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LA CONVENTION DÉCRYPTÉE
La FSPF et l’USPO ont entamé un tour de France pour expliquer les tenants et les aboutissants de la nouvelle convention pharmaceutique. Les questions pratiques sont nombreuses et les réponses pas toujours simples. « Le Moniteur » a assisté à une réunion de chaque syndicat et fait le point sur les questions que vous vous posez.
Jeudi 3 mai, Gilles Bonnefond, président de l’USPO, et Brigitte Bouzige, vice-présidente, présentaient la convention pharmaceutique à Pontault-Combault, en Seine-et-Marne. Environ 120 pharmaciens du département étaient présents à cette réunion retransmise en direct sur Internet. Une semaine plus tard, le 10 mai, c’est Philippe Gaertner, président de la FSPF, accompagné notamment de Philippe Besset, président de la commission Economie, qui accueillait pharmaciens et étudiants dans un amphithéâtre de la faculté de pharmacie de Paris-V.
Dans les deux cas, le programme était identique : faire découvrir le nouveau texte conventionnel à la profession et répondre aux questions de l’assistance.
Pourquoi une nouvelle convention ?
L’élaboration et la signature de la nouvelle convention sont l’aboutissement de plusieurs années de travail et d’un constat commun aux syndicats : la rémunération des pharmaciens devait être déconnectée du prix et du volume des médicaments. En outre, le texte conventionnel devait prendre en compte les nouvelles missions attribuées aux pharmaciens par la loi HPST et proposées par le rapport de l’IGAS.
La nouvelle convention marque des changements importants pour la profession : une rémunération mixte pour la dispensation des médicaments ; un paiement « à la performance » comme pour les médecins ; des nouvelles missions, notamment d’accompagnement de patients chroniques.
Oui, mais quand ?
Les pharmaciens libéraux des sections A et E de l’Ordre doivent adhérer individuellement à la convention. L’Assurance maladie a deux mois pour présenter la convention aux pharmaciens titulaires, qui disposent d’un délai de réflexion d’un mois avant de signer la convention.
La rémunération des gardes et astreintes est-elle revalorisée ?
L’indemnité d’astreinte est fixée à 150 € la nuit, la journée du dimanche et les jours fériés. Les horaires ont été modifiés. Ainsi, le pharmacien recevra de l’Assurance maladie 2 € par ordonnance le jour en dehors des jours et heures normaux d’ouverture, soit de 8 h à 20 h, 8 € par ordonnance la nuit de 20 h à 8 h et 6 € les dimanches et jours fériés de 8 h à 20 h.
Les syndicats estiment que ces nouveaux honoraires et indemnités vont générer 40 millions d’euros pour la profession.
Oui, mais quand ?
L’application de ces dispositions n’est pas encore fixée. Le 6 juin, une réunion de la commission paritaire nationale (CPN) va trancher : soit l’application est immédiate, soit elle sera effective dans six mois à compter de la date de parution de la convention au Journal officiel.
En quoi consiste l’« honoraire » de dispensation ?
La part de cet « honoraire » de dispensation devra atteindre 25 % au terme de la convention, c’est-à-dire dans cinq ans. La première étape est la mise en œuvre en 2013 d’une première « marche » à hauteur de 12,5 %.
L’« honoraire » de dispensation devrait s’appuyer sur différents éléments, la base étant, selon Philippe Gaertner, l’ordonnance. Il représente la matérialisation de l’acte de dispensation et sera déclenché automatiquement dans les logiciels. Il pourrait s’élever entre 0,50 € et 1 € et être majoré en fonction des ordonnances : nombre de lignes, nourrissons, personnes âgées, patients sous traitement de substitution aux opiacés. Selon la FSPF, une majoration de 5 euros en moyenne pour certaines ordonnances pourrait se concevoir notamment en cas d’intervention pharmaceutique avec accord du patient et du prescripteur (modification de posologie, de médicaments).
Oui, mais quand ?
Ces différents éléments sont à négocier entre les syndicats et l’Assurance maladie. L’« honoraire » de dispensation doit faire l’objet d’un avenant qui doit être signé avant la fin de l’année et « concomitamment au PLFSS 2013 », explique Philippe Gaertner.
L’« honoraire » devrait ensuite se mettre en place au second semestre 2013. Ce délai correspond aux modalités pratiques à mettre en place dans les logiciels métiers et au niveau de l’Assurance maladie, qui devront prendre en compte la facturation de ces honoraires. Ces derniers seront réglés par le patient en tiers payant. Le reste à charge sera remboursé par les complémentaires santé. Le taux de remboursement doit être fixé. Il pourrait s’élever selon Philippe Besset entre 60 et 70 %.
Quid du « paiement à la performance » ?
La convention introduit une rémunération sur objectifs, ce qui équivaut à un paiement « à la performance ». Le principe est simple : si le pharmacien atteint les objectifs conventionnels, il percevra une rémunération. La convention détermine 5 indicateurs.
Le volume de facturation en feuilles de soins électroniques (FSE) et leur télétransmission sécurisée ou dégradée doivent atteindre 95 %. Pour Gilles Bonnefond, cet objectif est facilement atteignable : « L’ensemble des pharmacies y sont, je crois qu’il y en a 200 qui n’y sont pas. » Le pharmacien percevra 0,05 € par FSE et 0,064 € s’il utilise la version 1.40. Le montant est versé annuellement.
L’intégration des pharmacies dans le dispositif de scannérisation et transmission par CD-ROM ou télétransmission fait également partie des objectifs. Le président de l’USPO invitée ses confrères « à pousser ce dossier, cela fait énormément gagner de temps ». L’officinal reçoit 418,60 € par an lorsqu’il entre dans le dispositif.
Les génériques et la stabilité de dispensation des génériques aux personnes âgées de plus de 75 ans (une seule marque de génériques par an pour 11 molécules en DCI pour 90 % des patients) ainsi que le nombre de patients sous antivitamine K (AVK) suivis par les pharmaciens sont les trois autres objectifs.
Comment se passera le suivi des patients sous AVK ?
« Les nouvelles missions vont demander des prérequis, précise Brigitte Bouzige, c’est-à-dire une formation ou une mise à niveau, un espace de confidentialité et un protocole pour homogénéiser toutes nos pratiques. » Le suivi des patients sous AVK n’échappe pas à cette règle. Avec l’accord du patient, il comportera deux entretiens pharmaceutiques de 20 à 30 minutes et, si besoin est, un entretien d’initiation au traitement. Le pharmacien devra s’assurer notamment du suivi biologique. « Plus de 20 % des médecins ne suivent pas l’INR de leurs patients », remarque la vice-présidente de l’USPO.
Le pharmacien sera rémunéré 40 euros par an et par patient, au mois de mars de chaque année. Des critères permettront d’évaluer le suivi réalisé par chaque pharmacien. La FSPF estime que cela représente 35 à 40 millions d’euros pour la profession, l’USPO évoque 40 millions d’euros.
Oui, mais quand ?
Cet accompagnement devrait être mis en œuvre dès janvier 2013. Un avenant doit être signé avant cette date. Il spécifiera les modalités pratiques dont le protocole élaboré avec les médecins et l’Assurance maladie.
Quels vont être les objectifs individuels de substitution ?
Les objectifs individuels – l’objectif collectif de substitution est porté à 85 % – sont fixés pour 26 molécules du Répertoire et 5 nouvelles molécules. Un objectif porte également sur le « reste du répertoire ». Lévothyrox et Subutex sont exclus du champ des objectifs.
Les objectifs sont déterminés pharmacie par pharmacie et molécule par molécule. Les primes, dont le montant varie en fonction des atteintes des objectifs, seront versées chaque année au mois de mars pour l’année révolue. Les pharmaciens percevront en mars 2013 les primes correspondant à l’année 2012.
« L’enjeu, c’est cet été, il faut aller très vite. Il ne faut pas attendre le mois de septembre pour commencer à démarrer », insiste Gilles Bonnefond.
Par ailleurs, le pharmacien devra appliquer strictement l’accord « tiers payant contre génériques ». Philippe Gaertner et Philippe Besset ont d’ailleurs rappelé que le pharmacien qui ne respectait pas ce principe encourt des indus.
Comment est calculée la prime pour les génériques et que peut gagner un pharmacien ?
Pour chaque molécule et pour le reste du Répertoire, la rémunération sera fonction de deux critères : la progression (50 % de la prime) et le niveau de substitution. La convention précise : « La rémunération individuelle du pharmacien d’officine pour chacun des indicateurs est proportionnelle au nombre de boîtes – corrigé des grands conditionnements (un conditionnement trimestriel compte pour 3 boîtes) – délivrées sur la période de référence d’arrivée. Elle est nulle dans le cas où aucune boîte n’a été délivrée par la pharmacie pour cette molécule ». Il faut savoir que « pour chaque indicateur, le taux de réalisation est calculé en fonction du taux de substitution de départ individuel du pharmacien, de son niveau d’arrivée ainsi que des seuils bas et seuils intermédiaires par molécule » (voir tableaux parus dans Le Moniteur n° 2928).
En dessous du seuil minimal bas de substitution, le pharmacien ne perçoit rien. Quand le seuil intermédiaire est déjà celui atteint dès le départ, ou atteint par la suite ou dépassé, il perçoit la moitié de sa rémunération même s’il n’a réalisé aucune progression sur cette molécule. Au-delà, c’est le taux d’arrivée qui est pris en compte et qui déterminera le déclenchement d’une nouvelle prime, au maximum de 50 % de la rémunération restante. La prime par officine pourrait s’élever pour la plupart des pharmacies à 3 000 à 4 000 euros. L’Assurance maladie va communiquer aux titulaires les outils qui leur permettront d’évaluer le montant de la prime qu’ils vont toucher. Dès le mois de septembre, l’Assurance maladie doit communiquer aux pharmaciens un point d’étape sur l’année 2012. Le calcul sera terminé à décembre 2012.
La nouvelle marge sur les grands conditionnements
L’arrêté de marge sur les grands conditionnements a paru au Journal officiel du 10 mai. A partir du 1er juillet 2012, « la marge du pharmacien d’officine est obtenue en multipliant par trois la marge du pharmacien sur les spécialités pharmaceutiques correspondant à un mois de traitement […] à laquelle est appliquée une décote de 10 % ». En contrepartie, la délivrance des conditionnements trimestriels doit « atteindre un taux de pénétration de 55 % » précise la convention. Il est actuellement de 35 %. Et pour Philippe Gaertner, président de la FSPF, ce taux de 55 % n’est pas atteignable car il ne correspond pas à la réalité de la prescription. 50 % lui paraît un objectif plus acceptable. Cette mesure, négociée en même temps que la convention, doit permettre de « retrouver 100 millions d’euros » et elle va « simplement équilibrer les efforts demandés à tous les acteurs de la chaîne », explique Gilles Bonnefond (USPO). Philippe Gaertner nuance ce montant : il estime qu’il s’établira à 75 millions d’euros, puisque le nombre de grands conditionnements délivrés augmentera et diminuera de fait la marge des pharmaciens. La FSPF insiste sur le risque de s’exposer à des indus pour les pharmaciens « qui ne joueraient pas le jeu des grands conditionnements ».
4 avril 2012
Signature de la convention par la FSPF, l’USPO, l’UNPF et l’Assurance maladie.
6 mai 2012
Parution au Journal officiel de l’arrêté d’approbation de la convention et de l’avenant n° 6 sur les génériques.
7 mai 2012
Entrée en vigueur de la convention. Jusque ce que les pharmaciens titulaires adhèrent à la nouvelle convention, l’ancienne s’applique.
1er juillet 2012
Application de la nouvelle marge sur les grands conditionnements.
Le maillage officinal dans la convention
L’optimisation du réseau officinal fait également partie de la convention. Une cartographie des officines sera réalisée. Philippe Gaertner, président de la FSPF, et Gilles Bonnefond, président de l’USPO, ont rappelé que les pharmaciens disposaient maintenant de différents outils leur permettant de restructurer le réseau. L’article 74 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 a modifié le Code de la santé publique. Il porte à 4 500 le nombre d’habitants pour l’ouverture d’une nouvelle officine, contre 3 500 auparavant. La durée du gel des licences après un regroupement est désormais de 12 ans. Enfin, les pharmaciens peuvent racheter une licence afin de la détruire, après avis du directeur général de l’agence régionale de santé.
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