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Pénuries de médicaments : l’Union européenne met la pression pour sécuriser ses approvisionnements

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Pénuries de médicaments : l’Union européenne met la pression pour sécuriser ses approvisionnements

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Publié le 7 avril 2025
Par Christelle Pangrazzi
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Sous l’impulsion de la France et de neuf États membres, Bruxelles accélère sur la relocalisation de la production pharmaceutique. Un projet de règlement-cadre sur les médicaments critiques, actuellement en discussion, vient appuyer cette volonté.

Dans une lettre commune publiée début avril, la France, l’Italie, l’Espagne, la Belgique et six autres États membres ont officiellement interpellé la Commission européenne pour réclamer des mesures immédiates contre les pénuries de médicaments. Leur demande : un cadre européen contraignant pour assurer la souveraineté pharmaceutique du continent.

Cette démarche politique s’inscrit dans un contexte marqué par une augmentation de 60 % des signalements de ruptures entre 2018 et 2023, selon les données de l’EMA. Une dépendance critique vis-à-vis de l’Asie – 70 % des principes actifs sont importés – menace l’accès à des médicaments essentiels, y compris pour des pathologies graves comme le cancer, les infections sévères ou les maladies cardiovasculaires.

Un règlement dédié aux médicaments critiques

Le 11 mars 2025, la Commission a présenté un projet de règlement européen spécifiquement consacré aux médicaments critiques, en parallèle de la réforme du Paquet pharmaceutique. Ce texte vise à renforcer la sécurité d’approvisionnement des médicaments listés comme critiques (276 substances actives recensées à ce jour), mais aussi à améliorer l’accessibilité des médicaments d’intérêt commun.

Quatre grands axes structurent le texte :

relocalisation : incitations financières et procédures accélérées pour les projets industriels en Europe ;

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– achats publics : intégration de critères de résilience dans les appels d’offres et coordination européenne des marchés ;

– partenariats internationaux : diversification des sources d’approvisionnement avec des pays partenaires « de confiance » ;

– coordination : création d’un Critical Medicines Coordination Group réunissant États membres et Commission pour piloter la stratégie.

Une ambition industrielle assumée

La Commission assume une approche économique et stratégique : renforcer la production locale est considéré comme une exigence de sécurité collective. Pour les projets reconnus comme « stratégiques », le règlement prévoit :

– des statuts prioritaires dans les procédures de permis d’implantation ;

– des financements via les programmes européens existants (EU4Health, Horizon Europe, STEP) ;

– une coordination centralisée des initiatives nationales pour éviter la fragmentation des efforts.

Les laboratoires et industriels impliqués dans la chaîne des médicaments critiques pourraient bénéficier de ce soutien, à condition de démontrer qu’ils contribuent à réduire la dépendance extérieure ou à sécuriser des molécules essentielles.

Une mise en œuvre anticipée, avant le Paquet pharmaceutique

Alors que la révision complète de la législation européenne du médicament (Paquet pharmaceutique) est attendue pour 2026-2027, ce nouveau règlement entrerait en vigueur dès 2026, avec des mesures d’application immédiates. L’objectif : ne pas attendre 2028 pour agir.

Cette temporalité répond à la demande explicite des États membres, en particulier la France, qui appelle depuis plusieurs mois à des solutions opérationnelles rapides, notamment via l’Alliance européenne pour les médicaments critiques, lancée en avril 2024.

Pour les pharmaciens : quels enjeux ?

Pour les pharmaciens d’officine et hospitaliers, ce cadre pourrait favoriser une plus grande stabilité d’approvisionnement pour les traitements essentiels. En imposant une meilleure prévisibilité dans les chaînes logistiques, le règlement pourrait réduire la pression sur la gestion quotidienne des ruptures, particulièrement lourde à l’officine.

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