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Pénuries de médicaments : une amélioration pour les laboratoires, un écran de fumée pour les patients
Les chiffres arrivent à point nommé. Moins d’une semaine après la charge de France Assos Santé, qui pointait la responsabilité de certains laboratoires dans les pénuries, le Leem publie des données en nette amélioration. Selon le syndicat des entreprises du médicament, le nombre de déclarations de ruptures ou de risques de rupture a chuté de 22 % entre 2023 et 2024, pour atteindre 939 signalements, un niveau inférieur à celui observé en 2019.
Une réplique sans le dire
Sans jamais mentionner explicitement France Assos Santé, le Leem déroule un argumentaire qui répond, en creux, aux accusations formulées quelques jours plus tôt par l’association. Laquelle dénonçait une communication « politique » occultant, selon elle, le non-respect des stocks obligatoires et l’abandon progressif de médicaments jugés peu rentables.
Le Leem insiste à l’inverse sur les actions engagées depuis 2023 : plan de lutte, charte d’engagement signée avec les autorités, outil TRACStocks couvrant 1 698 références. Le syndicat cite aussi l’exemple de l’amoxicilline, dont la disponibilité a été officiellement jugée satisfaisante par l’Agence nationale de sécurité des médicaments et produits de santé (ANSM) le 25 mars.
Une décrue réelle, mais partielle
Les données montrent une amélioration, mais le retour à la normale est loin d’être acquis. L’ANSM recense encore 3 825 médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MITM) signalés en rupture ou en tension en 2024. Une baisse par rapport aux 4 925 de l’année précédente, mais qui ne suffit pas à dissiper les inquiétudes.
Les tensions concernent toujours des traitements chroniques essentiels comme :
– la quétiapine (troubles bipolaires, schizophrénie),
– Pegasys (hépatite B chronique, co-infection delta),
– les corticoïdes injectables.
Des visions opposées
Deux lectures du même problème continuent de s’opposer. Le Leem appelle à une réponse structurelle : meilleure coordination européenne, système unifié de suivi des stocks, politique tarifaire adaptée. Il estime que les obligations de stock actuelles, portées à quatre mois depuis 2021 (+77 %), ne sont ni soutenables économiquement, ni efficaces durablement.
À l’inverse, France Assos Santé rejette l’argument économique. Les prix français restent dans la moyenne des pays développés, insiste-t-elle, s’appuyant sur une étude du ministère américain de la Santé. Selon l’association, les quelques revalorisations décidées en 2023 n’ont eu qu’un effet marginal sur la disponibilité effective des médicaments.
Sanctions renforcées, défiance persistante
En 2024, l’ANSM a renforcé son arsenal : les sanctions pour non-respect des obligations de stock sont désormais publiées pendant un an. Onze laboratoires ont été sanctionnés au printemps, pour un montant total de 8 millions d’euros. Parmi eux, Sandoz, Biogaran, Teva, Viatris Santé, Sanofi…
Malgré ce durcissement, la défiance reste vive chez les professionnels de santé. À l’officine, les plans de contingentement demeurent, et la lourdeur quotidienne en termes de gestion est inchangée.
Une stratégie gouvernementale attendue au tournant
Le 18 mars, les ministères de la Santé et de l’Industrie ont actualisé leur feuille de route pour lutter contre les pénuries. Mais la confiance reste à rebâtir, tant du côté des patients que des professionnels. Si France Assos Santé appelle à plus de transparence, les pharmaciens, eux, souhaitent soigner sans risque de rupture. La période estivale s’annonce comme un nouveau test grandeur nature.
Que propose le Leem pour prévenir les pénuries ?
Le Leem défend une approche structurelle et pragmatique de la lutte contre les ruptures d’approvisionnement. Parmi ses propositions phares :
Un système unique de suivi des stocks
Le Leem soutient la modernisation du dispositif DP-Ruptures, prévue par la Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2025, et se dit prêt à y contribuer.Une coordination européenne renforcée
Avec la création d’une liste harmonisée des médicaments critiques à l’échelle de l’Union européenne, afin d’améliorer l’anticipation des tensions.Une révision des obligations de stocks de sécurité
Le Leem conteste l’augmentation uniforme à quatre mois pour tous les MITM (+ 77 % depuis 2021), jugée trop lourde pour certaines structures. Il plaide pour une approche plus souple, adaptée aux réalités industrielles.Une politique tarifaire ciblée
Le syndicat propose une revalorisation des prix des molécules à risque, en lieu et place d’un renforcement des sanctions. Objectif : sécuriser la production en maintenant un équilibre économique pour les médicaments jugés peu rentables.
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