Non, Madame la Ministre, le déficit de la Sécu ne s’évaporera pas en 2017…

La ministre de la Santé triomphait en présentant le PLFSS* 2017 en Conseil des ministres le 5 octobre dernier : le déficit de la Sécurité sociale sera pratiquement nul en 2017, une première depuis plus de 17 ans ! Cela a surpris tout le monde y compris les spécialistes qui, ayant lu le rapport de la commission des comptes de septembre 2016, s’attendaient à un déficit tendanciel de 10,3 milliards d’euros. Comment, en l’espace d’un mois, le « trou » a-t-il été comblé ? Premièrement, en « oubliant » le déficit du Fonds solidarité vieillesse (FSV) prévu à 3,6 milliards d’euros, soit à peu près le même montant que cette année. Ce fonds, chargé de payer les cotisations retraite des chômeurs, fait intégralement partie de la Sécurité sociale. Deuxièmement, en étant légèrement optimiste côté recettes. Le gouvernement espère une croissance de la masse salariale de 2,7 % en 2017, soit un peu plus fort que la tendance actuelle (+ 2,4 %). Compte tenu des sommes en jeu, la différence n’est pas négligeable. Troisièmement, en surestimant le plan d’économies de 4,05 milliards d’euros présenté dans le projet de loi. Comme l’a montré le très sévère avis du comité d’alerte du 12 octobre, ce plan comporte environ un milliard d’économies… qui n’en sont pas ! Soit parce que la dépense est compensée par une diminution équivalente de recettes, soit parce qu’elle est transférée à un autre poste de financement, soit parce qu’elle apparaît explicitement dans les comptes 2017 alors qu’elle était déjà présente (mais sans apparaître) dans ceux de 2016, soit enfin parce qu’on comptabilise comme économie ce qui n’est que la mobilisation d’une recette nouvelle ! Conclusion : même en retenant l’hypothèse de croissance du gouvernement, le déficit de la Sécurité sociale en 2017 sera plus proche de 4,6 milliards d’euros que de 300 millions d’euros ! C’est certes mieux qu’en 2016 (environ – 7,1 milliards d’euros) mais ce n’est pas l’équilibre annoncé… D’où vient l’amélioration ? Marisol Touraine vante les efforts du gouvernement, mais en l’occurrence ce sont plutôt ceux des Français qu’il faudrait évoquer. Les excédents de la branche vieillesse (+ 1,6 milliard d’euros) sont imputables au recul de l’âge de départ à la retraite et, si le déficit de la branche maladie diminue sensiblement (2,6 milliards d’euros en théorie mais plutôt 3,6 milliards), c’est la contrepartie des plans de rabotage budgétaire imposés année après année au secteur de la santé – et tout particulièrement au médicament. Le jour de l’exercice d’autosatisfaction de la ministre, les médecins hospitaliers se mettaient en grève dans tout le pays. Un symbole.

* Projet de financement de la Sécurité sociale