Le tabac influence-t-il la pharmacologie des médicaments ?

Les goudrons de la fumée du tabac contiennent des hydrocarbures aromatiques polycycliques, de puissants inducteurs enzymatiques qui agissent sur les cytochromes P450 (CYP) – plus particulièrement les isoenzymes 1A1, 1A2 et 2E1 – en augmentant la synthèse des enzymes ou en diminuant leur dégradation. Le métabolisme des substrats de ces enzymes est alors accéléré et leur demi-vie, diminuée. Cet effet inducteur s’installe deux à trois semaines après le début de la consommation de tabac. Du fait de leur élimination plus rapide, les médicaments métabolisés par les cytochromes P450 ont une efficacité qui peut se trouver amoindrie, et dans certains cas, leur dose doit être augmentée pour garder un effet thérapeutique convenable. À l’inverse, environ deux à trois semaines après l’arrêt, l’induction enzymatique provoquée par le tabac cesse, la métabolisation et l’élimination des substrats retrouvent un rythme plus lent et leur concentration sanguine augmente, avec un risque d’accumulation et donc de surdosages. Le risque de toxicité dépend des molécules. Il concerne en particulier les médicaments à marge thérapeutique comme la clozapine, principalement métabolisée par le CYP1A2, dont l’augmentation de la concentration plasmatique expose notamment à une agranulocytose, une myocardite ou à des convulsions. Les conséquences du sevrage sur le métabolisme de l’olanzapine sont similaires, mais les risques de toxicité, moindres. L’erlotinib, les ß-bloquants, la chlorpromazine, l’halopéridol, la méthadone, la warfarine et le zolpidem par exemple, peuvent également nécessiter un ajustement de la posologie et une surveillance au cours du sevrage.

Sources : « Interactions médicamenteuses avec la fumée de tabac », Pharmaciens pour un Canada sans fumée (PCSF), décembre 2021 ; « Aliments, boissons, tabac, santé et médicaments », Assurance maladie, janvier 2024.