Les oméga 3 font tâche d’huile

Dans son baromètre 2023*, Synadiet fait ressortir trois ingrédients stars dans la liste des compléments alimentaires les plus consommés : les vitamines et minéraux (65 % de consommateurs réguliers), les produits de la ruche (42 %), incluant miel, gelée royale, propolis et pollen, et les oméga 3, 6, 9, un marché qui s’appuie sur 32 % de consommateurs réguliers. Un socle solide auquel s’ajoutent de nouveaux adeptes si l’on se réfère à la croissance de cette catégorie de produits : + 17 %, en valeur, en cumul annuel mobile, à fin avril 2023, selon OpenHealth. Elle dépasse la croissance du marché des compléments alimentaires en officine (+ 9 % en valeur, en 2022 versus 2021, Synadiet). « Le marché des produits oméga reprend après avoir manqué de vigueur ces dernières années. L’âge d’or remonte à une quinzaine d’années, en lien avec la publication en 2003 du livre best-seller Guérir, de David Servan-Schreiber, qui mettait en évidence le rôle des oméga 3 sur le bon fonctionnement du cerveau et sur la régulation de nos émotions », détaille Pierre Lafitte, directeur marketing du laboratoire Les Trois Chênes.

Vers une reprise solide.

Véritable couteau suisse de notre santé, les nombreux bienfaits procurés par ces acides gras, études cliniques à l’appui, ont été largement vulgarisés par les médias : réduction du risque de maladies cardiovasculaires, fonctionnement normal du cerveau, régulation de l’humeur, amélioration de la mémoire et de la réponse immunitaire… Jocelyn Petit, chef de groupe phytothérapie au sein du laboratoire Arkopharma, estime que « la dynamique observée ces derniers mois va durer : cette catégorie enregistre une hausse de 20 % en valeur, entre janvier et mai 2023 (source Gers Data). Les consommateurs sont, majoritairement, des connaisseurs qui ont appris les bienfaits des oméga 3. » Autrement dit, ce marché de niche présente un sérieux potentiel de croissance et gagnerait à augmenter sa visibilité afin de recruter une cible plus large, incluant les néophytes.

Si le cœur vous en dit…

« Cette évolution positive du marché n’est pas liée à une hausse des prix due à l’inflation », avance Jocelyn Petit. Elle peut d’ailleurs être rapprochée de la dynamique de la large sphère « Vitalité/Immunité » (+ 16,3 %, en 2022, Synadiet*). « Cette catégorie a recruté un nombre considérable de nouveaux consommateurs depuis la période Covid. La prévention est rentrée dans les habitudes des Français », estime Nicolas Grelaud, directeur général d’OpenHealth. Toutefois, c’est majoritairement l’allégation cardiovasculaire (réduction des triglycérides et augmentation du HDL cholestérol) qui déclenche l’acte d’achat des compléments alimentaires à base d’oméga 3 : « 75 % des ventes, en volume, à base d’oméga 3 portent cette allégation », développe notre interlocuteur. Une réponse apportée à des alimentations souvent trop grasses et pauvres en poissons via une supplémentation. Jocelyn Petit avance, lui, une autre hypothèse pour expliquer l’essor du marché des oméga 3 : « La réglementation sur les statines naturelles de levure rouge conseillées aux patients présentant un taux de cholestérol sanguin trop élevé afin de diminuer leur risque de subir un accident cardiaque a évolué en juin 2022. Les formules dosées à plus de 3 mg de monacoline par jour sont désormais bannies (contre 10 mg avant), ainsi que l’allégation de santé “contribue au maintien d’une cholestérolémie normale”. Assiste-t-on à un report des consommateurs vers la catégorie des oméga 3 qui portent cette allégation ? », s’interroge-t-il.

C’est bon pour le cerveau !

L’autre point d’impact des oméga 3 est le cerveau : ils assurent la bonne connectivité des neurones et diminueraient, selon certaines études, le stress et le risque de dépression. C’est le second segment du marché, en mode mineur, « tiré par l’explosion de la catégorie humeur/stress, depuis l’avènement du Covid », estime Cécile Adant, pharmacienne et directrice du département formation du groupe Inula. Sur le marché global, des laboratoires se démarquent : Pileje (Omegabiane), Arkopharma (Arkogélules Oméga 3), Les Trois Chênes (Les 3 Chênes Oméga 3), Solgar (Oméga 3), ou encore, Ineldea (avec sa marque Pediakid qui propose un sirop et des gommes pour les plus jeunes). La majorité des acteurs proposent des produits à base d’huile de poisson optimisés : des oméga 3 issus de poissons sauvages pour Arkopharma ou d’anchois sauvages associés à de l’huile végétale de rose musquée, équilibrée en acides gras essentiels, pour Pranarôm… Cependant, pour répondre à la tendance encore plus forte du véganisme, le végétal pourrait s’imposer…

* Baromètre 2023 de la consommation des compléments alimentaires en France réalisé par Harris Interactiv pour Synadiet, paru en mars 2023. Chiffres du marché 2022.

7,2 %

C’est le taux de croissance annuel du marché mondial des oméga 3 prévu entre 2022 et 2027.

Source : Mordor Intelligence

LE MARCHÉ SE VÉGÉTALISE

Le végétal, c’est la tendance qui pointe le bout de son nez sur le marché des oméga 3, au même titre que dans les autres rayons de la pharmacie. Actuellement, peu de laboratoires répondent à cette demande, pourtant forte : Biocyte (oméga 3, 6, 9 à base d’acide alphalinoléique) et Norsan (Oméga 3 Vegan Capsules à l’huile végétale d’algues marines). D’autres acteurs annoncent leur positionnement futur sur ce nouveau segment, mais le travail de formulation requiert un certain laps de temps. « Nous essayons de végétaliser nos ingrédients phares. C’est un projet en cours qui devrait voir le jour en 2024. Nous travaillons sur une formule à base d’huile (onagre, par exemple), bio si possible », indique Pierre Lafitte, directeur marketing du laboratoire Les Trois Chênes. « C’est une réflexion que nous menons », ajoute Jocelyn Petit, du laboratoire Arkopharma. Face à la demande croissante du naturel, il va falloir compter avec cette nouvelle offre.