La pharmacie portugaise ou comment s’adapter !

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Publié le 16 mai 2009
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S’adapter. C’est l’enseignement du débat TV sur les conséquences des directives de Bruxelles et de l’avis, toujours attendu, de la Cour de justice des Communautés européennes sur l’ouverture du capital des pharmacies en Sarre et en Italie. Rien ne dit encore à ce jour si elle suivra l’avis d’Yves Bot, l’avocat général qui a plaidé pour le statu quo.

Mais mieux vaut anticiper les changements ou s’y adapter, comme le plaide Ema Paulino, représentante de l’Association nationale des pharmacies portugaises (ANF). Depuis 2005, dans ce pays, les bouleversements ont été profonds : le médicament familial est sorti du monopole, les ventes sur Internet ont été autorisées et une nouvelle réglementation a été mise en place pour permettre à un officinal d’acheter jusqu’à quatre pharmacies. « Nous avons négocié en échange de nouveaux services. Nous avons défendu le modèle de la pharmacie comme celui d’un centre de prévention et de thérapeutique. Les pharmaciens peuvent désormais réaliser des vaccins et des injections, détaille Ema Paulino. Ils proposent des consultations sur l’audition ou l’ophtalmologie qui sont rémunérées par les patients et mettent en place des programmes de soins pharmaceutiques pour les diabétiques. » Au final, malgré l’ouverture de 675 points de vente de médicaments conseil, l’officine portugaise a conservé 92 % du marché de l’OTC.

Tout danger n’est pas écarté au Portugal

En Italie, en 2006, les 17 000 officines ont aussi vu une partie de l’OTC leur échapper. Cesare Quey, vice-président de Federfarma, comptabilise 2 700 points de vente hors officine. Mais cette ouverture, présentée au public comme « un accès plus facile aux produits avec de meilleurs prix », n’a pas convaincu. L’officine a conservé 94 % du marché. « Comme au Portugal, nous discutons de la mise en place de nouveaux services par les officinaux », révèle Cesare Quey.

« Tout danger n’est pourtant pas écarté », rappelle Ema Paulino. Les changements, notamment la possibilité d’acheter quatre pharmacies, n’ont pas arrêté la procédure d’infraction. Le Portugal a reçu un avis motivé de la Commission européenne le 18 septembre dernier concernant l’ouverture du capital. « Seul, le pharmacien ne peut pas se défendre. En France, il existe des groupements. Ce n’est pas le cas au Portugal où nous avons créé une organisation fortement structurée : l’ANF est la seule organisation syndicale du Portugal à laquelle adhère 90 % de la profession, indique Ema Paulino. Elle joue également le rôle de grossiste, de laboratoire et de fournisseur de logiciels. »

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Les directives européennes

Le 10 décembre dernier, la Commission européenne a proposé plusieurs directives européennes (le « paquet médicament ») qui vont toucher le secteur de la santé en France et, plus ou moins directement, l’officine. La directive sur la contrefaçon va ainsi obliger les acteurs du médicament à une traçabilité et une authentification des produits et au renforcement du contrôle de la chaîne de distribution. La directive sur l’information offre la possibilité à l’industrie de communiquer directement auprès des patients, même si cette communication sera encadrée. Les laboratoires pourront faire de l’information sur Internet mais ni à la radio, ni à la télévision. Enfin, la directive sur la pharmacovigilance vise à assurer plus de transparence sur les produits. Reste que les élections européennes risquent de retarder ces dossiers. Le Parlement européen a ailleurs adopté le 23 avril dernier, en première lecture, la directive relative aux soins transfrontaliers, alias « directive santé ». Le texte évoque essentiellement la facilitation de recours aux soins à l’étranger dans les conditions de remboursement du pays d’origine. Il doit maintenant passer devant le Conseil, après les élections et la mise en place de la nouvelle Commission à l’automne.