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Reconditionner oui, mais comment ?
Le débat sur le reconditionnement, encore très focalisé sur les maisons de retraite, est en train d’évoluer, comme l’a montré une récente conférence-débat sur le sujet ayant réuni un universitaire, un avocat et un représentant de l’Ordre. La question n’est plus « Peut-on reconditionner ? », mais « Comment le faire ? ».
Voilà au moins une mise au point claire. « Oui, le reconditionnement de médicaments en pilulier est légalement possible », a redit Francis Megerlin, maître de conférences en droit et en économie de la santé, à l’occasion d’une conférence-débat le 12 mars à la faculté de pharmacie de Paris-V. Une mise au point que personne ne conteste plus. Contrairement à ce qui s’est dit maintes fois, « la loi Talon n’a jamais interdit le déconditionnement », a rappelé l’universitaire. Le déconditionnement de spécialités a improprement et souvent été assimilé par ses détracteurs à une incorporation dans une préparation. Enfin, la directive européenne 2001-83 relative au médicament ne prévoit aucune autorisation pour qu’un pharmacien puisse reconditionner des médicaments. « Quant au droit des marques, il prévoit juste qu’il est interdit de modifier un produit préalablement à sa vente, précise Alain Fallourd, avocat. Mais cela est autorisé une fois qu’il est présumé vendu. »
Reste à savoir dans quelles conditions réaliser cette prestation. La convention type EHPAD-Officine prévue par la LFSS 2007 reste une arlésienne et, même s’il est légal, le reconditionnement pour maison de retraite peut vite conduire en chambre disciplinaire. L’Ordre a en effet des attitudes et des prises de position variées selon les régions et selon les conseils disciplinaires. Du coup, c’est le Conseil national de l’Ordre qui tranche à travers ses jugements en appel. « La question fondamentale posée par l’Ordre est « Comment faites-vous ? de quelle manière ? avec quel matériel et quel personnel ? » », indique Alain Fallourd. La question de bon sens que vous devez vous poser est donc de savoir si vous êtes capable de réaliser l’acte de dispensation dans son entier et, en cas d’urgence, si vous pouvez être présent.
La doctrine ordinale : « Faites-le, mais bien ! »
Problème récurrent : il n’y a dans le Code de la santé aucune référence à une distance kilométrique concernant l’acte pharmaceutique. « Tant que nous n’aurons pas eu de décision [ordinale], nous n’aurons pas obtenu de régulation de la distance », commente Francis Megerlin. Tous les yeux sont donc tournés vers l’Ordre. « Il est évident que le pharmacien ne doit pas laisser échapper cette activité, commente Jean-Jacques Des Moutis, président du conseil de l’Ordre d’Ile-de-France. Mais la convention type n’arrivera peut-être jamais. C’est la jurisprudence qui va définir les règles. »
« Le président Des Moutis a bien noté qu’il était probablement temps que l’Ordre mette en place une doctrine, a apprécié Caroline Blochet, membre du comité de direction de Medissimo. On ouvre enfin le dossier des modalités. Une telle doctrine serait la bienvenue car opposable à tous, à commencer par Medissimo. » A entendre la voix de l’Ordre, une chose est sûre cependant : multiplier les contrats avec les établissements parce qu’il vous faut amortir une machine est en soi passible du disciplinaire. Qu’en pense Medissimo ? « Nous avons en moyenne 1,4 établissement par officine cliente (soit environ 100 lits), informe Caroline Blochet. Chez nous, le pharmacien n’achète pas de machine, on peut rentabiliser avec dix lits si la convention signée avec l’établissement est bien réfléchie. En tout cas, à partir du moment où vous vous lancez dans la qualité, toutes choses étant égales par ailleurs, vous êtes bien évidemment limité par la distance. »
Les façonniers en profitent
En l’état, un référentiel de bonnes pratiques serait donc le bienvenu, eu égard à l’enjeu de la préparation des doses dans le cadre de l’acte pharmaceutique, corrélativement au vieillissement de la population. Car faute de cahier des charges, pas de modèle économique. Et faute de modèle économique, pas de réponse aux pharmaciens et aux EHPAD, lesquels s’interrogent : quelle rémunération pour quel acte, quelle prestation, quelle qualité et quelle proximité ? « Et pendant ce temps, des façonniers se mettent sur le marché pour réaliser la préparation des doses à administrer à coût infirmier, puisque les pharmaciens ont dit eux-mêmes qu’il s’agissait d’une compétence infirmière », conclut Francis Megerlin.
Un chiffre d’affaires volatil
Loin d’être virtuel, le chiffre d’affaires lié à des résidents de maisons de retraite est cependant jugé « volatil », a rappelé l’avocat Alain Fallourd lors de cette conférence-débat. Pour discuter du prix d’une pharmacie, supprimer le chiffre d’affaires lié à des résidents de maisons de retraite est donc selon lui un impératif dans toute transaction. Le principe est simple : c’est comme s’il n’existait pas. Qu’il s’agisse d’un établissement voisin ou pas. Une notion de base que beaucoup de vendeurs ont tendance à oublier.
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