Dioxyde de titane dans les médicaments : les patients n’en veulent plus

© Getty Images

Dioxyde de titane dans les médicaments : les patients n’en veulent plus

Publié le 17 juin 2025 | modifié le 19 juin 2025
Par Christelle Pangrazzi
Mettre en favori
Interdit dans l’alimentation depuis 2022, le dioxyde de titane (E171) continue pourtant d’être utilisé comme excipient dans de nombreux médicaments. Plus de quatre mois après la date butoir, la Commission européenne n’a toujours pas tranché sur son éventuelle prolongation d’autorisation. Associations et patients s’impatientent.

L’autorisation d’usage du dioxyde de titane (TiO₂, ou E171) dans les médicaments devait être réévaluée par la Commission européenne au plus tard le 7 février 2025. Quatre mois plus tard, aucune décision n’a été rendue publique. Une situation qui alarme plusieurs associations de défense des consommateurs, dont 60 millions de consommateurs, l’UFC-Que Choisir, ainsi que le collectif AVICENN (VeilleNanos).

Ces acteurs dénoncent une inaction prolongée sur un sujet à forts enjeux sanitaires, alors même que l’additif a été retiré de l’alimentation depuis 2022, en application du principe de précaution.

Un excipient toujours très répandu

Le dioxyde de titane, utilisé pour ses propriétés colorantes et opacifiantes, reste largement utilisé dans les comprimés et gélules en tant qu’excipient pharmaceutique. Il entre dans la composition de centaines de spécialités disponibles sur le marché français, y compris des médicaments courants.

Pourtant, plusieurs études scientifiques ont mis en évidence des effets potentiellement toxiques associés à l’ingestion chronique de nanoparticules de TiO₂ : perturbations de l’immunité, risques pour la fertilité, l’intestin ou encore le système endocrinien. Ces risques, encore en cours d’évaluation, nourrissent un débat scientifique et réglementaire intense à l’échelle européenne.

Publicité

Les patients en attente, les associations en alerte

Parmi les signataires de la saisine adressée à la Commission figure Sylvie Gillet, atteinte de maladie de Crohn, qui appelle à une prise de décision urgente. En l’absence de réponse officielle dans les deux mois, les parties concernées prévoient d’introduire un recours en carence devant le Tribunal de l’Union européenne. « Les patients ne peuvent malheureusement pas « patienter » indéfiniment », rappelle AVICENN dans un communiqué.

Cette situation soulève un paradoxe : le principe de précaution a été appliqué dans le secteur agroalimentaire, mais reste suspendu dans le secteur pharmaceutique, faute de décision politique et de coordination entre les agences européennes.

Une vigilance renforcée côté pharmaciens

Si les industriels de santé sont à l’écoute de la réglementation à venir, les pharmaciens restent les premiers intermédiaires face aux interrogations des patients. Dans un contexte de transparence accrue sur la composition des médicaments, l’absence de position claire des autorités européennes alimente confusion et inquiétudes.

Certains fabricants, comme le laboratoire PiLeJe ou certains génériqueurs, ont déjà amorcé des reformulations sans TiO₂. Mais en l’absence d’obligation réglementaire, la transition reste hétérogène.

Sur le même sujet…
UDGPO : « Le tout honoraire serait un suicide pour la profession »
Les baisses de TFR et de prix annulées dix jours après leur entrée en vigueur
Génériques : « À présent aux industriels de jouer le jeu »