La vérité sur les trésoreries alarmantes et trébuchantes

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La vérité sur les trésoreries alarmantes et trébuchantes

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Publié le 9 novembre 2024 | modifié le 26 novembre 2024
Par Guy Tamboise
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Le secteur pharmaceutique fait face à une baisse accélérée des liquidités. De là à conclure que les pharmaciens n’avaient pas anticipé ce phénomène, il n’y a qu’un pas. Cependant, il est important de distinguer les enjeux économiques à long terme de la gestion des finances quotidienne.

La trésorerie représente le niveau des soldes bancaires, des placements (en valeur mobilière ou encore auprès du grossiste). Au quotidien, elle est destinée à faire face aux soubresauts pour éviter des agios bancaires, des impayés onéreux ou encore, à l’inverse, placer à bon escient les excédents. En matière de gestion, l’anticipation est la règle, avant que les comptes ne virent au rouge et transforment vite le quotidien en enfer. « En tout premier lieu, il convient de se référer au tableau pluriannuel des flux financiers. Il fait partie du prévisionnel actualisé au minimum tous les ans, offrant une vision sur plusieurs années », selon Laurent Fruleux, expert-comptable associé du cabinet AdéquA. Il s’agit de s’assurer que la société sera en capacité de dégager des résultats suffisants pour rembourser ses emprunts et investir. L’origine des difficultés de trésorerie provient souvent de déséquilibres structurels auxquels des mesures adaptées sont apportées : ré-étalement des emprunts, recapitalisation de la société, modération de la politique de dividendes, association, vente, etc.

Une impression biaisée

Mais, selon Olivier Delétoille, autre expert-comptable d’AdéquA, « la période liée au Covid-19 a flouté les analyses et les comportements raisonnables en raison des trésoreries confortées sensiblement et très logiquement en 2021 et 2022 avec les tests, les prêts garantis par l’État (PGE), le décalage des emprunts ou des cotisations sociales. Cette manne financière temporaire a pu être utilisée à plus ou moins bon escient ». Même si la plupart des pharmaciens ont fait preuve de prudence en participant raisonnablement au capital de sociétés d’exercice libéral (SEL), en évitant d’autofinancer leurs investissements ou en maîtrisant leur train de vie.

Aussi actuellement, rien d’anormal à ce que les trésoreries puissent donner l’impression parfois de fondre comme neige au soleil, avec des situations hétérogènes. Ainsi, celle des officines représentait plus de 40 % de la marge en moyenne en 2023 contre 24 % en 2019. En attendant les situations définitives à fin 2024, il est probable, toujours en moyenne, que la trésorerie globale en valeur reste supérieure à celle de 2019.

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4 recommandations à suivre

  • Les officines sont des entités légères n’ayant pas besoin de se doter d’outils de gestion « surdimensionnés », plutôt réservés aux grandes entreprises qui cherchent à optimiser leurs finances. La mise en place d’un plan de trésorerie mensuel, laborieux et inutilement chronophage, n’apportera aucune solution par rapport à une tendance structurelle.
  • Il est souhaitable que l’officine dispose d’une trésorerie globale minimale (qui n’est pas un « trésor de guerre »), représentant environ 25 % de la marge, uniquement pour faire face aux aléas conjoncturels normaux et à la saisonnalité des activités. Les postulants à l’installation intègrent cette nécessité dans leur business plan.
  • À l’occasion de l’acquisition d’une officine ou de la restructuration financière des dettes à long terme, il importe de prévoir le financement de la trésorerie minimale. Cette vision prudente se heurte parfois à celle du banquier qui aurait tendance à trop réduire ses accords de financements à long terme, ce qui s’avérerait préjudiciable ensuite à la gestion de la trésorerie au quotidien.
  • Le prévisionnel sur plusieurs années, intégrant l’évolution des flux financiers, que la structure soit endettée ou non, est actualisé au minimum une fois par an.