables) sera aussi taxée à 5 %. Un article qui n’est pas neutre sur le fond, Jean-François Mattei estimant que c’est la promotion qui « fait » la surconsommation de médicaments : « Personne ne peut contester que l’excès de visites [de représentants de laboratoires, NdlR] ait des conséquences inflationnistes. Or nous sommes les recordmen du monde pour la consommation de médicaments par habitant : 400 000 personnes consomment plus d’une boîte par jour ! Bien évidemment, les médicaments sont un bienfait […] mais la surconsommation médicamenteuse a aussi des effets pervers comme les maladies iatrogènes, l’accoutumance ou même la résistance à certains traitements. »
L’amendement qui prévoyait que le pharmacien informe le client porteur de la carte Vitale, du coût de ses médicaments, a été supprimé. L’UNPF et l’USPO en avaient demandé le retrait au Sénat. « L’intention est excellente. […] Mais n’allons-nous pas faire peser une contrainte sur les pharmaciens qui pourra être gênante en cas de forte affluence, pour des effets mineurs ? », a argué Adrien Gouteyron (UMP), vice-président du Sénat. De même, l’idée d’instaurer une photo sur la carte Vitale a été rejetée.
Politique du médicament.
Bien que relevant du domaine réglementaire et non de la loi, les mesures en cours sur le médicament ont encore été rappelées par Jean-François Mattei au cours des débats en deuxième lecture. Deux objectifs pour le ministre : faciliter l’accès aux nouveaux traitements et réduire les dépenses. « Nous continuerons donc en 2004 la politique de déremboursement de certains médicaments pour SMR insuffisant, a-t-il répété. Nous alignerons le remboursement de l’homéopathie sur celui des médicaments à SMR faible ou modéré. Nous poursuivrons notre effort en faveur des génériques. Enfin, nous réexaminerons les conditions de vente des médicaments dont le service médical est moindre aujourd’hui qu’au moment de leur mise sur le marché. Le Comité des produits de santé sera mandaté pour faire des propositions. »
Un autre point réglementaire sera loin d’être neutre pour l’officine : un décret va sortir censé limiter l’impact de l’explosion des ALD. « Nous ne reviendrons pas sur l’exonération totale des actes, mais nous allons clarifier leur champ d’application en les limitant, comme il était prévu dans l’ordonnance de 1967 (!), aux actes les plus coûteux. Les autres seront remboursés selon le droit commun », a annoncé le ministre.
A noter que Jean-François Mattei s’est opposé à un amendement obligeant les médecins à prescrire en DC : « Cet amendement est inutile. L’accord signé le 14 juin 2002 entre l’assurance maladie et les généralistes prévoit déjà cela, afin de faciliter le recours aux génériques. Au demeurant, cela relève du domaine réglementaire. »
Enfin, Jean-François Mattei a précisé que le décret sur la rétrocession hospitalière, qui donnera le coup d’envoi de sorties massives de la réserve hospitalière, serait publié au premier trimestre 2004. Pour la répartition et l’officine, cela signifie que l’on peut désormais s’attendre rapidement à la mise en place d’une troisième tranche de marge à taux faible sur les produits chers car le gouvernement ne souhaitait pas les voir sortir en ville sans garanties financières (voir l’enquête du Moniteur n° 2510).
Le LFSS s’attaque à l’hôpital
A l’hôpital, la vraie réforme commence dès maintenant, la mise en place de la tarification à l’activité (dite T2A) ayant été adoptée. Sous T2A, le budget des hôpitaux sera régulé par les recettes (en fonction des prévisions d’activité et des tarifs liés à cette activité) et non plus par les dépenses (système de dotation), le budget d’un établissement pouvant de plus être recalé par l’agence régionale de l’hospitalisation. La T2A doit être progressivement généralisée dans chaque établissement d’ici fin 2004 pour les cliniques et 2012 pour les hôpitaux. Certains syndicats dénoncent déjà ce système.
Par ailleurs, l’encadrement des prix est adopté, selon le principe du dépôt de prix existant déjà en ville pour les produits innovants (un « prix européen » est soumis à l’approbation des pouvoirs publics par le laboratoire).
Le générique au coeur du LFSS
Trois articles touchaient les génériqueurs. Le GEMME parle de « demi-victoire » à propos de la taxe sur la promotion, dont les génériques non soumis à TFR seront finalement exonérés, mais d’« échec total » à propos du nouveau mode de calcul de la taxe ACOSS : « Un fabricant connaissant une croissance de 4-5 % devrait moins payer qu’avant, ceux qui font dans les + 30-40 % [tendance actuelle du marché des génériques, NdlR] verront leur contribution doubler, déplore Hubert Olivier, vice-président du GEMME. Nous ne comprenons pas cette attaque. » Quant à l’inscription plus rapide des génériques, « on en revient à une situation normale », constate-t-il. « L’inscription au Répertoire était devenu un obstacle majeur à la commercialisation car il suffisait que le fabricant de princeps mette en avant une objection auprès de l’Afssaps pour la bloquer ! »
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