- Accueil ›
- Profession ›
- Socioprofessionnel ›
- La pharmacie limite les dégâts
La pharmacie limite les dégâts
La pharmacie, grâce à son lobbying, ne s’en est pas mal sortie pour la première lecture du texte du prochain PLFSS à l’Assemblée. Reste le Sénat, à partir du 18 novembre, et la seconde lecture pour transformer l’essai.
La pharmacie a remporté une belle bataille en terre parlementaire en limitant, avec ses alliés du Palais-Bourbon, les effets les plus ravageurs du PLFSS. « Nous étions très attachés à ce qu’un certain nombre de textes ne soient pas adoptés, sachant que le tarif de référence serait adopté à coup sûr », lâche Bernard Capdeville, président de la FSPF. « Nous devons cette réussite à la coordination générale de la profession. Tout le monde a tiré dans le même sens et chacun a apporté sa pierre à l’édifice pour permettre aux députés et au ministre de comprendre notre problématique, analyse Claude Japhet, président de l’UNPF. En fait, nous avons obtenu toutes les modifications que nous souhaitions à l’exception du tarif de référence. » « Nous avons sauvé une partie des meubles. Nos arguments ont fait mouche », se félicite aussi Gilles Bonnefond, secrétaire général de l’USPO.
Tarif de remboursement à la carte. « Je vous fais remarquer que je n’impose pas ce forfait de remboursement », a insisté Jean-François Mattéi lors des débats, répondant à Jean-Luc Préel, rapporteur du PLFSS pour l’UDF, qui faisait référence à la nouvelle dynamique des génériques depuis juin : « Je n’entends pas faire obstacle à une dynamique qui s’imposerait d’elle-même. […] Mais l’engagement des médecins a des limites. […] Il sera toujours plus facile de retenir le nom de marque. […] Vous dites que le forfait génériques va tuer les « génériqueurs » mais vous avez sûrement entendu en commission les représentants de l’industrie pharmaceutique vous expliquer le contraire : les princeps resteront à leur niveau normal car un alignement par le bas leur ferait perdre leur valeur commerciale à l’international. »
Donc le tarif de remboursement sera. Et il ne se fera pas par le jeu des négociations laboratoires-Etat, comme le réclamait un amendement de la majorité : « L’établissement des forfaits est une responsabilité propre et non partageable des ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale. » Mais les syndicats de pharmaciens souhaiteraient rapidement être fixés sur les critères qui présideront à son application, que seul le ministre maîtrisera. Sur ce point, « la balle est dans notre camp », selon Gilles Bonnefond : « A nous de prouver que le tarif de référence est inutile et inefficace. »
Exit l’épouvantail des équivalents thérapeutiques. Car la plus grosse crainte de l’officine était de voir créer des groupes d’équivalence aux contours mal définis et auxquels pourrait être applicable le forfait de remboursement. Or c’est avec une belle unanimité que députés de la majorité et de l’opposition ont demandé leur suppression. Le ministre ne s’y est pas opposé dès lors que l’Assemblée a décidé, en contrepartie, de pouvoir intégrer au Répertoire des génériques des molécules tombées dans le domaine public mais sans princeps officiel. L’aspirine et le paracétamol seront donc bientôt substituables par la volonté du ministre… « Nous n’avons jamais prêché pour autre chose que pour un élargissement du Répertoire à ces molécules », se réjouit Bernard Capdeville.
La bataille des remises continue. Reste à régler le problème du plafond des remises dans le cas où le forfait de remboursement sera appliqué. Le député-maire UMP d’Epinal, Michel Heinrich, pharmacien, a bien proposé en première lecture un amendement qui conservait au pharmacien une remise de 10,74 %. Mais le ministre est resté inflexible : « Si le générique fait l’objet d’un forfait de remboursement, il ne crée pour le pharmacien aucune surcharge de travail, estime-t-il. Les pharmaciens ont joué un rôle fondamental dans la diffusion des génériques. Le contexte très particulier justifiait qu’ils bénéficient d’une remise supplémentaire. Aujourd’hui, l’environnement a changé. »
Le soutien de députés de tous bords à cet amendement a néanmoins conduit le ministre à s’engager « à trouver entre les deux lectures une rédaction qui aménage une période de transition ». Il semble donc que la discussion reste ouverte.
Offensive d’automne sur le « corridor ». Enfin, Bernard Capdeville souhaite l’ajout d’un article additionnel supprimant la notion de « corridor de prix ». Le Code de la Sécurité sociale stipule en effet déjà que ce corridor (qui reste à négocier avec la CNAM) sera fixé « par rapport au produit le moins cher » de la dénomination commune. La FSPF souhaite une formule « plus simple » qui permettrait au pharmacien de délivrer tout produit qui serait « n % » moins cher (30 à 40 %) que le princeps. « Il faut abandonner la notion de corridor, confirme Claude Japhet, car le pharmacien donne un générique qui est de facto 30 à 40 % moins cher que le princeps. »
Reste à convaincre le cabinet du ministre et la CNAM d’ici la seconde lecture, sachant que l’introduction de molécule sans princeps (paracétamol…) au sein du Répertoire viendra compliquer la donne. Quant aux déremboursements, ils relèvent de mesures réglementaires et non législatives. Ils n’ont donc pas à être discutés au Parlement.
A retenir
Maintien du tarif forfaitaire de remboursement qui pourra être applicable à des groupes génériques. Il sera alors fixé par le ministre.
– En cas de forfait de remboursement, la remise maximum sera de 2,5 % sur tous les produits du groupe générique.
– Suppression de la notion de groupes d’équivalence, mais extension du Répertoire des génériques aux produits sans princeps.
– Suppression de la taxe sur les ventes directes de fabricants de princeps aux officinaux.
– Suppression de l’article réintégrant le médicament dans le budget de soins des maisons de retraite.
Réaction : daniel lenoir Directeur de la CNAM
Je regrette juste que l’évolution du texte ait supprimé les groupes d’équivalence. On en a fait l’épouvantail qu’il n’est pas. […] L’esprit de la loi, c’est que le tarif est une possibilité à utiliser. ça ne s’applique pas immédiatement. […] Avec le tarif à l’activité [soit à la pathologie, NdlR] dans les hôpitaux, on entre dans un principe de gestion de l’ASMR. Au bout de la logique, cela permettra, je l’espère, de supprimer les cloisons entre la ville et l’hôpital pour reconstituer toute la chaîne thérapeutique.
Maisons de retraite : une rare unanimité
Comme les sénateurs l’an dernier, les députés ont « suivi les conseils » de la profession en n’acceptant pas l’intégration du médicament au forfait de soins des maisons de retraite. Des députés de tous bords ont exposé les problèmes que cela soulèverait : augmentation régulière des prix, sélection possible des personnes âgées, non-recours aux officines locales, dérapages constants sur les médicaments… « Devant une aussi rare unanimité, le gouvernement s’en remet à la sagesse de l’Assemblée », a concédé Jean-François Mattéi, plus combatif sur un amendement du député Michel Heinrich (UMP) formalisant le rôle du pharmacien aux côtés du médecin coordinateur des établissements. Un amendement finalement rejeté, même si tous les syndicats de pharmaciens déclarent vouloir revenir à la charge. Le ministre estime, lui, qu’il suffirait déjà d’appliquer la loi existante qui prévoit la signature de conventions en bonne et due forme pour formaliser les relations entre pharmacies et établissements dépourvus de pharmacie à usage intérieur…
- Rémunération des pharmaciens : une réforme majeure se prépare-t-elle ?
- Les métiers de l’officine enfin reconnus à risques ergonomiques
- Remises génériques : l’arrêté rectificatif en passe d’être publié
- Réforme de la rémunération officinale : quelles sont les propositions sur la table ?
- Paracétamol : quel est cet appel d’offres qui entraînera des baisses de prix ?
- Comptoir officinal : optimiser l’espace sans sacrifier la relation patient
- Reishi, shiitaké, maitaké : la poussée des champignons médicinaux
- Budget de la sécu 2026 : quelles mesures concernent les pharmaciens ?
- Cancers féminins : des voies de traitements prometteuses
- Vitamine A Blache 15 000 UI/g : un remplaçant pour Vitamine A Dulcis
