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Services compris
Qui a dit que le pharmacien ne faisait pas dans le social ? Véronique Michot, également présidente régionale de l’Ordre, s’y est lancée – à corps perdu – en créant un réseau d’aide à la personne. Un vrai défi lorsque l’on doit être au comptoir et assumer des activités associatives. La pharmacienne y est parvenue, à force d’énergie, en s’appuyant sur toutes les bonnes volontés.
Lusigny est une petite bourgade de l’Allier, à une dizaine de kilomètres de Moulins. Véronique Michot y tient l’officine, face à l’église, depuis 18 ans. Très impliquée dans le monde associatif local, elle est en effet trésorière d’une association de Lusigny et membre d’une organisation non gouvernementale à vocation humanitaire dont une antenne s’est installée à Moulins. Véronique Michot est également présidente du conseil régional de l’Ordre depuis deux ans. Se sentait-elle à ce point désoeuvrée pour s’engager dans une autre aventure, celle de la création d’un réseau local d’aide à la personne ? Certainement pas, mais quand le hasard titille la nécessité…
La pharmacie de Lusigny est en effet un lieu central d’échange dans le village. Petits problèmes et gros tracas nourrissent les conversations quotidiennes. Une cliente est atteinte de la maladie d’Alzheimer, et ce sont des contraintes lourdes pour les proches. Une autre souffre d’un cancer, et c’est la garde de ses petites-filles qui devient problématique. Des personnes âgées auraient besoin d’une petite aide pour leurs travaux ménagers qu’elles ne trouvent pas… Véronique Michot est toujours à l’écoute. Elle-même est confrontée à ce manque d’offre de services qui bloque chez elles, en même temps, ses deux préparatrices dont les enfants sont victimes d’une épidémie de gastroentérite. « Ces accidents de la vie quotidienne, devant lesquels nous restions sans secours, nous ont rapprochées, Marie-Hélène Boudonnat, Véronique Grandpierre et moi-même. L’idée d’y faire face a fini par germer dans nos esprits. C’était il y a trois ans. » La première travaille dans un service social du conseil général de l’Allier, la seconde à la caisse d’allocations familiales, toutes deux à Moulins.
Trois lycéennes sauvent le projet d’aide à la personne
Pour mener à bien leur projet d’association Mieux vivre à Lusigny (réseau d’aide à la personne), les trois fondatrices n’ont alors que leur motivation, le reste relevant de l’aventure en terrain inconnu. Les besoins identifiés, elles le constatent rapidement, ne sont pas pris en compte par les services existants locaux, auprès desquels elles sont invitées à se rapprocher. « Le centre social le plus proche, à Chevagnes (5 kilomètres), s’adresse à des gens malades, pour lesquels on assure des soins quotidiens, avec une prise en charge spécifique à ce type de public. Nous devions orienter différemment nos recherches », poursuit Véronique Michot. Autre contact, autre déception : pour avoir un agrément, il leur est d’abord demandé de faire une enquête de besoins, qui se veuille plus convaincante que le bouche-à-oreille ! Cette fois, le moral est affecté lorsque, miracle, trois lycéennes d’un établissement privé de Moulins se proposent de les aider dans le cadre d’un stage de dernière année d’un BTS gestion des PME/PMI. La fille de Marie-Hélène Boudonnat avait passé le message dans son lycée…
Résultat, après quatre mois d’un fastidieux travail d’enquête et d’analyse : 23 réponses positives, sur un bassin de population de deux mille habitants, avec des besoins exprimés dans les domaines du jardinage, des travaux ménagers et de la garde d’enfants au-dessus de trois ans. « En dessous, il y a des crèches ou des nourrices, et nous nous sommes engagées à ne pas empiéter sur ce qui existe », tient à préciser Véronique Michot. Une deuxième équipe du même lycée, dont le petit-fils du voisin de la pharmacienne, se chargera de la phase gestion, avec prévisions de bilan. « C’est comme une mosaïque qui prend forme, mais avec des éléments qui surviennent opportunément », s’étonne-t-elle encore. Ainsi, le dossier est complet en décembre 2007. Petit contretemps, cependant, avec les congés de fin d’année et les imprimés qui ont changé en janvier ! Il faut refaire le dossier… « Je m’y suis mise aussitôt, de crainte de ne plus en avoir le coeur après », se souvient la titulaire, qui obtiendra finalement l’agrément pour l’association en août 2008, la veille de ses vacances. Entre-temps, l’association avait été créée, avec l’aide de son père qui s’est lui aussi beaucoup impliqué dans des associations à vocation sociale (« Il m’a donné la fibre »).
Rendre service en créant des emplois
Se pose alors la question du local, afin que ne soient pas mélangés les genres à la pharmacie. Là encore, la chance sourit à qui sait la forcer : la Mairie met à disposition de l’association plusieurs pièces d’une maison destinée aux habitants de la commune ! La mosaïque… Le recrutement, quant à lui, est plus difficile. « Ce n’est pas notre métier, reconnaît Marie-Hélène Boudonnat, et nous connaissons la plupart des gens. Il est difficile de leur annoncer que ce n’est qu’un travail d’appoint, aux horaires aléatoires. Surtout au début ! » Pourtant, un monsieur est embauché pour du jardinage puis une dame, pour le ménage.
Une demi-journée portes ouvertes permettra, avant l’été, d’annoncer la mise en place d’une permanence, quelques heures par jour, et de faire un peu de communication, notamment à propos des tarifs bas : « Le panier est très faible chez nous, explique Véronique Michot. Notre bassin, avec plusieurs usines de production d’automobiles, est frappé de plein fouet par la crise. Nos tarifs sont inférieurs à ceux mêmes préconisés par la Direction du travail. »
« Notre seul moteur, c’est l’envie d’être utiles aux autres »
Les demandes de subventions, pour le démarrage, restent pour l’heure sans réponse, mais les projets ne manquent pas. Avec vingt-huit naissances en 2008 à Lusigny, l’idée de la création d’une crèche parentale fait son chemin. « Celle de Moulins, la préfecture, ne peut accueillir tous les enfants et il manque de nounous. Il y a un besoin réel, souligne la titulaire. Ce sera la deuxième phase de notre projet, qui apportera son lot de nouvelles contraintes : aménagement des locaux aux normes d’hygiène et de sécurité, embauche de personnel qualifié, etc. » Le maire de Lusigny leur a même suggéré de faire un agrément qualifié qui leur permettrait de toucher les gens malades bénéficiant de l’aide personnalisée d’autonomie et de s’occuper des enfants pendant les vacances scolaires : « Nous n’avons pas dit non, confesse Véronique Michot. Les besoins, là aussi, sont loin d’être entièrement couverts. Mais nous devons d’abord mettre sur les rails la crèche parentale. Notre seul moteur, c’est l’envie d’être utile aux autres. Pour l’obtention de subventions, on nous demande de présenter des projets innovants… Nous, on ne révolutionne pas le système. On répond simplement à une demande. Et rendre service aux gens tout en en faisant travailler d’autres est notre plus belle récompense. »
Envie d’essayer ?
les Avantages
– Rendre service aux autres, aider des gens qui font partie de sa communauté de vie.
– Travailler ensemble pour atteindre un objectif ambitieux, en partageant les moments forts et les contraintes : « Cela renforce les liens d’amitié entre les partenaires de l’association. Il y en a toujours une qui a le moral pour les autres. »
– Trouver là un motif d’épanouissement personnel : « La complexité de l’environnement du travail est un défi permanent quand on la découvre, mais quel plaisir personnel lorsque l’on parvient à la surmonter pour faire avancer son projet ! »
les inconvénients
– Affronter les lourdeurs administratives.
– Se remettre en cause face à des situations inédites dans son propre métier.
– Se rendre disponible.
Les Conseils de Véronique Michot
– « Ne pas se décourager. Même les incompréhensions de l’administration peuvent se révéler bénéfiques car elles obligent à clarifier nos objectifs. Il en résulte également une meilleure maîtrise des rouages d’un univers qui, somme toute, est indispensable au bon fonctionnement des associations. »
– « Ne pas laisser passer les opportunités. Il faut toujours y croire. Lorsque l’on crée quelque chose, on se rend compte qu’il y a souvent des possibilités d’avancer grâce aux rencontres que l’on provoque. Patience et motivation sont les clés de la réussite. »
– « Ne pas tout attendre des demandes de subventions. Il ne faut jamais renoncer, quitte à frapper à des portes auxquelles on n’aurait jamais songé auparavant, mais mieux vaut ne pas faire reposer son projet uniquement sur elles. »
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