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Agences régionales de santé
Les agences régionales de santé (ARS) sont sur les rails depuis le 1er avril 2010. Sur le terrain, les pharmaciens ne perçoivent pas encore forcément les changements. Pour autant, au sein des ARS, une nouvelle vision de la santé et de nouvelles façons de travailler se mettent en place.
Ouvertes le 1er avril 2010, les 26 agences régionales de santé (ARS) n’ont pas encore six mois d’existence. Un premier bilan s’impose néanmoins. Qu’est-ce qui a changé pour les pharmaciens ? Quelles évolutions faut-il attendre ? Quel rôle vont pouvoir jouer les officinaux ? Il faut déjà rappeler les deux grandes missions des agences : le pilotage de la santé publique et la régulation de l’offre de santé dans les secteurs ambulatoire, hospitalier et médico-social. En outre, les ARS ont quatre objectifs stratégiques. Il s’agit de réduire les inégalités territoriales, d’assurer un meilleur accès aux soins, d’organiser les parcours de soins en fonction des patients, d’assurer une meilleure efficacité des dépenses de santé. Le tout au niveau régional. « Cette déconcentration régionale permet de mieux prendre en compte les spécificités locales », explique Daniel Lenoir, directeur général de l’ARS Nord-Pas-de-Calais. En clair, il ne s’agit plus d’appliquer une politique nationale sur le territoire, mais de décliner cette politique en fonction des besoins de santé de la région. La transversalité est l’autre mot-clé des ARS. Exit le cloisonnement entre l’hôpital, la ville et le médico-social. L’ARS doit avoir une vision transversale et non plus sectorielle. Cette approche globale intègre aussi la prévention et la promotion de la santé, ainsi que la veille et la sécurité sanitaires. Enfin, dernier élément pour appréhender les changements induits par la création des ARS : le regroupement, y compris physique, au sein de chaque ARS des services déconcentrés de l’Etat (Direction régionale des affaires sanitaires et sociales, DRASS, Direction départementale des affaires sanitaires et sociales, DDASS, Groupement régional de santé public) de l’agence régionale de l’hospitalisation (ARH) et de l’Union régionale des caisses d’Assurance maladie (URCAM). L’ARS devient donc un interlocuteur unique pour l’ensemble des secteurs de santé et du médico-social, aussi bien publics que privés.
Aucun changement au quotidien
Mais, pour l’instant, les pharmaciens ne perçoivent pas concrètement cette évolution. Déjà, la mise en place des ARS est loin d’être terminée. « Nous sommes encore en train de tout construire. La structure est importante et il faut du temps pour la mettre en œuvre », explique ainsi Nadine Weissleib, directrice du Pôle Veille et sécurité sanitaires au sein de l’ARS Ile-de-France. Et d’ajouter : « Tous les directeurs travaillent de façon acharnée ». Un discours partagé par tous les responsables interrogés dans les ARS. De plus, si les DDASS ont cédé la place aux délégations territoriales, les interlocuteurs des pharmaciens restent souvent les mêmes que ceux des anciennes structures. « Pour l’instant, il n’y a aucun changement », remarque Pierre Harmel, président de l’UNPF Paris-Ile-de-France. « Les relations sont assez éparses. Au quotidien, rien n’a été modifié. Nous avons été en contact avec l’ARS uniquement pour la grève des gardes », note de son côté Joël Peytavin, président de la Fédération régionale de Rhône-Alpes (FSPF). En outre, peu d’agences ont communiqué auprès des officinaux et notamment des organisations professionnelles. C’est néanmoins le cas de l’ARS Bourgogne. « Nos relations avec l’ARS se passent très bien. J’ai déjà rencontré la directrice générale, Cécile Courreges, notamment au sujet du maillage territorial dans les départements ruraux. Elle semble faire preuve d’un esprit d’ouverture. Elle est déjà venue plusieurs fois dans la Nièvre. J’ai un a priori favorable, sachant que tout se met en place et qu’il faudra voir à l’usage », relate Alain Delgutte, président du Conseil régional de l’ordre des pharmaciens de Bourgogne. Il en est de même en Lorraine. Christophe Wilcke, président de la Fédération régionale Nord-Est-Lorraine (FSPF) a également rencontré le directeur général de l’ARS Lorraine, Jean-Yves Grall. Malgré ce démarrage un peu lent et variable selon les régions, les officinaux sont plutôt favorables à la nouvelle organisation régionale. « Le niveau régional sera peut-être plus simple que le niveau départemental », observe Christophe Wilcke. « Il ne faut pas pleurer sur l’ancienne organisation administrative qui était devenue obsolète,estime Sophie Pommier, présidente de la Fédération régionale de Bourgogne Franche-Comté. Il fallait cette modernisation des rapports entre l’administration et les professionnels de santé. Il va aussi y avoir un rapprochement avec le monde médico-social. Des choses intéressantes vont être à faire. Ma seule inquiétude est la centralisation régionale. L’ARS est à Dijon. J’ai peur que cette centralisation nous fasse perdre une certaine réactivité dans nos rencontres avec l’ARS. Et que les besoins spécifiques locaux ne soient pas bien pris en compte, sachant que la Bourgogne est une région hétérogène. » Cette éventuelle perte de proximité semble peu probable pour les différents responsables interrogés, ainsi que pour Didier Tabuteau, directeur de la chaire santé de Sciences-Po (voir encadrés et interviews). Les délégations territoriales sont et doivent être, en effet, les interlocuteurs privilégiés des pharmaciens sur le terrain.
Encore une fois, il est trop tôt pour dresser un bilan. D’autant que les Unions régionales des professionnels de santé (URPS) ne sont pas, en cette rentrée, élues. Or, si elles n’ont pas de véritable pouvoir selon Didier Tabuteau, elles vont participer à la préparation et à la mise en œuvre du projet régional de santé, ainsi qu’à l’analyse des besoins de santé et de l’offre de soins, en particulier pour l’élaboration du schéma régional d’organisation des soins. En outre, elles auront leur mot à dire sur l’organisation de l’exercice professionnel, notamment en ce qui concerne la permanence des soins, la continuité des soins et les nouveaux modes d’exercice.
Les URPS : un enjeu pour les professionnels
Les URPS pourront également participer à des actions dans le domaine des soins, de la prévention, de la veille sanitaire, de la gestion des crises sanitaires, de la promotion de la santé et de l’éducation thérapeutique. Sans oublier qu’elles pourront contribuer à la mise en oeuvre des contrats pluriannuels d’objectifs et de moyens avec les réseaux de santé, les centres de santé, les maisons de santé et les pôles de santé. « Les professionnels de santé vont être un peu plus présents dans toutes les réflexions sur la santé et son organisation, notamment en ambulatoire, explique Pierre Ouanhnon, directeur du Pôle ambulatoire et services aux professionnels de santé à l’ARS Ile-de-France. La loi donne l’opportunité d’un important travail avec tous les partenaires et pas uniquement avec les médecins. » Les propos sont similaires dans les autres ARS. « Nous allons devoir engager un certain nombre de rencontres et de concertations avec les professionnels. Et l’ARS sera attentive aux différents projets d’innovation ou d’expérimentation des professionnels de santé et, par conséquent, des pharmaciens, déclare Nicolas Beney, directeur de la démocratie sanitaire et des partenariats de l’ARS Bretagne. Nous attendons que les URPS puissent être des partenaires actifs des ARS en répondant à des besoins spécifiques. » Et de conseiller : « Même si le Plan régional de santé sera finalisé en septembre 2011, les professionnels de santé peuvent déjà présenter des projets, car le secteur de la santé va continuer à vivre. » Les élections des URPS vont également constituer l’opportunité pour les pharmaciens et leurs représentants d’être en contact direct avec les ARS, puisque ces dernières sont chargées d’organiser les élections (voir encadré). D’ailleurs, des réunions dans le cadre de la Commission d’organisation électorale (COE) ont déjà commencé dans la plupart des ARS. « Pour la première fois, on nous donne la possibilité de nous exprimer et de nous impliquer dans des missions. Les élections des URPS sont importantes pour tous les pharmaciens. Nous devons montrer ce que nous savons faire et prouver que nous sommes de véritables interlocuteurs des ARS », conclut Valère Chosset, président de l’Union Syndicale des Pharmaciens du Rhône (USPO).
ARS BretagneLe changement dans la continuité
« L’organisation retenue a permis de conserver, au sein de la direction de la Santé publique, un pôle pharmaceutique et produits de santé qui gère les dossiers relatifs à la pharmacie », souligne Françoise Chabernaud-Leflon, pharmacien inspecteur. Les sept pharmaciens inspecteurs que compte l’ARS Bretagne poursuivent donc leurs missions de contrôle et d’inspection. Ils instruisent également les demandes d’autorisation. Ils participent aussi à la veille sanitaire qui se met actuellement en place. A l’instar d’autres ARS, des pharmaciens inspecteurs sont des référents par thème et ont, par conséquent, des liens avec les différentes directions. « Pour l’instant, il n’y a pas de modifications très importantes. Nous avons des relations avec l’Ordre et les organisations professionnelles », remarque Françoise Chabernaud-Leflon. Pour autant, la direction générale a la volonté d’intégrer complètement les délégations territoriales dans le fonctionnement de l’ARS afin de traiter les dossiers ou l’offre de soins. « Nous n’avons pas de pharmaciens inspecteurs au sein des délégations territoriales, mais des correspondants qui nous transmettent les dossiers pour instruction », complète Françoise Chabernaud-Loflon.
« Pour l’instant, il n’y a pas de modifications très importantes. Nous avons des relations avec l’Ordre et les organisations professionnelles »
FRANÇOISE CHABERNAUD-LEFLON
ARS BourgogneMutualiser les moyens
A l’ARS Bourgogne, l’efficience est le mot-clé. Avec cinq pharmaciens inspecteurs et un pharmacien sous contrat pour couvrir 616 officines, les pharmacies hospitalières et les laboratoires de biologie médicale, l’agence a donc misé sur la mutualisation des moyens. « L’ARS est un interlocuteur unique, rappelle Hélène Dupont, pharmacien inspecteur adjointe au responsable du département Prévention et gestion des risques et des alertes sanitaires, et en charge de l’expertise pharmaceutique et biologique, vigilances et gestion des risques liés aux soins. Tout est coordonné au niveau du siège régional de l’ARS. Les demandes, par exemple, de transfert d’une officine, sont maintenant déposées au siège de l’ARS et non plus en délégations territoriales. Nous instruisons le dossier et après avoir recueilli tous les avis, dont celui du Préfet, ce qui est nouveau et introduit par la loi HPST, nous rédigeons l’arrêté pour le directeur général de l’ARS. Ce traitement des dossiers au niveau régional permet d’avoir une vision plus globale et une égalité de traitement pour tous les pharmaciens quel que soit leur département, sachant que certaines de nos zones rurales sont en manque de médecins et que, dans d’autres zones, les pharmacies sont en difficulté. » Les pharmaciens inspecteurs de l’ARS sont également associés à des groupes de travail comme celui sur la permanence des soins. La direction de la Santé publique et celle de l’Offre de soins et de l’autonomie ont déjà entrepris d’établir des cartographies de l’offre de soins et des professionnels de santé. « Il faut qu’il y ait une cohérence entre médecins et pharmaciens sur les territoires de santé, et que la coopération entre les professionnels de santé se développe », observe Hélène Dupont. Seul bémol pour l’instant : les décrets d’application ne sont pas tous encore parus. « Notre expertise pharmaceutique nous place en porte d’entrée unique pour tous les dossiers relatifs aux établissements pharmaceutiques, aux pharmaciens et biologistes, aux médicaments et produits de santé, et ceci de façon transversale à la fois pour le secteur libéral, le secteur hospitalier et le secteur médico social. Ce qui apporte une valeur ajoutée importante aux missions portées par l’ARS », conclut Hélène Dupont.
« Il faut qu’il y ait une cohérence entre médecins et pharmaciens sur les territoires de santé, et que la coopération entre les professionnels de santé se développe »
HÉLÈNE DUPONT
Repères
Le calendrier électoral des URPS des pharmaciens
1er avril lancement des 26 ARS
Publicité25 août transmission des listes des électeurs à la Commission d’organisation électorale (COE)
3 septembre publication des listes des électeurs
29 septembre date limite du vote des URPS des médecins
4 octobre proclamation des résultats des URPS des médecins
11 octobre date limite de dépôt des listes des candidats par les syndicats
29 octobre publication des listes des candidats
2 décembre ouverture de la campagne électorale
9 décembre envoi du matériel électoral par la COE
16 décembre date limite du vote
21 décembre proclamation des résultats
Les dates clés du plan régional de santé
Mai-octobre 2010 diagnostic – état des lieux partagé de la situation sanitaire et des secteurs ambulatoire et médico-social
Octobre 2010-janvier 2011 réflexion et sélection des priorités de santé régionales. Elaboration du plan stratégique régional de santé.
Janvier 2011-été 2011 élaboration du schéma régional de prévention, du schéma régional et interrégional d’organisation des soins et du schéma d’organisation sociale et médico-sociale.
Septembre 2011 présentation du plan régional de santé (PRS) qui comprend le plan stratégique régional de santé et les trois schémas.
ARS Ile-de-FranceUn pôle d’expertise pharmaceutique
Dirigée par Claude Evin, l’ARS Ile-de-France est la plus importante des agences, en raison non seulement du territoire et de la population couverts, mais également de ses 1 300 agents. Une spécificité qui a conduit le directeur général à opter pour une organisation particulière avec notamment deux grandes directions : santé publique ; offre de soins et médico-sociale. « Le choix a été pris de ne pas disperser les pharmaciens inspecteurs dans les différentes directions de l’ARS afin qu’ils puissent garder leur expertise, dans un souci d’efficience, d’optimiser leurs ressources et leurs compétences », explique Nadine Weissleib, directrice du Pôle Veille et sécurité sanitaires au sein de la direction Santé publique. Ce pôle comprend le département Contrôle et sécurité sanitaires des produits et services de santé, le département de contrôle et sécurité sanitaires des milieux (ce qui correspond à l’ex-service santé et environnement), le service zonal de défense et de sécurité et la plate-forme de veille et d’urgence sanitaires. Mais les vingt-deux pharmaciens inspecteurs de l’ARS sont tous regroupés dans le premier département, ce dernier étant divisé en deux services : pharmacies d’officine, pharmacies hospitalières et laboratoires de biologie médicale, et coordination des vigilances. Dans ce schéma, les pharmaciens inspecteurs reprennent l’ensemble des missions de l’ex-Inspection régionale de la pharmacie : contrôle, inspection, instruction des demandes d’autorisation d’installation, de transfert ou de regroupement. « Dans l’immédiat, pour les pharmaciens d’officine, la notion de proximité demeure, puisque leur “porte d’entrée” reste locale au niveau des huit délégations territoriales, note Nadine Weilssleib. « La dénomination Agence régionale de santé peut laisser penser que l’ARS est uniquement régionale. Certes, la stratégie et les politiques menées sont régionales pour la plupart d’entre elles, mais les délégations territoriales restent au même niveau de proximité que les anciennes DDASS, renchérit Pierre Ouanhnon, directeur du Pôle ambulatoire et services aux professionnels de santé. Auparavant, un certain nombre d’activités étaient gérées principalement au niveau régional comme les réseaux de santé. Aujourd’hui, les délégations territoriales sont sous la responsabilité du directeur général de l’ARS, alors qu’il n’existait pas de lien hiérarchique entre la DRASS et les DDASS. Sur de nombreux sujets, leurs prérogatives se rapprochent de celles des DDASS, mais elles vont aussi s’occuper de nouveaux dossiers en lien avec les acteurs locaux : réseaux de santé, maisons de santé pluridisciplinaires, pôles de santé… Pour ces sujets qui relèvent de l’ambulatoire, la proximité avec les acteurs devrait être plus importante. »
En fait, ce sont les modalités de travail des pharmaciens inspecteurs qui changent. « Clairement, le métier des pharmaciens inspecteurs évolue, à l’instar des nouvelles missions attribuées par la loi HPST aux pharmaciens d’officine. Par exemple, ils apporteront leur expertise à la direction de l’offre de soins et médico-sociale pour des thématiques comme la permanence des soins, l’accès aux soins de premier recours, l’éducation thérapeutique du patient, les réseaux ville-hôpital et les coopérations entre professionnels de santé », détaille la directrice. Et de souligner : « Les pharmaciens inspecteurs vont s’investir de plus en plus en appui des professionnels dans leurs démarches de progression de leurs pratiques et d’amélioration du service rendu aux patients, l’objectif fixé par Claude Evin, directeur de l’ARS, étant l’accès de tous à des soins de qualité ». Même discours de la part de Pierre Ouanhnon, dont le pôle travaille en transversalité avec les pharmaciens inspecteurs. Cela a été le cas, par exemple, pour le suivi de la grève des gardes des pharmaciens. « Ce qui va changer également, ce sont les relations de l’ARS avec les professionnels de santé par la mise en place des URPS », ajoute Pierre Ouanhnon.
« Ce qui va changer également, ce sont les relations de l’ARS avec les professionnels de santé par la mise en place des URPS »
PIERRE OUANHNON
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