Les facs fourmillent d’idées !

Vous pensiez que les facs étaient là uniquement pour enseigner la synthèse de l’aspirine et la mycologie ? Détrompez-vous ! L’Appex, qui regroupe la plupart des filières officine, vient de montrer une fois de plus lors de ses Rencontres annuelles, les 16 et 17 avril à Liège (Belgique), que les facultés fourmillent d’idées, non seulement pour former les étudiants, mais aussi pour mettre en place une véritable recherche officinale : le stage de 6^e année est devenu le terreau d’études cliniques qui, année après année, contribuent à dessiner la pharmacie de demain en démontrant, chiffres à l’appui, la plus-value officinale.

L’évaluation gériatrique fait ses preuves

Imaginez par exemple à Amiens, 55 étudiants en stage de 6^e année à l’officine. Chacun d’entre eux doit recruter 20 personnes âgées de plus de 65 ans. Commence alors une batterie de tests que l’étudiant va faire passer pour mesurer la fragilité de la personne, sa capacité à être observant… L’étudiant doit de plus recueillir certains paramètres essentiels à la prise en charge optimale du patient : IMC, mais aussi clairance rénale, indispensable pour adapter la posologie des médicaments au fonctionnement du rein. La clairance rénale ? Les pharmaciens se plaignent de ne l’avoir jamais. Pourtant, dans cette étude baptisée EGO(1), pour évaluation gériatrique en officine, et portée par Eric Housieaux, professeur associé à la faculté d’Amiens, les étudiants ont réussi à obtenir ce paramètre dans 86 % des cas, montrant que 20 % des patients âgés étudiés étaient insuffisants rénaux modérés à sévères. Au final, 892 patients recrutés (moyenne d’âge de 81 ans) et 333 interventions pharmaceutiques (40 % d’interactions médicamenteuses, 20 % de prescriptions non conformes aux référentiels de prescription chez les personnes âgées…).

Les interventions des étudiants en pharmacie ont été plutôt bien accueillies par les médecins : sur 88 préconisations transmises au prescripteur, 78 % ont été suivies d’une modification de la prescription. A l’heure où l’observance et la conciliation pharmaceutique sont sur toutes les lèvres, cette étude démontre la plus-value officinale et l’intérêt majeur pour la santé publique de la création d’un entretien d’évaluation gériatrique à l’officine. Pendant ce temps, dans huit facultés (Amiens, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Limoges, Lyon, Montpellier, Rennes, Strasbourg), les étudiants ont travaillé sur les demandes spontanées d’ibuprofène et de pseudo-éphédrine. Les chiffres de cette étude IPADAM(2) qui a analysé plus de 25 000 dispensations sont sur le point d’être présentés et démontrent là aussi l’importance de l’intervention des pharmaciens au jour le jour.

Les études cliniques à l’officine ne sont d’ailleurs pas l’apanage des facultés françaises. La faculté de Liège, membre de l’Appex depuis 2013, propose chaque année un thème d’études cliniques menées par les étudiants de 5^e année. Les protocoles d’études pourraient ainsi être mutualisés.

A tel point qu’un des projets phares de l’Appex est de créer une équipe de recherche multidisciplinaire et multifacultés. L’université d’Auvergne vient de déposer le dossier. Idée qui pourrait bien faire son chemin et contribuer à revaloriser le rôle du pharmacien officinal.

(1) Etude réalisée par Mounir Rhalimi (CH de Chaumont-en-Vexin, Oise) et Eric Housieaux (faculté de pharmacie d’Amiens), pharmaciens, avec Alain Rauss, médecin épidémiologiste.

(2) Interventions pharmaceutiques à propos du dossier pharmaceutique et de l’automédication.