Passage de relais chez FO pharmacie

Réservé aux abonnés
Publié le 1 juillet 2024
Par Anne-Charlotte Navarro
Mettre en favori

Après vingt-quatre ans passés à négocier pour l’avenir de la profession de préparateur, Olivier Clarhaut, préparateur et syndicaliste Force ouvrière (FO), a décidé de passer le relais à David Brousseau.

Interview de deux préparateurs engagés pour l’avenir de la profession et la défense de la convention collective.

Olivier Clarhaut, qu’est-ce qui vous a poussé à transmettre le flambeau ?

O. C. : Je me suis engagé dans le syndicalisme en 1985, dès l’obtention de mon brevet professionnel (BP). Je voulais aider concrètement les salariés de l’officine. Après treize ans au poste de secrétaire fédéral de la branche FO pharmacie et onze ans secrétaire général adjoint de la Fédération nationale FO des métiers de la pharmacie, des laboratoires de biologie médicale, du cuir et de l’habillement. J’ai rencontré des gens formidables et géré des dossiers passionnants mais, à 64 ans, je ne voulais pas faire le mandat de trop. David Brousseau travaille sur les dossiers avec moi depuis deux ans. L’heure était venue de renouveler les troupes pour insuffler une énergie nouvelle ! Je lui laisse la branche en toute confiance.

Avez-vous une anecdote marquante à partager sur vos années de militantisme ?

O. C. : En trente-huit ans d’engagement, j’en ai beaucoup ! Mais une rencontre m’a marqué. Une pharmacienne adjointe est venue me voir un vendredi alors que je tenais une permanence. Elle m’a dit : « Trouvez-moi une solution pour quitter cette pharmacie sinon lundi, je me suicide dans les toilettes… » Être syndicaliste, c’est défendre et aider des gens au-delà de son intérêt personnel.

David Brousseau, qui êtes-vous ?

D. B. : J’ai 42 ans et je suis préparateur en pharmacie. Je me suis engagé dans le syndicalisme il y a une quinzaine d’années, au départ pour répondre à des questions de droit très concrètes. J’ai vite compris que les réponses se trouvaient dans la convention collective, qui définit les règles du jeu de la profession. Depuis dix ans, je siège à la commission exécutive au sein des instances nationales, et depuis deux ans, je suis le « Padawan » d’Olivier.

Quelle est votre vision du métier ?

D. B. : Être préparateur, c’est mon quotidien. Nos compétences sont essentielles au bon fonctionnement des officines et à la prise en charge des patients. Pourtant, ce métier est malmené et souffre d’un manque de reconnaissance. Mon rôle de secrétaire fédéral est de valoriser les compétences de tous les salariés de la pharmacie, mais aussi de participer à la construction de l’avenir de la profession. Il faut réfléchir à ce que sera le métier demain, et donc à son attractivité.

Publicité

Quelles sont les négociations en cours ?

D. B. : Actuellement, les principaux chantiers de la branche pharmacie d’officine concernent la mise en place de la licence, la revalorisation des classifications, et bien sûr les négociations salariales. Malheureusement, ces dernières sont dans l’impasse suite à la décision des employeurs (lire l’article p. 6 pour plus de détails).

Comment se passe la mise en place de la licence de préparateur ?

D. B. : La licence est un grand projet qui est à la peine. La première rentrée pourrait se faire en septembre 2025, mais le dossier avance très lentement du côté du ministère de la Santé qui a du mal à saisir l’intérêt de ce diplôme. Il fait pourtant consensus auprès des étudiants, des associations professionnelles et des syndicats, aussi bien d’employeurs que de salariés qui, à chaque rencontre, nous expliquent d’une même voix son intérêt majeur. Cette situation aurait pu être évitée en mettant en place une vraie licence pour tous. C’est l’idée que nous défendions avec Olivier. Résultat : demain, vont donc cohabiter des salariés titulaires du BP, du Deust, et bientôt de la licence. En pratique, ces trois niveaux de qualifications vont représenter un véritable défi de management pour les employeurs.

Comment assurer l’attractivité de la branche ?

D. B. : Les jeunes ne veulent plus être préparateurs en pharmacie. Le faible salaire, les horaires et le peu de perspectives d’évolution y contribuent. Au-delà de la question salariale, l’attractivité d’un métier passe par ses perspectives d’évolution, c’est pourquoi nous développons un nouveau certificat de qualification professionnelle (CQP) de phyto aroma et herboristerie.

O. C. : Assurer l’attractivité implique d’avoir une vision à long terme du métier, et de ne pas être un gestionnaire à la petite semaine !

Fin 2024, les élections professionnelles auront lieu, quel est votre objectif ?

D. B. : Tous les quatre ans, les salariés des entreprises de moins de onze salariés sont appelés à voter pour élire leurs représentants. Cette élection permet de mesurer l’audience syndicale. En pratique, les résultats permettent de déterminer quels syndicats de salariés participeront aux négociations des accords de branche. Lors du dernier scrutin, FO est arrivé en tête dans la branche officine avec 29,67 % des voix. Mon objectif est cette fois de franchir la barre des 30 %, ce qui nous permettrait de signer des accords de manière autonome lorsque nous les jugeons bénéfiques, après concertation des salariés de la branche.

Repères

→ 24 mars 2024 : David Brousseau est élu à l’unanimité secrétaire fédéral de la branche officine de la Fédération Force ouvrière des métiers de la pharmacie, des laboratoires de biologie médicale, du cuir et de l’habillement.