Merci pour le chocolat et tout le reste

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Publié le 18 septembre 2010
Par Laurent Lefort
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Je ne comprends rien aux films de Chabrol, les seuls à les comprendre sont Chabrol et les pharmaciens », avait lancé un jour Georges de Beauregard, producteur de cinéma des années 1960. Une petite phrase vacharde lancée à l’encontre d’un cinéaste qui vient d’inscrire définitivement le mot « Fin » au générique d’une carrière riche d’une soixantaine de longs métrages. Combien de bouchers, femmes infidèles et autres Betty Claude Chabrol a-t-il vu défiler dans l’officine parisienne paternelle ? Pas suffisamment ou peut-être trop pour avoir envie de reprendre le flambeau. Les mauvaises langues racontent qu’il aurait quadruplé sa première année de pharmacie. Sans succès. Pas si grave finalement, le succès il le rencontrera plus tard. Et souvent.

Le milieu bourgeois disséqué

En 1959, Claude Chabrol devient l’un des porte-drapeaux de la Nouvelle vague en signant Le Beau Serge, tourné à Sardent, petit bourg de la Creuse, où il s’était réfugié pendant la guerre. Ce film ne sera pas financé avec les bénéfices mirifiques de la pharmacie familiale. Cultivant l’autodérision à foison, Claude Chabrol racontera souvent que la grand-mère de sa première épouse avait eu la bonne idée de mourir pendant qu’il en écrivait le scénario, laissant un pécule suffisant. Il est tentant de faire de la psychologie à la petite semaine en se disant que son enfance passée entre boiseries et pots à pharmacie a contribué à forger sa faculté à brosser comme nul autre pareil un tableau caustique de la bourgeoisie de province. Peinture sociale dans laquelle les pharmaciens seront relativement épargnés. Pour l’anecdote, on se souviendra du film La Fleur du mal en 2003, dans lequel Bernard Lecoq trompait sa femme, interprétée par Nathalie Baye, dans l’arrière-boutique de sa pharmacie. Tout de même.

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