- Accueil ›
- Thérapeutique ›
- Médicaments ›
- Recherche et innovation ›
- Echec pour Kaletra, espoir pour l’hydroxychloroquine
Echec pour Kaletra, espoir pour l’hydroxychloroquine
L’essai clinique européen Discovery lancé le 22 mars évalue l’efficacité et la sécurité de quatre traitements expérimentaux contre le Covid-19, dont l’hydroxychloroquine. En attendant les premiers résultats scientifiquement validés, retour sur une molécule pas si anodine.
Au moins 800 patients français hospitalisés pour une infection Covid-19 devraient recevoir, dans le cadre de l’essai clinique Discovery lancé le 22 mars, l’une des quatre stratégies thérapeutiques qui, au regard des données actuelles, pourraient s’avérer efficaces contre le SARS-CoV-2 : le remdesivir, l’association lopinavir-ritonavir avec ou sans interféron bêta et l’hydroxychloroquine. « Très rapidement, les traitements expérimentaux inefficaces pourront être abandonnés et remplacés par d’autres molécules qui émergeront de la recherche », a souligné Florence Adler, infectiologue au CHU de Lyon (Rhône) chargée du pilotage de la partie française. La première évaluation clinique est attendue le 6 avril.
Kaletra out ?
Et la stratégie va très vite être adaptée. Un essai randomisé publié le 18 mars dans le New England Journal of Medicine a en effet déjà annoncé des résultats négatifs pour l’association lopinavir-ritonavir (Kaletra). Mené sur 199 patients chinois traités par lopinavir 400 mg-ritonavir 100 mg deux fois par jour pendant 14 jours, Kaletra n’a pas permis d’améliorer significativement l’état clinique sévère par rapport à une prise en charge standard seule. La mortalité à 28 jours a été similaire dans le groupe traité et dans le groupe contrôle, de même que la part de patients présentant une charge virale indétectable. Discovery maintient tout de même le bras avec Kaletra car il constitue un contrôle pour le groupe Kaletra + interféron, en incluant toutefois des patients à un stade plus précoce que ceux de l’étude chinoise.
L’antiviral expérimental remdesivir reste dans la course, même si le laboratoire qui le commercialise (Gilead) a annoncé suspendre son programme d’accès précoce à titre compassionnel, en raison de la très forte hausse des demandes enregistrées ces dernières semaines. Un stock de remdesivir a déjà été fourni pour l’étude Discovery.
(Hydroxy) chloroquine en hausse
Une petite étude sur l’hydroxychloroquine présentée le 16 mars à Marseille (Bouches-du-Rhône) a soulevé de grands espoirs et une déferlante médiatique, alors même que la communauté scientifique se montre très partagée sur sa méthodologie et ses résultats. Mardi 24 mars, l’hydroxychloroquine n’était pas autorisée dans le traitement du Covid-19. Le Haut Conseil de la santé publique a même recommandé le 23 mars de ne pas l’utiliser « à l’exception de formes graves hospitalières, sur décision collégiale des médecins et sous surveillance stricte ». Les alertes se multiplient sur les risques liés à son utilisation à la posologie de 400 mg deux fois par jour à J+1, puis 200 mg deux fois par jour. Notamment parce que la chloroquine, l’hydroxychloroquine et l’azithromycine — souvent co-prescrite aux patients à risque de pneumopathie — exposent à un allongement de l’intervalle QTc, majoré par l’hypokaliémie et l’association de plusieurs médicaments allongeant le QT. Or « ces facteurs de risque sont souvent présents chez les patients infectés par le SARS-CoV-2 », alerte le Réseau français des centres régionaux de pharmacovigilance. Qui rappelle que la co-administration de citalopram, d’escitalopram, de dompéridone, d’hydroxyzine et de pipéraquine est contre-indiquée, tandis que celle de médicaments susceptibles d’induire une arythmie cardiaque ou d’allonger l’intervalle QT est déconseillée (anti-arythmiques, antidépresseurs tricycliques, antipsychotiques, macrolides et fluoroquinolones).
Dans tous les cas, un ECG est impératif avant l’instauration du traitement par hydroxychloroquine, dans les trois à quatre heures suivant la première prise puis deux fois par semaine pendant la durée du traitement, voire plus en cas de symptôme de trouble du rythme cardiaque. Une éventuelle hypokaliémie doit être prise en charge et supplémentée. Les effets indésirables (gastro-intestinaux, cutanés, cardiaques, hématologiques, psychiatriques, oculaires, etc.), pour la plupart dose-dépendants, sont plus fréquents avec la chloroquine. Cette dernière, il faut le rappeler, est un médicament à marge thérapeutique étroite hautement toxique en cas de surdosage : si la dose dangereuse est de 2 g en une prise chez l’adulte, chez l’enfant, il peut suffire d’un ou de deux comprimés pour provoquer le décès. Si jamais les études confirment l’efficacité de l’hydroxychloroquine ou de la chloroquine, une vigilance particulière sera indispensable au comptoir pour dispenser ces molécules.
COMMENT AGISSENT L’HYDROXYCHLOROQUINE ET L’AZITHROMYCINE ?
HYDROXYCHLOROQUINE
La chloroquine et son dérivé l’hydroxychloroquine ont montré une activité in vitro contre le SARS-CoV, le SARS-CoV-2 et d’autres coronavirus. L’hydroxychloroquine a une puissance relativement plus élevée contre le SARS-CoV-2. Le mécanisme d’action antivirale de la chloroquine n’est pas précisément établi. Il pourrait passer par un blocage de l’acidification des vésicules intracytoplasmiques. La fusion initiale entre la membrane externe du coronavirus et la membrane de la cellule hôte nécessite en effet une interaction entre des protéines de surface qui ne peut se faire que dans des conditions acides particulières. Un p H inadapté pourrait ainsi bloquer le processus de pénétration du coronavirus dans les cellules. D’autres propriétés sont également avancées : modification de la synthèse de certains sucres nécessaires aux protéines de surface pour la reconnaissance des cellules cibles, modification post-traductionnelle de certaines protéines virales.
L’AZITHROMYCINE
L’est un antibiotique macrolide indiqué dans les infections des voies respiratoires inférieures. Le Pr Raoult justifie son utilisation par le fait que cet antibiotique s’est montré « efficace en laboratoire contre un grand nombre de virus » et qu’il « diminuait les risques chez les gens infectés par des infections virales en général ».
Sources : Société française d’ophtalmologie, Centers for disease control and prevention (CDC).
- Comptoir officinal : optimiser l’espace sans sacrifier la relation patient
- Reishi, shiitaké, maitaké : la poussée des champignons médicinaux
- Budget de la sécu 2026 : quelles mesures concernent les pharmaciens ?
- Cancers féminins : des voies de traitements prometteuses
- Vitamine A Blache 15 000 UI/g : un remplaçant pour Vitamine A Dulcis
