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Courir de plaisir
Mari, enfants, métier, Lili Charalambakis jouit des plaisirs de sa vie. Pourtant, mordue de course à pied, cette préparatrice de 45 ans à Cabannes (Bouches-du-Rhône) souffre le « dix kil », le « semi » et bientôt le marathon. Paradoxal, non ?
La sueur perle sur son visage. Lili marche seule pour reprendre ses esprits. Pour que son cœur retrouve peu à peu son rythme normal. « J’adore cet instant de solitude. Durant dix minutes, je ne sens plus mes jambes, ni mes bras. Je suis sur un petit nuage. C’est orgasmique » avoue Lili dans un éclat de rire. Elle a fini les 21,100 km du semi marathon de Cavaillon (Vaucluse). Ses yeux noirs s’animent en évoquant la course qui a endolori ses membres. Plus tard, elle repassera dans la tête le film de l’épreuve. « Chaque fois, je me dis que j’aurais pu accélérer à tel moment, c’était en descente… J’ai toujours l’espoir d’aller plus vite. » Elle a fait son « semi » en 2 heures 04minutes. « Je n’ai jamais eu de coupe, je m’en fiche. J’aime me dépasser et sentir le cœur qui palpite la veille de l’épreuve. » Préparatrice depuis vingt ans à la pharmacie Colombani de Cabannes (Bouches-du-Rhône), Lili court contre le temps, contre la douleur, mais pas après les honneurs.
L’audace porte ses fruits. « Petite, j’étais toujours contente. » Câline et joyeuse, la petite fille est proche de son père, entrepreneur de maçonnerie. Il l’appelle Lili au grand plaisir de la gamine qui n’aime pas Marilyn, son prénom. « Maman adorait Marilyn Monroe, mais le côté sex-symbol était difficile à porter pour moi… » À 18 ans, ses parents se séparent, elle part vivre avec son père. Lili, généreuse, se rêve assistante sociale. « Je voulais aider les gens. » Quand elle rate le bac, départ pour la Grèce avec quatre copines, grâce au salaire gagné en ramassant des fruits. Dans un bar de Gythion, « un port au fin fond du Péloponnèse », elle rencontre Georges. « Nous buvions des Nescafé frappés en reluquant les garçon » se souvient-elle. Georges n’a d’yeux que pour elle. Le regard tendre et serein de ce greco-français de 1 m 90 fait fondre la lycéenne. Toute la nuit, près du phare, Georges égrène sa vie de marin et de pâtissier et les fabuleuses histoires de la mythologie grecque. Mais Lili doit rentrer. Alors « la témérité d’une époque plus propice à l’insouciance » pousse Lili qui propose à Georges de venir la rejoindre. Sans métier ni l’un ni l’autre, Georges tente plusieurs boulots avant d’entrer dans une entreprise de fruits et légumes. Lili découvre par hasard l’apprentissage grâce à sa coiffeuse. Elle se renseigne sur cette voie rémunérée durant les études. Bingo, ce sera la pharmacie. Elle aime les études et le métier, et réussit son BP en 1992.
Se bouger hors les murs. « La pharmacie m’a plu d’emblée. Et me plaît davantage chaque jour. », affirme Lili. « Travailler pour Gisèle Colombani est un « plus ». Elle nous nourrit de ses mots, de sa vie, de son expérience » s’enthousiasme-t-elle en évoquant la titulaire. « Nous apprenons sans cesse, dans une atmosphère où règnent la bonne ambiance et la confiance. » Après la naissance de ses enfants Clara et Costa, la préparatrice se remet au footing. « Avant d’avoir mes enfants, je courais avec ma sœur Katia. » Une façon de s’aérer après la pharmacie et de combattre sa gourmandise notoire. Elle raffermit son corps par trois à quatre joggings de 45 minutes par semaine. Au fil des parcours, elle rencontre d’autres coureurs, échange des conseils sur les chaussures, les blessures, mais ne progresse pas vraiment : « Je courais à l’aveuglette. » En septembre 2006, elle veut améliorer ses courses. « J’ai tapé “plan d’entraînement” sur Google et je suis tombée sur le forum de plandentrainement.fr. »
Ténacité est mère de progression. Sa demande est claire : « je voudrais faire un 10 kilomètres et un plan d’entraînement adéquat ». « Coach », un des modérateurs du site lui demande un certificat médical et sa VMA pour calculer son entraînement. « Ma VMA ? » En course à pied, la vitesse maximale aérobie est la vitesse de course à laquelle le coureur atteint sa consommation maximale d’oxygène « avant les crampes dues à l’acide lactique ». Il faut réaliser sur piste le test « demi Cooper », la plus grande distance en 6 minutes. Une fois sa VMA calculée, Lili reçoit son plan d’entraînement personnalisé pour le dix kilomètres ou « dix kil » pour les initiés, « moins effrayant qu’un semi pour débuter ». Sur sept semaines, les exercices hebdomadaires se répartissent entre phases de courses et périodes de récupération, échauffements de 25 minutes et sauts bondissants. « Dans la semaine, je peux avoir dix fois 200mètres à faire, puis le lendemain, 1 h de footing à 9 km/h, suivis de deux fois 2000 mètres en 10 minutes par exemple. Tout est calculé selon ma VMA de 13,7 km/h. » Lili s’entraîne trois fois par semaine. Nimbus Asics aux pieds, soutien-gorge et brassière, collant molletonné, veste polaire et coupe-vent, Lili court avec Mickael Jackson, Madonna ou Aaron dans son iPod. Elle se concentre sur les sonneries de son GPS Carmin sorte de montre, qui gère son plan d’entraînement. « Le GPS, via trois satellites, m’informe sur les distances parcourues, m’indique quand m’arrêter pour récupérer. »
Gérer son énergie. « Le plan d’entraînement est une progression. Il permet d’habituer ton corps à fournir de l’énergie progressivement de façon à exploser le jour de la course » précise Lili. Elle évite de courir à jeun ou lors de la digestion. « Je déjeune vers 7 h 30 et vais courir vers 11 h 00. Habillage, entraînement, récupération et douche occupent environ 2 h 30. » Elle apprécie les revues Running ou Runners, mais rien ne vaut les échanges sur le forum. « C’est Jacquot le spécialiste des plans d’entraînement pour le marathon. » Jacquot, mais aussi Chouchou et Coach, sportifs ou anciens sportifs du forum qui sont devenus des copains. Après avoir fait trois « semi » en 2008-2009, Nice, Aix-en-Provence et Cavaillon, et un dix kil tous les mois et demi, la coureuse s’est inscrite au marathon de Marseille le 18 avril prochain. Elle a reçu son plan d’entraînement sur huit semaines début février pour les 42,195km. « J’ai peur du mur des 30-35 kilomètres. Certains s’arrêtent là et abandonnent même la course à pied. À ce stade, une blessure, une crampe peuvent survenir. Ce n’est plus ton corps qui te fait avancer, c’est la tête. Il faut courir malgré l’épuisement », analyse Lili. Elle ne sait pas si elle y arrivera. Elle ne pensait pas faire un dix kil en 52’20” au lieu des 70’ du début. « Peut-être que j’arriverais à faire le marathon, la distance mythique. » Son mari l’appelle « ma championne », mais dit qu’il faut être fou pour courir. Elle répond : « Plaisir dans la douleur, bon air, rencontres. Il n’y a rien d’austère dans la course à pied. À part les blessures peut-être… »
Portrait chinois
• Si vous étiez un végétal, lequel seriez-vous ? Le platane qui est dans ma cour. Il est là, robuste, avec ses racines et fait de l’ombre l’été. Je suis ancrée dans ma famille, dans mes origines. Je protège les autres.
• Si vous étiez une forme galénique ? Une huile de massage pour la douceur et le plaisir. La sensualité… Certaines à l’arnicacalment les courbatures.
• Si vous étiez un médicament ? Un antalgique. Je déteste me confronter à la douleur. Je préfère donner et recevoir du plaisir.
• Si vous étiez un matériel ou dispositif médical ? Un stérilet. Choisir le moment de la maternité est génial. Je suis féministe.
• Si vous étiez un vaccin ? Contre les effets du vieillissement. Je n’ai pas peur de vieillir, mais je redoute la perte des capacités. J’ai horreur d’entendre : « tu verras, quand tu seras vieille, tu ne pourras plus … »
• Si vous étiez une partie du corps ? Des jambes parce que si je ne peux plus courir, je n’existe plus. Et j’adore les jambes des femmes !
Marilyn dite Lili Charalambakis
Âge : 45 ans.
Formation : préparatrice en pharmacie.
Lieu d’exercice : pharmacie Colombani à Cabannes (13).
Ce qui la motive : tous les plaisirs et le dépassement de soi.
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