Les sorties de la réserve hospitalière en 2003

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Publié le 7 février 2004
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Neuf médicaments sont sortis de la réserve hospitalière en 2003 et la tendance risque de s’accélérer. Ils n’étaient que cinq en 1999, quatre en 2000, sept en 2001 et trois en 2002. Nous vous proposons donc un retour sur ces spécialités, le plus souvent dotées d’un statut particulier.

Copaxone (Glatiramère)

Aventis

Mode d’action : le glatiramère se fixe sur les antigènes de classe II du complexe majeur d’histocompatibilité favorisant la différenciation des lymphocytes T suppresseurs spécifiques anti-inflammatoires. S’ensuivent dans le SNC une libération de cytokines anti-inflammatoires et une réduction de la production de cytokines pro-inflammatoires.

Caractéristiques : Copaxone est indiqué dans le traitement de la sclérose en plaques de type récurrente/rémittente chez le sujet ayant eu au moins deux poussées au cours des deux dernières années et marchant encore seul.

Ses principaux effets indésirables sont des réactions au site d’injection, des dyspnées, des palpitations ou de la tachycardie immédiatement en postinjection, des tremblements et des érythèmes. Les voies intraveineuse et intramusculaire sont contre-indiquées.

Statut : médicament d’exception. Prescription initiale et renouvellements réservés aux spécialistes en neurologie. Médicament nécessitant une surveillance particulière pendant le traitement. Liste I, remboursement SS à 65 %.

Notre avis : Le glatiramère permet de réduire de 30 % le nombre de poussées annuelles versus placebo. Il bénéficie d’une ASMR majeure (comme les interférons) malgré l’absence d’étude comparative versus interféron bêta. L’injection quotidienne de Copaxone reste cependant moins séduisante que l’unique administration hebdomadaire ou trihebdomadaire d’interféron bêta.

Enbrel (étanercept)

Wyeth-Lederlé

Mode d’action : immunosuppresseur. L’étanercept inhibe de façon compétitive la liaison du facteur nécrosant des tumeurs (TNF) à ses récepteurs de surface. Le TNF est une cytokine dominante dans le processus inflammatoire de la polyarthrite rhumatoïde.

Caractéristiques : Enbrel est indiqué en première intention chez le patient souffrant de forme sévère de polyarthrite rhumatoïde, et en deuxième intention en cas d’échec ou d’intolérance au méthotrexate dans la polyarthrite rhumatoïde active, le rhumatisme psoriasique de l’adulte et l’arthrite chronique juvénile polyarticulaire chez l’enfant de plus de 4 ans.

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Ulcère cutané, prurit, toux et gastrite figurent parmi ses effets indésirables les plus fréquents. Les contre-indications à son utilisation sont les septicémies et les infections évolutives.

Statut : médicament d’exception. Prescription initiale hospitalière valable 6 mois. Prescription réservée aux spécialistes en rhumatologie, en médecine interne ou en pédiatrie. Renouvellement possible en ville par ces spécialistes.

Liste I, remboursement SS à 65 %.

Notre avis : Enbrel présente l’avantage d’un traitement possible en ambulatoire par rapport au Remicade (infliximab) injectable en intraveineuse. En revanche, son schéma d’administration à deux injections par semaine est moins séduisant que celui d’Humira à deux injections par mois. Son ASMR est modeste (III), sauf en cas de contre-indication au méthotrexate où elle est jugée importante (II).

Fludara (Fludarabine)

Schering

Mode d’action : antinéoplasique. Médicament cytotoxique, la fludarabine est déphosphorylée puis rephosphorylée dans la cellule en 2-fluoro-ara-ATP qui agit alors en analogue de la purine : elle inhibe la synthèse de l’ADN via l’inhibition de l’ADN-polymérase et de la ribonucléotide-réductase.

Caractéristiques : les comprimés de Fludara sont indiqués dans le traitement de la leucémie lymphoïde chronique à cellules B, en deuxième intention, après un protocole standard comportant en général du chlorambucil.

Le profil d’effets indésirables de la fludarabine est de type digestif (nausées, vomissements, diarrhées) et myélotoxique (leuconeutropénies, thrombopénies, anémies). Son emploi est contre-indiqué en cas de grossesse, d’allaitement, d’insuffisance rénale sévère et d’anémie hémolytique décompensée.

Statut : prescription initiale hospitalière valable 6 mois. Prescription réservée aux spécialistes en hématologie, en oncologie et en médecine interne. Renouvellement réservé à ces mêmes spécialistes.

Liste I, remboursement SS à 100 %.

Notre avis : Aussi efficace que la fludarabine injectable, la forme orale de Fludara permet un traitement ambulatoire évitant les perfusions et les hospitalisations. Son ASMR est jugée importante (II).

Glivec (Imatinib)

Novartis Pharma

Mode d’action : antinéoplasique. L’imatinib est une molécule cytotoxique. Il inhibe la protéine-tyrosine-kinase codée par le gène pathologique Bcr-Abl, résultat d’une translocation entre les chromosomes 9 et 22 (chromosome Philadelphie), responsable de la prolifération anarchique des leucocytes dans la leucémie myéloïde chronique.

Caractéristiques : Glivec est indiqué dans les trois phases de la leucémie myéloïde chronique : la phase chronique après échec du traitement par interféron alpha, la phase d’accélération et la crise blastique terminale, ainsi qu’en cas de diagnostic récent alors que la greffe de moelle osseuse ne peut être pratiquée. Glivec est aussi indiqué dans les tumeurs stromales gastro-intestinales non résécables ou métastatiques.

L’imatinib peut entraîner des troubles gastro-intestinaux, des oedèmes et des douleurs articulaires et musculaires. Il expose à un risque potentiellement élevé d’interactions médicamenteuses avec tous les médicaments inducteurs ou inhibiteurs enzymatiques du cytochrome P450 ainsi qu’avec le paracétamol.

Statut : prescription initiale hospitalière valable 6 mois. Prescription réservée aux spécialistes en hématologie, en oncologie, en médecine interne et en gastroentérologie. Renouvellement réservé à ces mêmes spécialistes.

Liste I, remboursement SS à 100 %.

Notre avis : Glivec représente une alternative thérapeutique très satisfaisante par rapport au traitement par interféron alpha + cytarabine. Son administration par voie orale est un plus incontestable. Reste à confirmer son intérêt en termes de survie globale. Son ASMR est majeure (I).

Kaletra (Lopinavir + Ritonavir)

Abbott

Mode d’action : antiprotéase. Le lopinavir est un inhibiteur compétitif de la protéase du VIH-1 et du VIH-2. L’association au ritonavir, antirétroviral inhibiteur enzymatique, permet d’augmenter l’aire sous la courbe du lopinavir.

Caractéristiques : Kaletra est indiqué en association à d’autres antirétroviraux, classiquement deux inhibiteurs nucléosidiques de la transcriptase inverse, dans le traitement des adultes et des enfants âgés de plus de 2 ans, infectés par le VIH. Les effets secondaires les plus fréquemment observés sont des troubles gastro-intestinaux (nausées, diarrhées, vomissements). Les contre-indications absolues à l’utilisation de Kaletra sont l’insuffisance hépatique sévère, le syndrome occlusif car les deux présentations de la spécialité contiennent du Crémophor (huile de ricin), l’enfant de moins de 2 ans, l’intolérance génétique au fructose et certaines associations médicamenteuses (midazolam, triazolam, cisapride, pimozide, amiodarone, alcaloïdes de l’ergot de seigle, millepertuis).

Statut : prescription initiale hospitalière annuelle par un médecin expérimenté dans la prise en charge de l’infection par le VIH. Renouvellement non restreint.

Liste I, remboursement SS à 100 %.

Notre avis : Le lopinavir occupe une place importante dans l’arsenal antirétroviral. Hormis le fait qu’il offre une alternative intéressante chez le patient ayant déjà épuisé plusieurs combinaisons thérapeutiques, son atout majeur réside dans son profil de résistance. Son ASMR est importante (II) en termes d’efficacité par rapport aux autres inhibiteurs de protéase.

Prograf (Tacrolimus)

Fujisawa

Mode d’action : immunosuppresseur. Le tacrolimus inhibe la formation des lymphocytes T cytotoxiques, principaux responsables du rejet d’une greffe. Il supprime la production des cellules T, l’activation des cellules B, inhibe la production de certaines cytokines telles que l’IL2, l’IL3 et l’interféron gamma. Enfin, il inhibe l’expression du récepteur à l’IL2.

Caractéristiques : Prograf est indiqué en prévention du rejet de greffe lors des transplantations rénale et hépatique et dans le traitement des rejets corticorésistants après transplantation d’organe. En période postopératoire, le tacrolimus est généralement prescrit dans le cadre d’une double ou d’une triple association avec d’autres immunosuppresseurs. Il s’agit d’un médicament à marge thérapeutique étroite, nécessitant une adaptation posologique en fonction des dosages sanguins.

Les effets indésirables sont relativement similaires à ceux observés sous ciclosporine : néphrotoxicité, diarrhées et diabète. L’incidence des cas d’hirsutisme, d’hypertrophie gingivale, d’hypertension et d’hypercholestérolémie est cependant moindre. Son association à la ciclosporine, au kétoconazole ainsi qu’au millepertuis est formellement contre-indiquée.

Statut : prescription initiale hospitalière valable 6 mois. Renouvellement à l’identique par tous les médecins.

Liste I, remboursement SS à 100 %.

Notre avis : L’efficacité du tacrolimus est identique voire supérieure à celle de la ciclosporine. Son profil d’effets indésirables n’est pas plus mauvais. Il bénéficie d’une ASMR modeste (niveau III).

Renagel (Sevelamer)

Genzyme

Mode d’action : chélateur du phosphate. Au niveau du tube digestif, le sevelamer réduit la concentration de phosphate dans le sérum. Il possède aussi la propriété de fixer les acides biliaires, diminuant de 15 à 30 % le taux de LDL-cholestérol.

Caractéristiques : Renagel est indiqué dans le contrôle de l’hyperphosphorémie chez l’adulte hémodialysé. Il est utilisé dans le cadre d’une approche thérapeutique multiple, pouvant inclure des suppléments calciques, de la vitamine 1,25-dihydroxy-D3 (ou un analogue) pour prévenir le développement d’une ostéodystrophie rénale. L’occlusion intestinale est une contre-indication à la prescription de Renagel. Les effets indésirables les plus fréquemment rencontrés sont des troubles digestifs, des troubles respiratoires, une hypotension, du prurit, des douleurs thoraciques, abdominales, une thrombose, un oedème, aussi imputables à l’insuffisance rénale en phase terminale.

Statut : liste I, remboursement SS à 65 %.

Notre avis : Le sevelamer présente un intérêt particulier dans la mesure où il diminue l’incidence des épisodes hypercalcémiques par rapport aux traitements par des chélateurs de phosphate à base de calcium. D’où son ASMR importante (II).

Viraféronpeg (Peginterféron alfa-2b recombinant)

Schering-Plough

Mode d’action : immunostimulant. Viraféronpeg est un dérivé pégylé d’interféron alfa-2b recombinant conjugué avec un polyéthylène-glycol. L’interféron exerce son activité cellulaire en se fixant spécifiquement sur des récepteurs de membrane. Son mode d’action antiviral n’est pas connu, mais il semble modifier le métabolisme de la cellule hôte. La réplication virale est inhibée et les virions fils sont incapables de quitter la cellule.

Caractéristiques : Viraféronpeg est indiqué dans le traitement des patients atteints d’hépatite C chronique active, seul ou associé à la ribavirine. Viraféronpeg est utilisé en monothérapie essentiellement en cas d’intolérance ou de contre-indication à la ribavirine. Ses effets indésirables les plus fréquents sont ceux déjà rencontrés sous interféron alpha : le syndrome pseudo-grippal ainsi que les inflammations au point d’injection, les troubles psychiatriques (dépression ou insomnie) et l’alopécie.

Statut : prescription semestrielle réservée aux spécialistes et aux services spécialisés en gastroentérologie, en hépatologie, en médecine interne ou en infectiologie. Renouvellement non restreint.

Liste I, remboursement SS 65 %.

Notre avis : Le peginterféron alfa-2b présente une efficacité supérieure à l’interféron non pégylé, une simplification du schéma thérapeutique de 3 à 1 injection par semaine, mais une tolérance locale moindre. L’ASMR a été jugée de niveau IV (mineure) que ce soit en mono- ou en bithérapie, sauf pour le cas difficile du VHC génotype 1 où elle a été jugée de niveau II (importante).

Zometa (Acide zolédronique)

Novartis Pharma

Mode d’action : biphosphonate, antiostéoclastique hypocalcémiant. L’acide zolédronique possède une forte affinité pour l’os minéralisé. Le mécanisme d’action de l’activité antiostéoclastique n’est pas encore élucidé. L’acide zolédronique possède aussi une activité antitumorale contribuant à son efficacité dans le traitement des métastases osseuses.

Caractéristiques : Zometa est indiqué dans le traitement des hypercalcémies induites par les tumeurs et en prévention des atteintes osseuses (fractures, compressions, hypercalcémies…) accompagnant les pathologies malignes.

Les contre-indications à son utilisation sont la grossesse et l’allaitement. Son utilisation peut engendrer un syndrome pseudo-grippal, une hypophosphatémie et des troubles digestifs (nausées, vomissements).

Statut : médicament nécessitant une surveillance particulière pendant le traitement.

Liste I, remboursement SS à 65 %.

Notre avis : Zometa engendre un confort d’utilisation supérieur à celui obtenu avec Arédia (acide pamidronique) avec une perfusion de 15 minutes versus 4 heures. Son efficacité et la durée de l’effet du traitement sont supérieures sous Zometa, d’où une ASMR modeste (III).