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Publié le 5 novembre 2018
Par Yves Rivoal
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Doublement du nombre de maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP) d’ici à 2022, création de 1 000 communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), 1,6 MD d’euros consacrés à la structuration des soins dans les territoires… la coopération interprofessionnelle occupe une place de choix dans la réforme du système de santé annoncée par le gouvernement. Elle pourrait aussi constituer une chance à saisir pour les pharmaciens…

D’après une enquête réalisée par l’Ordre national des pharmaciens en 2016, seulement 20 % des titulaires étaient engagés dans une démarche de coopération entre professionnels de santé. « Si je devais juger le niveau d’implication des pharmaciens en matière d’interprofessionnalité, je dirais : “Peut mieux faire”, confie Olivier Catala, titulaire de la pharmacie qui porte son nom à Amplepuis dans le Rhône, et qui enseigne aussi la pratique officinale à la Faculté de Pharmacie à l’Université de Lyon 1. Car même si les pharmaciens sont le plus souvent partis prenantes des maisons et pôles de santé ou des réseaux de soins, nous n’en sommes qu’aux prémices. »

EN RÉSEAU.

Si vous ne faites pas partie de ces 20 % des pionniers de la coopération interprofessionnelle à l’officine, sachez qu’il y a plusieurs manières d’investir ce nouveau territoire. La première consiste à rejoindre un réseau, à l’image de Xavier Schneider, titulaire de la pharmacie Cantonale à Truchtersheim, dans le Bas-Rhin, qui a adhéré en 2013 au réseau d’éducation thérapeutique REDOM, destiné aux maladies cardio-vasculaires, à l’obésité et au diabète. Cette structure regroupe 200 professionnels de santé installés en Alsace, avec une vraie multidisciplinarité puisque s’y côtoient des pharmaciens, des médecins, des infirmiers, des diététiciens, des psychologues, des éducateurs médico-sportifs… « Ce réseau a pour objectif d’apporter au patient toutes les informations utiles pour l’aider à améliorer sa santé et sa qualité de vie, explique Xavier Schneider. Il a aussi vocation à améliorer l’efficacité de sa prise en charge via un Plan Personnalisé de Santé (PPS) qui se traduit en général par un programme d’éducation thérapeutique du patient (ETP). » Depuis qu’il a intégré ce réseau, Xavier Schneider a ainsi recruté une dizaine de patients volontaires. « Nos parcours d’éducation thérapeutique sont composés de plusieurs rendez-vous individuels ou en groupe étalés sur un an ou dix-huit mois, précise le titulaire. Ils sont animés par un membre de l’équipe de REDOM et par les professionnels de santé du réseau selon les besoins. » Xavier Schneider intervient, lui, ponctuellement pour parler d’adhésion thérapeutique ou pour échanger avec les patients sur la meilleure manière d’inclure le traitement dans leur projet de vie. Titulaire de la pharmacie Charlemagne à Lyon, Théo Lefèvre a, lui, décidé de créer, ex nihilo, un réseau de soins avec les autres professionnels de santé de son quartier. « Pour moi, la coopération interprofessionnelle est en quelque sorte une seconde nature, confie le titulaire. Lorsque j’étais interne à l’hôpital, je dialoguais tous les jours avec les médecins pour faire le point sur un patient ou valider une ordonnance. Lorsque j’ai repris l’officine il y a cinq ans, j’ai essayé de reproduire ce schéma. » Sitôt installé, il commence donc par rendre visite aux médecins généralistes et infirmiers du quartier Perrache-Confluence. « D’abord pour me présenter, mais très vite, je me suis aperçu qu’il y avait chez eux cette même volonté d’échanger sur nos métiers respectifs et de mettre en place des protocoles de soins afin d’améliorer la prise en charge de nos patients, raconte Théo Lefèvre. De fil en aiguille, nous en sommes venus à créer un réseau de soins informels, puisqu’il n’est pas déclaré et que nous n’avons pas de locaux communs. » Ce réseau réunit cinq médecins généralistes, deux infirmiers et la pharmacie de Théo Lefèvre. Les réunions trimestrielles sont consacrées à l’uniformisation de pratiques communes sur des items comme les soins avec pansements ou l’adaptation des posologies pour les AVK. « Nous organisons aussi des réunions où l’on évoque le cas de certains patients problématiques et des sessions de formation interprofessionnelles », ajoute le pharmacien.

EN PÔLE ou maison de santé.

Les pôles et maisons de santé pluri-professionnels constituent un autre terrain privilégié de la coopération. Titulaire de la pharmacie des Champs à Bécon-les-Granits dans le Maine-et-Loire, Vincent Nadeau a décidé de rejoindre le pôle de santé Ouest Anjou en 2011, en transférant au passage sa pharmacie dans un local beaucoup plus grand. Organisé en Société interprofessionnelle de soins ambulatoires (Sisa), ce pôle est composé de 24 professionnels de santé. Il est éclaté sur trois communes : la Pouëze, le Louroux-Béconnais et Bécon-les-Granits. « Dans mon village, les patients ont accès sur un même site à la pharmacie, mais aussi à un cabinet médical avec 6 médecins, un orthophoniste, un cabinet de kinésithérapeute, une psychologue, un cabinet d’infirmiers, un ophtalmologiste et un orthoptiste. », précise le titulaire. Depuis sa création, le pôle a axé son projet de santé sur des programmes d’éducation thérapeutique sur la prévention du surpoids chez l’enfant et les lombalgies. « Étant titulaire d’un DU en nutrition, et le seul à avoir effectué les 40 heures d’éducation thérapeutique, j’ai participé à l’écriture du programme sur la prévention de l’obésité avec un médecin et une orthophoniste, précise Vincent Nadeau. J’anime aussi, de temps en temps, les séances de ce programme. » Le pôle a également mis en place des protocoles sur le diabète et les AVK. « Nous avons aussi instauré un classeur pour le maintien à domicile, que chaque intervenant doit alimenter en y rangeant les ordonnances, les résultats biologiques, les courriers des spécialistes… », précise-t-il. Titulaire de la pharmacie de la Paix à Garchizy, une commune de la Nièvre de 3 700 habitants située près de Nevers, Laurence Bapst a, elle aussi, transféré sa pharmacie pour se retrouver au cœur de la toute nouvelle Maison de santé pluriprofessionnelle (MSP) Simone Veil, qui vient d’être inaugurée à la périphérie du bourg. Son officine est désormais entourée par vingt professionnels de santé ou paramédicaux répartis dans deux bâtiments. Parmi les projets de santé déposés par la MSP auprès de l’Agence régionale de santé (ARS), figurent un programme de prévention contre l’obésité chez les enfants, des opérations de dépistage sur le diabète… « En ce qui me concerne, je suis allée présenter dans une école maternelle les risques encourus par les enfants en cas de trop fortes expositions au soleil, ajoute la titulaire. J’ai aussi participé à une soirée d’information sur la prévention routière organisée pour les personnes âgées. » Tous les professionnels de santé de la MSP se rencontrent également une fois par mois lors de réunions organisées entre midi et deux. « Lors de la prochaine, nous parlerons du bilan partagé de médication », annonce Laurence Bapst.

Un système

Au service du patient

On retrouve également des pharmaciens dans les Equipes de Soins Primaires (ESP) et les Communautés Professionnelles Territoriales de Santé (CPTS), qui commencent à fleurir sur le territoire. D’ailleurs, ces deux nouvelles structures pourraient s’imposer comme le bras armé de la coopération interprofessionnelle dans les années à venir (voir encadré, page 23). Gilles Conan en est persuadé. Il fait partie des membres fondateurs d’Asclépios, la 4e CPTS enregistrée en France en novembre 2017, et qui fédère aujourd’hui 227 professionnels de santé libéraux, dont 52 médecins généralistes, 24 spécialistes, 43 infirmières, 37 kinés et 21 pharmaciens, auxquels il faut ajouter des membres associés : les trois maisons de santé installées sur le territoire, l’hôpital d’Amboise, des Ehpad, le centre Malvau spécialisé dans les addictions…« Dans le Contrat Territorial de Santé que nous avons signé avec l’ARS, nous avons décidé de travailler sur le déploiement de la télé-expertise dans les maisons de retraite, afin d’éviter aux patients d’avoir à se déplacer pour consulter un médecin, explique Gilles Conan. Nous allons également plancher sur l’optimisation de la prise en charge des patients à la sortie de l’hôpital et travailler sur la prévention et le dépistage de la BPCO en partenariat avec la Mutualité sociale agricole. » La CPTS s’est aussi fixée pour ambition de renforcer l’attractivité de son territoire, afin de pallier à une démographie médicale alarmante. « Nous allons notamment œuvrer pour la construction d’une maison médicale. », souligne Gilles Conan. La CPTS organise des soirées où chaque profession présente ses méthodes de travail et ses contraintes. « Nous avons ainsi eu l’opportunité d’expliquer aux médecins de la CPTS ce que nous faisons dans nos entretiens pharmaceutiques, et de leur rappeler que nous n’étions pas là pour rééquilibrer un anticoagulant ou changer la dose d’un médicament, confie Gilles Conan. Mais qu’en revanche, il nous arrive de relever des éléments importants dans le suivi d’un patient : une alimentation déséquilibrée, une perte de poids, une fatigue intense… » Dans sa pharmacie, Gilles Conan accueillera également des internes en médecine en formation chez les médecins généralistes d’Amboise. « En échange, nos stagiaires de sixième année seront, eux, reçus chez les médecins formateurs », ajoute le titulaire.

LES LIMITES du système.

Lorsqu’on les interroge sur les vertus et les limites de la coopération interprofessionnelle, tous les pharmaciens que nous avons sollicités partagent le même ressenti. « L’administratif est lourd au démarrage, reconnaît Brigitte Bouzige, vice-présidente de la Fédération Française des Maisons et Pôles de Santé (FFMPS). Il faut monter le dossier auprès de l’ARS, rédiger le projet de santé… Il faut aussi convaincre les professionnels de santé de rejoindre l’aventure, en surmontant souvent les réticences ou l’animosité de certains qui craignent que la MSP empiète sur leur activité. » Ce genre d’aventure est aussi chronophage, surtout au démarrage. « Il faut donc se fixer des limites, faire en sorte que le projet ne se transforme pas en usine à gaz et adopter un mode d’organisation suffisamment souple pour pouvoir se désengager ponctuellement lorsque l’on est moins disponible. », souligne Vincent Nadeau qui consacre presque une demi-journée par semaine au pôle de santé dont il est aussi le comptable. Le volet financier se révèle aussi complexe comme l’a constaté Gilles Conan. « La première année, nous nous sommes concentrés sur la recherche de financements. Cette phase s’est révélée fastidieuse, et certains financements, qu’on nous avait pourtant promis pour 2018, ne sont toujours pas arrivés. » La question de la rémunération peut aussi constituer un frein, car même si elle est prévue dans les textes, sur le terrain, nombre de pharmaciens s’engagent bénévolement. C’est le cas de Laurence Bapst qui reconnaît « faire tout cela par passion. » De son côté, Vincent Nadeau est, lui, payé entre 30 et 60 € pour les réunions plénières qui se déroulent huit fois par an. Les réunions de travail et les séances d’éducation thérapeutique sont, elles, rémunérées 60 €. « Cette rémunération, c’est un peu la cerise sur le gâteau, mais ce n’est pas ça qui va permettre de dégager de nouveaux relais de croissance à l’officine », admet le pharmacien.

Objectif

Améliorer la qualité et la pertinence des soins

Les vrais bénéfices de la coopération doivent donc être cherchés ailleurs. « Le fait d’avoir autour de soi des professionnels réunis au sein d’un pôle de santé, c’est d’abord l’assurance d’avoir des prescriptions à l’officine », souligne Vincent Nadeau. L’interprofessionalité permet aussi d’améliorer la prise en charge des patients. « Aujourd’hui, mes patients se sentent accompagnés au sein d’un réseau où tous les professionnels se connaissent parfaitement et communiquent en cas de besoin. », souligne Théo Lefèvre. Sur les ordonnances, qui sont depuis longtemps numérisées, sont notées toutes les données pertinentes, comme le résultat de la créatinine pour un patient en insuffisance rénale. » Les médecins lui adressent aussi volontiers des patients pour effectuer des bilans partagés de médication. Xavier Schneider s’est lui appuyé sur le réseau de santé REDOM pour nourrir sa propre expertise, et pour servir au mieux ses patients. « Quand vous échangez en profondeur avec des patients et d’autres professionnels de santé, cela a des répercussions très positives sur la qualité de votre exercice à l’officine, souligne le titulaire. Nous avons par exemple développé un réel savoir-faire et savoirêtre autour du diabète et de l’obésité. Ce qui nous a d’ailleurs amené à investir dans un Sudoscan, un appareil nous permettant de dépister les maladies neuro périphériques potentiellement signe avant-coureur d’un diabète, et de pouvoir ainsi orienter plus efficacement nos patients vers leur médecin pour un éventuel diagnostic. » Au final, Vincent Nadeau estime que l’interprofessionnalité a complètement modifié sa façon de travailler : « Je continue, bien entendu, de développer l’aspect commercial et le prix dans mon officine, mais j’ai désormais la volonté de me recentrer sur le patient, car ce travail pluri-professionnel est enrichissant sur tous les plans, professionnel et humain. »

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LES EXPERTS

Sophie Sergent

PRÉSIDENTE DE LA COORDINATION DES ÉLUS URPS ET FSPF

Brigitte Bouzige

VICE-PRÉSIDENTE DE LA FÉDÉRATION FRANÇAISE DES MAISONS ET PÔLES DE SANTÉ (FFMPS)

Témoignages

Xavier Schneider

Titulaire de la pharmacie cantonale à Truchtersheim (67)

Gilles Conan

Titulaire de la pharmacie Centrale à Amboise (37)

Vincent Nadeau

Titulaire de la pharmacie des Champs à Bécon-Les-Granits (49)

Théo Lefèvre

Titulaire de la pharmacie Charlemagne à Lyon (69)

Alexandra Ayme

Titulaire de la pharmacie Jean Moulin à Caluire-et-Cuire (69)

Laurence Bapst

Titulaire de la pharmacie de la Paix à Garchizy (58)

Coopération

Plus forts, ensemble

Certains titulaires ont choisi d’investir le champ de la coopération, mais entre… pharmaciens. Titulaire de la pharmacie centrale à Amboise, dans l’Indre-et-Loire, Gilles Conan s’est ainsi lancé avec deux confrères installés, eux aussi, à Amboise et qui appartiennent au même groupement que lui, Pharmavie. « Nous avons décidé de nous motiver les uns et les autres pour développer les entretiens pharmaceutiques et les bilans de médications partagés, explique Gilles Conan. Cette stimulation réciproque porte ses fruits, car nos trois pharmacies réalisent une part très importante des entretiens réalisés dans le département. » Installée depuis 2010 à Caluire-et-Cuire, une ville de la première couronne de la banlieue lyonnaise, Alexandra Ayme, titulaire de la pharmacie Jean Moulin, s’est, elle, mise à la coopération en adhérant à l’Association des Pharmaciens de Caluire qui fédère la quinzaine d’officines de la ville. « Une fois par an, cette association organise des sessions de formation inter-pharmacies, qui réunissent à une ou deux exceptions près tous les titulaires et leurs équipes, confie la pharmacienne. Nous avons, par exemple, suivi il y a deux ans une formation sur l’apnée du sommeil délivrée par un pneumologue de Caluire. » La plupart de ces formations débouchent sur des campagnes de dépistage communes relayées dans la presse locale.

MODE D’EMPLOI

Le projet de santé d’une Equipe de soins primaires (ESP) et d’une Communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) soumis à l’Agence régionale de santé (ARS) doit décrire l’objectif de la structure, la liste des membres et leurs engagements sur la pluri-professionnalité

ESP ET CPTS

Un avenir prometteur

Pour décloisonner l’organisation des soins en multipliant les coopérations de proximité entre professionnels de santé, le gouvernement a introduit dans la loi sur la modernisation du système de santé la création d’Equipes de soins primaires (ESP) et de Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS). Décryptage de ces deux « structures » appelées à jouer un rôle essentiel dans le développement de l’interprofessionnalité.

Les Equipes de soins primaires (ESP) et les Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) doivent être créées à l’initiative des professionnels de santé. « Ce qui les différencie, c’est le périmètre, rappelle Sophie Sergent, présidente de la coordination des élus URPS et FSPF, qui préside aussi la CPTS Liévin Pays d’Artois. Les ESP ont pour champ d’action la patientèle des professionnels de santé qui la composent. Les CPTS s’inscrivent, elles, dans une logique de territoire plus large. Elles peuvent conduire les adhérents à intervenir en dehors de leur exercice et de leur patientèle habituels. »

Rôle et modalités de création. Pour exister, une ESP doit réunir au minimum un médecin généraliste et plusieurs professionnels de santé de ville assurant des soins de premier et second recours.

« Les ESP peuvent être structurées sous forme de Maisons de Santé pluri-professionnels ou de Centres de santé, ou adopter des formes de coopération plus légères, ajoute Sophie Sergent. Elles peuvent également inclure, ou non, un projet immobilier et être basées sur un ou plusieurs sites. » Le projet de santé qui doit être rédigé pour obtenir l’agrément de l’Agence régionale de santé (ARS) et un financement du Fonds d’intervention régional (FIR) peut porter sur une multitude de thématiques : prise en charge de personnes âgées ou handicapées, suivi de patients atteints de maladies chroniques, soins palliatifs à domicile… « L’ESP est la forme de coordination la plus simple, puisqu’il suffit de réunir trois ou quatre professionnels de santé de disciplines différentes, désireux de travailler de manière coordonnée pour suivre des patients chroniques ou lancer des protocoles, souligne Brigitte Bouzige, vice-présidente de la Fédération Française des Maisons et Pôles de Santé (FFMPS). En général, elles éprouvent rapidement le besoin d’accueillir d’autres professionnels de santé : des kinésithérapeutes, des orthophonistes… En grossissant, la plupart font le choix de se transformer en MSP, d’abord hors les murs, puis dans un second temps en investissant dans un projet immobilier commun qui facilite le travail de coordination. » Les CPTS ont, elles, vocation à fédérer des professionnels de santé assurant des soins de premier et de second recours, mais aussi des ESP, des maisons ou pôles de santé pluri-professionnels, ainsi que des acteurs du monde hospitalier, médico-social et social. Soumises aux mêmes principes de contractualisation avec l’ARS, les CPTS doivent, elles aussi, rédiger un projet de santé.

Les professionnels s’organisent. Une rémunération sur objectifs de santé est versée en année N+1 à tous les professionnels qui adhèrent à une ESP ou à une CPTS, selon leur convention. Elle est de 280 € la première année et de 420 € les années suivantes. « L’Accord cadre interprofessionnel (ACIP) en cours de négociation entre l’UNPS et l’Uncam, devrait intégrer un volet permettant aux conventions mono-catégorielles de générer de nouveaux modes de rémunération, comme le précédent accord signé en 2017 le prévoit déjà pour les maisons de santé organisée en Société interprofessionnelle de soins ambulatoires (SISA) », ajoute Sophie Sergent pour qui les CPTS répondent à une vraie attente des professionnels de santé. « Lorsque nous avons organisé la soirée de lancement de notre CPTS le 23 mai dernier, la salle était pleine, et les représentants de l’Assurance maladie et de l’ARS étaient venus en force. Et à la fin de la soirée, ils sont venus nous dire qu’ils nous apporteraient un soutien franc et massif. »

DÈS LA FAC

Pour répondre aux aspirations des futurs titulaires à travailler en interprofessionnalité, la faculté de pharmacie de l’Université de Lyon 1 a créé, en 2014, une unité d’enseignement facultative, où les étudiants de médecine, pharmacie et maïeutique apprennent à se connaître et à collaborer ensemble.

Interprofessionnalité

Quel retour sur investissement ?

L’impact de l’interprofessionnalité sur l’activité de l’officine est compliqué à quantifier comme le rappelle Vincent Nadeau, titulaire de la pharmacie des Champs à Bécon-les-Granits, dans le Maine-et-Loire. « Il est difficile de distinguer la part du Pôle de santé dans la progression de la fréquentation enregistrée par ma pharmacie. Le fait d’avoir transféré dans une pharmacie moderne et plus grande, où je peux proposer une offre élargie, a sans doute aussi joué. La présence du pôle de santé n’a d’ailleurs pas empêché une légère diminution du panier moyen sur les ordonnances… » Même constat chez Brigitte Bouzige, titulaire de la pharmacie qui porte son nom aux Salles-du-Gardon (dans le Gard), et qui a participé à la création de la Maison de santé pluriprofessionnelle Simone Veil, inaugurée le 27 juin, dernier à la Grand’Combe.

« La coopération ne génère pas plus de prescriptions, puisque nous enregistrons une évolution normale par rapport au reste de la profession. Elle apporte toutefois plus de retour sur le matériel médical à l’officine. Les médecins savent qu’ils ont tout ce qu’il faut sur place et qu’ils n’ont plus besoin d’appeler un prestataire spécialisé installé à 80 km de là. »

1 244 C’EST LE NOMBRE DE MAISONS DE SANTÉ PLURIPROFESSIONNELLES (MSP) EN FONCTIONNEMENT OU EN COURS DE CRÉATION, EN MARS 2017.

Source Direction générale de l’offre de soins (DGOS)

L’ESSENTIEL

→ La coopération interprofessionnelle est au cœur de la réforme “Ma santé 2022”. 1,6 Md d’euros seront consacrés à la structuration des soins dans les territoires.

→ Le gouvernement entend doubler le nombre de Maisons de santé pluriprofessionnelle (MSP) d’ici à 2022 et espère la création de 1 000 Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS).

→ Réseaux de soins, Pôles de santé, MSP, ESP, CPTS… Les structures ne manquent pas pour accueillir les pharmaciens désireux de se lancer dans l’interprofessionnalité.

→ La coopération interprofessionnelle nécessite un vrai investissement en énergie et en temps. Pour des retombées sur l’activité de l’officine difficiles à quantifier.

→ L’interprofessionnalité permet de maintenir une offre médicale sur les territoires menacés de désertification et d’améliorer la coordination dans la prise en charge des patients.

AVANT/APRÈS

Les pôles de santé constitués avant la publication de la loi de modernisation du système de santé seront identifiés en Communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS). Les maisons de santé hors les murs et les centres de santé, seront, eux, assimilés à des Equipes de soins primaires (ESP).