Le bras de fer continue

Réservé aux abonnés
Publié le 5 janvier 2008
Mettre en favori

Après avoir baissé leur rideau durant les fêtes, les pharmaciens domiens continuent leur combat contre la baisse de prix des médicaments. A la Réunion, le 2 janvier, ils ont voté à l’unanimité une grève de la carte Vitale. En attendant de passer à la vitesse supérieure.

La grève dans les DOM dure maintenant depuis plus de trois semaines. Après deux journées à rideau fermé suivies à 100 %, 750 à 800 pharmaciens (titulaires et autres collaborateurs) réunionnais ont défilé dans les rues de Saint-Denis et Saint-André le 27 décembre. Les leaders syndicaux ont d’abord été reçus par la présidente du conseil général Nassimah Dindar avant de s’entretenir avec le sénateur-maire Jean Paul Virapoullé à Saint-André, les deux protagonistes à l’origine de la décision de baisse de prix des médicaments dans les DOM (voir Le Moniteur n° 2706 du 15 décembre).

Jean-Paul Virapoullé a fait amende honorable en précisant qu’il ne voulait pas que les officinaux paient les pots cassés. N’empêche. A l’exception de la Guyane, où l’économie officinale est plus précaire, une première baisse de 3 % serait applicable au mois de mars à la Réunion, à la Martinique et en Guadeloupe, le temps d’épuiser les anciens stocks. Cette baisse serait répartie entre les grossistes et les officines de ville. Une seconde baisse pourrait ensuite être décidée. Un conditionnel de circonstance car, si la baisse a bel et bien été actée, les modalités sont à spécifier, l’arrêté interministériel étant toujours en attente de signature et de publication. « Cet arrêté devait être pris au 12 décembre, mais l’accouchement est difficile », constate, amusé, Patrick Gaubert, responsable du syndicat USPO de la Réunion.

Menace d’arrêt du tiers payant

Les croix vertes clignotent à nouveau dans la journée, mais la grève illimitée des gardes et des urgences se poursuit. « La Réunion ne compte actuellement que cinq pharmacies de garde pour toute l’île contre neuf en temps normal », explique Mario Lechat. Le porte-parole de l’intersyndicale des pharmaciens réunionnais est toujours aussi en colère : « Il est hors de question que nous nous fassions agresser de cette façon. Le gouvernement doit respecter la loi en réalisant, en concertation avec la profession, une étude prouvant que la baisse de prix est nécessaire. Au lieu de cela, on fait le contraire. L’Elysée décide la baisse et nous dit qu’une étude de l’IGAS et de la DGCCRF sera ensuite réalisée. »

Les pharmaciens réunionnais ont tenu une assemblée générale le 2 janvier où il a été décidé à l’unanimité « de modifier le système de fonctionnement avec la Sécurité sociale ». Les officines ne vont plus accepter la carte Vitale pour l’avance des dépenses médicamenteuses, utilisant exclusivement le mode dégradé. Avec, à la clé, un traitement plus lourd des volets de facturation pour les employés de la Sécurité sociale. « Certes, nous allons en pâtir, puisque les remboursements seront plus longs, mais la convention que nous avons signée exige néanmoins un remboursement à J + 10 en dégradé », affirme Patrick Gaubert. De toute façon, ce n’est qu’une première étape. Un préavis de déconventionnement à partir du 1er mars va être lancé par les pharmaciens. Ce qui implique, pour les patients, l’arrêt du tiers payant, donc un retour à l’avance des frais de santé.

Publicité

Le soutien des étudiants

Dans leur combat, les pharmaciens des DOM peuvent compter sur le soutien de l’association Epharmadom qui réunit des étudiants en pharmacie originaires des DOM. Les adhérents s’insurgent contre le manque d’écoute du gouvernement « qui passe en force sans tenir compte des arguments pourtant documentés et chiffrés ».

« Et qu’on ne vienne pas nous dire qu’une baisse de prix des médicaments remboursés va augmenter le pouvoir d’achat des Domiens ! Pour cela, il faudrait commencer par s’attaquer à tous les biens de consommation qu’ils paient très cher et réellement de leur poche », écrit Gladys Gendrey, vice-secrétaire de l’association.

Autre appui, celui des maires de la Réunion dont certains ont flairé la mauvaise publicité à l’approche des municipales. Une dizaine d’entre eux se sont donc fendus d’un courrier à la présidence de la République. Les représentants syndicaux de la Réunion ont quant à eux été reçus par Paul Vergès, président du conseil régional, dans l’après-midi du 3 janvier. « On essaie de faire pression sur tous nos politiques pour que chacun essaie, sinon de nous défendre, au moins de limiter les dégâts », expose Patrick Gaubert.