ARS Quel impact sur les officines ?

Réservé aux abonnés
Publié le 27 mars 2010
Mettre en favori

Le 1er avril, les Agences régionales de santé (ARS) seront opérationnelles. Les directeurs des ARS deviendront alors les uniques interlocuteurs des officines. Les syndicats oscillent entre espoir et inquiétude.

Les ARS deviennent, au niveau des régions, l’interlocuteur incontournable des professionnels de santé libéraux et en particulier des pharmaciens. D’ailleurs, certaines ARS, comme celle de l’Alsace, ont prévu dans leur organigramme un interlocuteur spécifique pour les pharmaciens », déclare d’emblée Philippe Gaertner, président de la FSPF. Cela est d’autant plus vrai que les ARS délivreront les licences d’officine. « On peut penser que l’organisation des soins sera bien faite en fonction des besoins de santé du territoire et sera mieux coordonnée, par exemple entre les maisons de santé et les officines », estime Philippe Gaertner. Ce dernier pense que les règles d’installation ne seront pas changées. Jean-Marie Bertrand, secrétaire général des ministères chargés des affaires sociales, le confirme : « Il n’est pas prévu à ce jour de modifier les règles d’installation. »

Pour Gilles Bonnefond, président délégué de l’USPO, l’homogénéité de l’offre de soins sur le territoire régional est l’une des questions essentielles que doivent se poser les ARS : « Cela implique que les ARS devront renforcer la coopération interprofessionnelle, en précisant les activités du médecin et les autres activités médicales, et faire vivre la fonction du pharmacien correspondant. Elles doivent vraiment travailler avec les libéraux et ne pas avoir une réflexion centrée sur l’hôpital. »

Un nécessaire dialogue avec les libéraux

Autre champ de compétences des ARS : les expérimentations, par exemple en matière de prise en charge des patients. « Dans ce cadre, il faudra définir des méthodologies de travail et des modes de rémunération. Les unions régionales de professionnels de santé – URPS – devront avoir du poids face aux ARS pour qu’il y ait un véritable dialogue », remarque Philippe Gaertner. Or, les URPS constituent un sujet d’inquiétude pour tous les professionnels de santé libéraux. Créées par la loi HPST, les URPS sont de nouvelles instances chargées de représenter les professions de santé auprès des ARS. Chaque profession aura sa propre URPS au sein de chaque région. Les médecins, pharmaciens, infirmiers et masseurs-kinésithérapeutes éliront, vraisemblablement à l’automne, leurs représentants parmi les candidats présentés par les syndicats professionnels. Seul problème : aucune fédération regroupant l’ensemble des URPS n’est prévue. « Une catastrophe » pour Alain Bergeau, président de l’Union nationale des professionnels de santé (UNPS). « Jusqu’à présent, les projets de décrets présentés ne définissent pas clairement les missions des URPS ni leurs moyens. Et il faut absolument une fédération pour que les professionnels de santé puissent avoir un lieu de concertation », insiste-t-il. Les syndicats des pharmaciens partagent son avis. « On peut craindre le pire comme espérer le meilleur. Nous avons désormais un interlocuteur clairement identifié, mais les ARS représentent une étatisation de la santé. Les directeurs ont les pleins pouvoirs. Ils auront le dernier mot, s’il n’y a pas d’accord avec les professionnels », souligne Claude Japhet, président de l’UNPF. Les premiers mois de fonctionnement des ARS seront donc décisifs.

Jean-Marie Bertrand*, « La maîtrise de la consommation des médicaments est un enjeu fort. »

Quels rôles les ARS donneront aux pharmaciens dans l’offre de soins ?

Jean-Marie Bertrand : Il est indispensable de maintenir une offre équilibrée dans les secteurs les plus menacés, en particulier dans les zones rurales ou dans les quartiers urbains dits « sensibles », où les installations sont rares. Dans ces lieux, les nouvelles formes de pratiques sont importantes à développer dans le cadre des « soins de premier recours », reposant sur la médecine générale, les pharmaciens d’officine, les maisons de santé, les centres de santé… Les pharmaciens doivent y trouver leur place spécifique. Pour ce qui est des personnes âgées, c’est un enjeu fort de partenariats entre professionnels de santé, mais aussi avec les travailleurs sociaux, pour assurer à la fois une bonne qualité de vie et des soins de qualité.

L’ARS devra également mettre en oeuvre des actions visant à optimiser les dépenses de santé et à faire en sorte que se développe une véritable « gestion des risques », au sens assuranciel. Dans ce contexte, la maîtrise de la consommation des médicaments est un enjeu fort, tant sur le plan financier que sur la qualité des pratiques.

Comment s’organiseront les relations des ARS avec les URPS ?

J-M. B. : Les ARS devront s’appuyer sur les bonnes pratiques édictées en premier lieu par les professionnels eux-mêmes et faire en sorte qu’elles soient mises en oeuvre au sein d’une organisation qui les déploie correctement.

Les ARS auront besoin de disposer de lieux de dialogue et de concertation. La loi en a prévu plusieurs : les conférences régionales de la santé et de l’autonomie et les conférences de territoires permettront que s’instaure un débat avec tous les acteurs de la santé. Les URPS seront des lieux d’échanges spécifiques avec les professionnels de santé exerçant en ambulatoire.

Propos recueillis par Magali Clausener

*Secrétaire général des ministères chargés des affaires sociales.