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Tutorat en santé : le rempart contre la reproduction des inégalités
Le week-end dernier, la faculté de pharmacie de Bordeaux a accueilli l’Assemblée générale décentralisée de l’Association nationale des étudiants en pharmacie de France (Anepf), consacrée aux Tutorats d’Entrée dans les Études de Santé. Médecins, pharmaciens, odontologistes, kinésithérapeutes et sages-femmes en formation se sont réunis pour échanger sur les pratiques, se former et affirmer une ambition commune : faire des études de santé un espace accessible à tous, quelles que soient les origines sociales.
Car le constat est limpide : 54 % des étudiants de deuxième année MMOP sont issus des catégories sociales les plus favorisées, contre 34 % dans l’ensemble des filières de l’enseignement supérieur. Un biais socio-économique que la réforme de 2020 (PASS/LAS) n’a pas suffi à corriger. Pire, les données du Grand Entretien 3.0 révèlent une persistance des inégalités d’information, de préparation et d’orientation dès le lycée.
Les tutorats, remparts face à la marchandisation de la réussite
Dans un paysage encore largement dominé par les prépas privées – perçues comme incontournables par 53 % de leurs usagers -, les tutorats universitaires offrent une alternative à la fois gratuite, efficace et solidaire. En 2024, plus de 74 % des étudiants en tutorat soulignent son excellent rapport qualité-prix, et près de 68 % saluent la diversité des services proposés : accompagnement personnalisé, annales corrigées, entraînements collectifs, et surtout soutien psychologique et méthodologique.
Pourtant, l’essor des tutorats se heurte à une concurrence inéquitable. « À La Réunion, il est quasi impossible de réussir sans prépa privée », déplore un étudiant bordelais. L’Anepf appelle à une reconnaissance institutionnelle de ces dispositifs : soutien logistique et financier, valorisation académique des engagements de tutorat, régulation du démarchage commercial en milieu scolaire, et inscription systématique des tutorats sur les portails Parcoursup et universitaires.
Une réponse humaine à un enjeu de santé publique
Le tutorat n’est pas seulement une alternative aux inégalités économiques : il répond à une urgence sociale et psychologique. Le Grand Entretien révèle qu’un tiers des étudiants en pharmacie travaille pendant les cours pour financer ses études, et qu’un sur quatre a déjà songé à abandonner sa formation pour des raisons économiques. Dans ce contexte, la solidarité entre pairs devient un levier de résilience collective.
« Il faut mettre fin à l’idée que seules les familles les plus aisées peuvent se projeter dans des carrières de santé », insiste l’ANEPF. Car la diversification des profils conditionne la pertinence de demain : la santé publique ne peut s’écrire sans représentativité sociale parmi les soignants.
Le tutorat, acteur structurant de la démocratisation
Loin d’un soutien ponctuel, les tutorats structurent une pédagogie alternative : plus horizontale, collaborative, centrée sur l’entraide. Les dispositifs les plus solides bénéficient déjà de formations des tuteurs, de comités d’évaluation, voire de conventions avec les UFR. Pour l’ANEPF, il est désormais temps de leur conférer un véritable statut institutionnel.
« Nous demandons une stratégie nationale ambitieuse pour intégrer pleinement les tutorats dans le paysage de l’orientation et de la réussite en santé », conclut Valentin Masseron, porte-parole de l’association.
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