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Prix des médicaments : il faut s’attendre à des baisses brutales en 2026
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026 va sans doute acter de nouvelles contractions des prix des médicaments. Selon le Leem (Les entreprises du médicament), ces baisses seront encore plus importantes que celles de 2025, pourtant supérieures au milliard d’euros. Pour les pharmaciens, la véritable inquiétude concerne surtout les pénuries, accentuées par des prix trop bas sur les médicaments matures.
En dix ans, la part du médicament dans la dépense de santé est passée de 13 % à 9 %. Pourtant, ce poste continue de concentrer près de la moitié des économies annuelles imposées par l’Assurance maladie. Une logique budgétaire qui, selon le Leem, se renforcera en 2026 avec des baisses de prix supérieures à celles déjà appliquées en 2025.
« Les médicaments sont en moyenne quatre fois moins chers en France qu’aux États-Unis. Dire qu’ils sont trop chers est une vue de l’esprit », affirme Thierry Hulot, président du Leem, lors d’une conférence de presse organisée le 23 septembre. Le propos relève, certes, du lobbying, mais il souligne une tendance réelle : la France tire ses prix vers le bas, au risque de déstabiliser son tissu industriel et de fragiliser la chaîne de dispensation.
Médicaments matures, les premières victimes
Si l’alerte du Leem est générale, les médicaments matures paient un tribut lourd. À force d’être comprimés à des tarifs planchers, génériques et biosimilaires deviennent de moins en moins attractifs pour les fabricants, ce qui alimente des pénuries récurrentes. Les conséquences se mesurent à plusieurs niveaux : une perte de chances pour certains patients, contraints à des reports de traitement ; une fragilisation économique des officines, dont les marges de distribution sont comprimées ; et une complexité accrue des substitutions, qui brouille le dialogue avec les patients.
Les innovations ne sont pas épargnées. Leurs coûts de développement, estimés à 2 à 3 milliards d’euros par molécule pour une sur dix seulement qui atteint le marché, contrastent avec des prix d’entrée trop faibles pour permettre une mise à disposition rapide. Résultat : seuls 60 % des nouveaux médicaments sont disponibles en France, contre 90 % en Allemagne, et le délai moyen d’accès dépasse 520 jours, avec des extrêmes à 1 800 jours pour certains vaccins. L’accès précoce, longtemps vitrine française, s’est effondré : aucune demande n’a été acceptée au premier semestre 2025.
Un risque sanitaire invisible mais massif
Ces arbitrages budgétaires ont des conséquences sanitaires diffuses mais profondes. Dans les maladies rares, seuls 36 % des traitements sont accessibles en France, contre 90 % en Allemagne. Dans le cancer du sein, l’industrie estime que l’accès précoce a permis, entre 2021 et 2024, d’éviter 4 000 décès et 2 000 rechutes. Depuis son arrêt, les patients se heurtent à des délais rallongés.
Chaque mois de retard est un mois de survie en moins pour certains. Dans les officines, cette réalité se traduit par une tension accrue : ordonnances impossibles à honorer, substitutions en urgence, incompréhension des patients qui comparent la France à ses voisins.
La géopolitique du médicament : une nouvelle donne
Au-delà des prix, la France et l’Europe doivent désormais composer avec une nouvelle donne internationale. Les États-Unis ont inscrit la souveraineté sanitaire au cœur de leur stratégie. Leur règle de la « nation la plus favorisée » – qui impose de calquer les prix sur le plus bas observé en Europe, accentue l’effet pervers des tarifs français.
Dans le même temps, Washington attire 300 milliards de dollars d’investissements grâce à une politique industrielle offensive. La Chine intègre la pharmacie dans ses plans stratégiques et capte déjà des projets européens. Dans ce paysage, la France apparaît comme un maillon faible, incapable de peser sur la scène mondiale. « Depuis quelques mois, une véritable géopolitique du médicament s’impose. Les États-Unis et la Chine réécrivent la carte mondiale de la pharmacie, l’Europe regarde passer le train », a résumé Thierry Hulot.
Entre lobbying et constat partagé
Le Leem appelle à des États généraux du médicament pour sortir de la logique du rabot et bâtir une trajectoire pluriannuelle. L’initiative relève du lobbying industriel, mais elle recoupe un constat plus large : sans visibilité ni cohérence, la France s’expose à un double décrochage, thérapeutique pour les patients, économique pour les officines.
« La santé n’est pas un coût : c’est un moteur de souveraineté, d’innovation et de cohésion sociale », plaide Thierry Hulot. Pour les pharmaciens, l’urgence est claire : maintenir la disponibilité des médicaments matures afin de garantir la continuité des soins.
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