Préparateurs baroudeurs…

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Publié le 29 juin 2013
Par Annabelle Alix
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L’été à la mer, l’hiver au ski, le préparateur saisonnier plie souvent bagage entre les saisons.

Plongé en permanence dans un climat de vacances, il doit être réactif, caméléon et calé sur le conseil au comptoir.

Ils ont souvent moins de 30 ans. Sortent parfois de l’apprentissage. L’été à la mer, l’hiver en station de ski, les préparateurs saisonniers parcourent la France au gré de leurs envies et des contrats qu’ils décrochent. Il peut s’agir de contrats à durée déterminée (CDD) pour accroissement temporaire d’activité, ou de contrats saisonniers (voir encadré p. 23). Cadre agréable, ambiance dynamique, missions diversifiées dans une équipe souvent solidaire et sympathique, le métier de préparateur saisonnier séduit.

Face à la morosité qui touche l’officine et au manque de perspectives d’évolution, ces préparateurs cherchent ailleurs d’autres sources de motivation comme fuir la routine ou cumuler les heures travaillées et mettre de l’argent de côté pour voyager entre les saisons. « J’aime les défis et je suis curieuse d’en apprendre toujours plus sur mon métier, s’exclame ainsi Muriel Garcia, préparatrice. À 30 ans et après six ans passés en CDI à Toulouse, j’avais déjà l’impression de tourner en rond… » Son attrait pour la nouveauté l’a poussée l’an dernier à signer un contrat saisonnier dans les Alpes – de décembre à avril – au sein d’une officine spécialisée en médecine chinoise. « J’y ai appris à me servir des schémas d’acupuncture pour conseiller les clients en aromathérapie, et à faire du chiffre », constate-t-elle, ravie d’avoir découvert de nouvelles facettes de son métier tout en profitant des pistes.

Démarcher une place au soleil

Muriel n’a pas atterri dans cette pharmacie alpine par hasard. Elle s’en est donné les moyens : « J’avais sélectionné quelques pharmacies pour leurs spécialités et je les ai démarchées », précise-t-elle. Avant le « rush », les titulaires en mal de contacts saisonniers disponibles épluchent les candidatures spontanées, les annonces déposées chez les grossistes ou sur le site www.pharmaxie.com. Ils passent parfois eux-mêmes leurs offres. « La plupart cherchent de leur côté, mais de plus en plus de titulaires font appel à nous en amont de la saison », relève Caroline Salotti, référente pharmacie chez Appel médical, société de travail temporaire.

Une recrudescence d’offres est alors observée sur les sites intérimaires à partir de juin pour l’été et en décembre pour la saison d’hiver. Les annonces sont généralistes : « Vous êtes titulaire du brevet professionnel de préparateur en pharmacie », « avec de l’expérience au comptoir », « connaissance du logiciel souhaitée », etc. « La rédaction de nos offres d’emploi doit être irréprochable au regard des dix-neuf critères de discrimination prohibés par la loi », explique Sébastien Buffet, attaché de presse chez Randstad France, société de travail temporaire. Les critères affichés portent uniquement sur les compétences et l’expérience, et non sur la personnalité. » Sur le terrain, en revanche, les attentes sont spécifiques. « On cherche bien sûr un feeling avec les candidats, mais aussi un dynamisme, et on évite les mentalités “fonctionnaire”, ironise Thomas Schmitt, titulaire à Avoriaz (74), car en saison, il faut monter au front [office] ! »

Un rythme d’enfer

Devant ou derrière le comptoir, personne ne chôme. En quelques mois, de juin à septembre l’été, de décembre à avril l’hiver, l’officine doit parfois réaliser son chiffre d’affaires pour l’année. « L’une des pharmacies dans lesquelles j’ai travaillé réalisait 350 000 € de chiffre en un mois », se souvient Nicole, préparatrice saisonnière. Un montant destiné à compenser la baisse voire l’absence – plus rare – d’activité hors saison, surtout à la montagne. « Le nombre de résidents à Avoriaz ne dépasse pas les 100 personnes hors saison. Maintenir mon officine ouverte ne serait pas rentable », indique Thomas Schmitt, qui profite des périodes creuses pour se consacrer à la gestion administrative de sa pharmacie, à son agencement et au passage des commandes. En saison, place au comptoir, rien qu’au comptoir. L’équipe doit être dynamique pour gérer les attentes des personnes qui défilent. « La pharmacie en saison, c’est en moyenne 500 clients par jour pour cinq officinaux au comptoir, résume Nicole. Pas le temps de se poser ni d’aller aux toilettes ».

Le volume horaire hebdomadaire s’élève parfois au-dessus des lois, à 45, 50 voire 65 heures par semaine sur certains sites. Et pas question de refuser les heures. « Les titulaires considèrent que les saisonniers sont là pour cravacher, constate Muriel. Il faut avoir la forme ! Ça bouge sans arrêt, on n’a pas le temps de s’ennuyer. » Du coup, ce ne sont pas des vacances, même si le cadre fait rêver. « Difficile de profiter des avantages de la neige en travaillant six jours et demi sur sept. Sur toute la saison, je n’ai skié que 2 heures et demie, regrette Serge Barbeau, préparateur. C’est un peu frustrant, d’autant qu’on subit les conséquences de la neige, et qu’il faut gratter le pare-brise chaque matin avant d’aller travailler ».

Malgré tout, certains arrivent à profiter des pauses du midi – d’une heure trente à trois heures – pour aller skier ou se balader, ou de l’ambiance festive du soir en surmontant la fatigue de la journée. Dans tous les cas, le professionnel doit rester prudent. « Un préparateur engagé pour la saison doit conserver une attitude responsable, prévient Serge, car s’il se casse une jambe, se tord une cheville ou se luxe l’épaule, c’est toute l’équipe qui en pâtit. »

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Du chiffre et encore du chiffre sur l’OTC

Le gros des ventes en saison ? Le conseil bien sûr et pas vignetté. « L’attente chez le médecin est de 4 heures à Courchevel. Pour gagner du temps, les prescripteurs rédigent des ordonnances minimalistes, explique Alexandre Kantorski, préparateur. Mieux vaut avoir une expérience solide en conseil associé pour les compléter. » Et en rajouter. Les pharmaciens poussent à la vente, parfois à la limite de l’exagération. Alexandre n’a pas adhéré à la philosophie trop extrême de son titulaire : « C’était de l’abattage. Il fallait conseiller au plus cher, forcer la vente auprès de clients déjà équipés, délivrer une orthèse articulaire pour une petite douleur et orienter ensuite le client chez le médecin pour qu’il se la fasse prescrire et rembourser. » À la montagne, les dépassements sont fréquents sur l’orthopédie, le tiers payant n’est généralement pas proposé, et la carte bancaire est parfois refusée au-dessous d’un certain montant. Ce qui n’est pas pour choquer Nicole, habituée des saisons : « On se fait massacrer de la même façon dans les autres commerces de station », plaisante-t-elle.

L’hiver, les clients sont plutôt prêts à consommer. « Ils paient chacun 1 000 € la semaine entre le logement, les skis, le forfait, les restaurants, les crêpes pour les enfants et la bière à l’apéritif, pointe Serge qui travaille en station. Quand ils se blessent ou tombent malades au bout de deux jours, il faut tout leur vendre car il n’est pas question pour eux de passer la semaine au lit. » Alors, ils achètent tout : médicaments pour le rhume ou le mal de gorge, contre les courbatures du ski, stick à lèvres, crème solaire, traitement des ampoules… « L’été, en revanche, ils ne se soignent pas et sont plus économes. Ils acceptent la “goutte au nez” et n’achètent qu’une crème solaire pour cinq… Ils n’attrapent pas de crampes à patauger dans l’eau ni d’ampoules à marcher en tongs », ironise le préparateur.

Rapidité vaut mieux que spécialités

Les officines de montagne et de bord de mer ont chacune leurs spécificités. À la montagne, les fractures sont fréquentes. Le bord de mer est plus propice aux piqûres, brûlures, coups de soleil et indigestions de coquillages. En revanche, été comme hiver, les étrangers arrivent en foule. Parler anglais est un plus. Pas besoin cependant d’être un as de l’orthopédie ou de la dermo. Au besoin, les titulaires ou l’équipe permanente, formés à ces questions, prendront la relève. Les pharmacies les plus exigeantes prendront néanmoins le temps de former leur équipe en début de saison, comme la pharmacie des Menuires, à Courchevel (73). « J’ai été recruté une semaine avant le début de la saison pour apprendre les gammes de dermo-cosmétique, le vocabulaire anglais et les DCI », témoigne Alexandre. Quant aux ordonnances, elles se suivent et se ressemblent, et il faut aller vite. « On n’est pas là pour discuter ni pour écrire les posologies sur les boîtes, raconte Nicole. Nous servons dans la journée parfois cent fois la même ordonnance, mais les dosages varient. Il faut donc redoubler d’attention car les possibilités d’erreurs augmentent avec le rythme et la répétition des gestes. »

Le saisonnier doit aussi savoir gérer l’urgence. « La vue du sang ne me dérange pas », confie Valérie, préparatrice, et c’est tant mieux car les accidents de ski causent de sacrés dégâts. Le plus souvent, les vacanciers viendront plus facilement à la pharmacie qu’ils ne prendront rendez-vous chez le médecin. Au préparateur de réaliser les premiers soins, mais aussi de savoir passer la main ou de renvoyer le patient vers le médecin ou les urgences après une évaluation rapide de la situation. Là encore, des pharmacies prennent les devants. « J’ai été formée au diagnostic sur les premiers symptômes en début de saison par le médecin d’à côté et un laboratoire », indique Muriel, qui avait déjà des notions à son actif pour avoir travaillé six ans à proximité d’un hôpital.

Difficile cependant de convaincre certains patients des limites du conseil en vacances. « Une cliente avait un éclat dans l’œil et voyait une tache floue, se souvient Valérie. Je l’ai bien sûr envoyée consulter en lui précisant l’urgence. Je lui ai même dit qu’elle devrait choisir entre ses vacances et sa vue, mais rien n’y a fait. Il a fallu que mon collègue lui rabâche la même chose que moi pour qu’elle se décide à aller consulter. » Certains tiennent tête jusqu’au bout. Dans ce cas, après un examen et un bon conseil, Valérie délivre « le minimum autorisé sans ordonnance », en précisant « qu’il faudra consulter s’il n’y a pas d’amélioration dans les 48 heures ».

Se fondre dans le moule

Être un bon saisonnier est surtout question d’adaptation. « Le préparateur saisonnier doit être un peu caméléon », résume Nicole. Nouveaux clients, nouveau titulaire, nouveaux collègues… « Un bon relationnel est requis pour s’intégrer sans cesse à des environnements inédits, constate Serge. Il doit aussi pouvoir mémoriser l’agencement d’une pharmacie en 30 minutes, bien connaître son métier pour aller vite et pouvoir être opérationnel en deux jours. » Capacités d’adaptation rapide et débrouillardise s’avèrent impératives. « La plupart des clients n’ont pas tous leurs papiers sur eux. Il faut aller à la pêche aux informations sur les autres traitements en cours et se débrouiller », relève pour sa part Stéphanie Rouleau, préparatrice. Sur certains points, anticiper sur ses capacités d’adaptation est possible. Avant la prise de poste, il est de bon ton de questionner le titulaire sur son style de conseils, ses marques fétiches, et réviser. Une fois en poste, prendre des initiatives est un plus. « Je demande toujours où l’officine en est dans la gestion de ses périmés pour savoir ce qu’il faut vendre en priorité », précise ainsi Nicole.

Mais un tel investissement a un prix. Comme ailleurs, le taux horaire peut être négocié. « Je n’accepte rien en dessous de 14,50 € de l’heure, confie Nicole. Et il m’est arrivée de travailler pour 16 €. » Débrouillarde, expérimentée et calée en orthopédie, elle parle l’anglais technique et a aussi appris l’italien. Pour autant, « difficile de négocier quand une autre préparatrice propose ses services pour 10 € de l’heure », regrette-t-elle. De son coté, Valérie reconnaît qu’elle « n’a pas cherché à négocier son salaire car elle avait peu d’expérience ». En saison aussi, la loi du marché et de la concurrence fait son œuvre… Nicole a finalement trouvé sa parade. Elle se vend sur ce qu’elle sait faire lors de ses entretiens téléphoniques, par Skype, ou de visu, et n’aborde la question du salaire qu’à la fin. Au pied du mur, certains titulaires succombent, souvent après un délai de réflexion : « Ils me disent parfois non sur le moment, puis reviennent vers moi trois semaines plus tard », constate la préparatrice.

L’expérience en saison est bien vue. Elle est même essentielle aux yeux des titulaires, qui n’hésitent pas à se renseigner sur les candidats auprès de leurs employeurs précédents. « Quand on a l’habitude de changer souvent, on s’adapte plus vite », explique Stéphanie. Les titulaires veulent être en confiance : « Il serait compliqué de devoir remplacer un saisonnier en pleine saison, explique Jean Codacionni, titulaire à Porto-Vecchio (Corse du Sud). En même temps, il ne serait pas très correct de les faire venir de loin pour un essai… »

Reconnaissance et économies en plus

Après la saison, il n’est pas rare qu’un préparateur saisonnier ayant convaincu se voit proposer un nouveau contrat pour la saison prochaine. Avec parfois des avantages attractifs. « Ma titulaire m’a proposé un contrat prévoyant une rémunération au coefficient 330 pour l’hiver prochain », s’exclame Muriel, déjà augmentée deux fois au cours de son dernier contrat. La reconnaissance du patron est plus souvent au rendez-vous en saison, et des primes sont parfois spontanément versées en contrepartie du service rendu. D’ailleurs, si le contrat saisonnier ne donne pas droit à une prime de fin de contrat (voir p. 24), rien n’interdit de la négocier avec l’employeur. Ajoutez à cela des heures supplémentaires en masse, un temps libre restreint et la fatigue qui limite les sorties, et la saison devient un bon moyen d’accroître ses économies. D’autant que le logement est souvent fourni et gratuit, ou très avantageux.

Des liens se créent

Certes, les saisonniers doivent parfois partager un logement, mais « il y a toujours une très bonne ambiance en équipe de saison, assure Nicole. On n’est pas là pour évaluer, se piquer la place ou se tirer dans les pattes. Il n’y a pas de rivalité, rien que de l’entraide, de la sympathie et une superbe cohésion d’équipe ». Thomas Schmitt, titulaire à Avoriaz, confirme : « C’est comme une grande famille. Les saisonniers sont seuls au départ et passent la majeure partie de leur temps en équipe. Celle-ci devient leur noyau sécurisant et amical. » Valérie se souvient que son titulaire l’a « même invitée plusieurs fois chez lui avec sa famille ». Des amitiés se nouent. Muriel a ainsi créé des liens avec une pharmacienne et deux préparatrices saisonnières. Elles ont parcouru la Thaïlande ensemble au printemps dernier. Célibataire et sans pied-à-terre, la préparatrice s’est organisée et s’arrange toujours pour voyager entre deux saisons, six semaines au printemps et trois mois à l’automne. Des vacances qu’elle finance grâce à sa prime de congés payés perçue en fin de contrat et à ses économies. Sa prochaine étape en tant que saisonnière est la Polynésie. Son prochain objectif ? Parler anglais toute la journée ! Ce mode de vie aux défis variés lui plaît. Il est cependant difficilement compatible avec une vie de famille, reconnaît Stéphanie : « J’ai un copain depuis un an qui vit à Toulouse. On s’arrange pour voyager ensemble entre les saisons et quand je travaille, il vient régulièrement me voir. » Un équilibre pour le moins précaire, qui ralentit les projets de construction à deux. Mais Stéphanie n’a que 26 ans. Chaque chose en son temps…

témoignage

Valérie, 28 ans, préparatrice « Mon expérience en saison m’a décoincée »

Travailler en saison est une expérience géniale. Cela m’a ouvert sur le monde et aidé à couper le cordon avec ma région d’origine. On voit beaucoup de monde. Moi qui étais timide, j’ai pu développer mon bagout et mon sens commercial. On vit au quotidien avec une équipe souvent jeune, on s’aide, on se conseille… Les périodes de « rush » étaient compensées par des semaines plus calmes à 20 heures hebdomadaires, qui m’ont permis de visiter et de profiter de la région… Après un apprentissage difficile, cette expérience m’a donné le goût du métier car j’ai beaucoup appris. Depuis, je suis plus à l’aise en entretien d’embauche. Le fait de travailler en saison m’a donné confiance en moi. En un mot, mon expérience saisonnière m’a révélée.

Le travail saisonnier et la loi

Travailler quelques mois en station de ski, au bord de la mer ou près de grands sites touristiques vous tente ? Foncez, mais sans oublier le droit du travail. Petit tour législatif avant de faire vos valises.

Qui sont les pharmacies saisonnières ?

Celles soumises à des variations d’activité liées aux saisons. Notamment les pharmacies situées dans des zones touristiques de bord de mer ou à la montagne. De manière cyclique, périodique et prévisible, elles doivent absorber sur une période donnée une hausse importante du nombre de clients journaliers. Pour y faire face, elles sont dans la nécessité d’embaucher du personnel supplémentaire.

Info+ : il n’existe aucune définition légale du travail saisonnier. Selon la jurisprudence, « les travaux saisonniers sont ceux qui sont normalement amenés à se répéter chaque année, à date à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectif ». Il s’agit par exemple des saisons touristiques, thermales ou théâtrales.

Quel contrat de travail est adapté aux emplois saisonniers ?

Le code du travail ne prévoit pas de contrat spécifique à ces emplois. Puisqu’il s’agit d’une embauche par nature provisoire, il est possible d’avoir recours à un contrat de travail temporaire via une agence d’intérim ou de conclure un CDD. Le plus souvent, les entreprises choisissent cette dernière option, moins onéreuse.

Quel est le motif du CDD ?

L’embauche d’un saisonnier est un motif à part entière de recours au CDD. On parle de CDD saisonnier.

Quelle est la différence avec un CDD conclu « pour surcroît temporaire d’activité » ?

Un simple accroissement temporaire d’activité n’est pas forcément saisonnier s’il n’est pas périodique, cyclique et prévisible. L’employeur n’a pas le droit d’utiliser un CDD saisonnier alors qu’il doit faire face à un simple surcroît d’activité. En revanche, il peut conclure un CDD pour surcroît d’activité alors que son activité est saisonnière.

Cas pratique Un CDD saisonnier peut-il être conclu pour neuf mois ?

Non. Un CDD saisonnier peut être conclu de date à date ou pour la durée de la saison, sans dépasser une limite maximale fixée par l’administration à huit mois.

Info+ : si le contrat couvre plus des trois quarts de l’année et ne se répète pas à des dates à peu près fixes, on considère qu’il n’y a pas d’emploi saisonnier.

Cas pratique La pharmacie de la rue des Marchands à Avignon, dans le Vaucluse, connaît un pic d’affluence pendant le mois du festival. Le titulaire peut-il embaucher un préparateur supplémentaire en contrat saisonnier pour effectuer des tâches courantes ?

Même si c’est pour accomplir un travail qui existe toute l’année, il est possible d’embaucher un salarié en CDD saisonnier dès lors que l’entreprise doit absorber un accroissement significatif d’activité chaque année à la même période.

Info+ : en janvier 2012, la chambre sociale de la Cour de cassation a jugé que le recours au travail saisonnier est licite lorsqu’une entreprise doit, à un moment de l’année, faire face à l’afflux cyclique de touristes consommateurs entraînant une hausse substantielle de chiffre d’affaires.

Quelle différence entre le contrat d’un CDD saisonnier et celui pour surcroît temporaire d’activité ?

Le contrat est formalisé comme n’importe quel autre CDD. Les clauses obligatoires telles que la rémunération, le coefficient hiérarchique, etc., doivent y figurer. Parmi les clauses facultatives, l’employeur peut prévoir une période d’essai qui ne peut excéder deux semaines pour un CDD inférieur ou égal à six mois, ou un mois s’il est de plus de six mois.

Info+ : attention, avec un CDD saisonnier, l’indemnité de précarité n’est pas due au salarié, alors qu’elle doit être versée à l’issue d’un CDD pour surcroît d’activité.

Le salarié saisonnier doit-il être considéré comme les salariés permanents ?

Oui, il a les mêmes droits et les mêmes obligations que les autres, il relève d’ailleurs de la convention collective de la branche. Il exécute son travail dans des conditions identiques (durée du travail, repos hebdomadaire, jours fériés, etc.) et peut accéder aux mêmes équipements ou avantages collectifs.

La prime d’équipement est-elle versée ?

Seuls les salariés qui ont douze mois de présence ont droit à cette prime fixée à 68 € brut en 2013. Les saisonniers ne peuvent pas remplir cette condition. Sauf lorsqu’ils renouvellent plusieurs contrats saisonniers dans la même officine ; dans ce cas, les durées de tous les CDD saisonniers sont cumulées pour le calcul de l’ancienneté.

Info+ : un CDD saisonnier peut comporter une clause de reconduction pour la prochaine saison.

Cas pratique Bertrand a travaillé six mois à temps plein en CDD saisonnier. Combien a-t-il acquis d’heures de DIF ?

Le DIF est calculé au prorata de la durée du contrat. À temps plein, un salarié acquiert 24 heures de formation par an. Bertrand aura donc capitalisé 12 heures de DIF à l’issue de son contrat.

Info+ : le DIF est accessible dans les mêmes conditions que les autres salariés en CDD. Ainsi, il faut justifier de quatre mois en contrat saisonnier, consécutifs ou non, durant les douze derniers mois.

Quelle est la rémunération d’un saisonnier ?

La grille conventionnelle détermine le salaire minimum de tous les préparateurs, y compris les saisonniers. À chaque coefficient correspond un taux horaire de base. Il est évidemment possible de négocier une rémunération plus avantageuse.

Info+ : si le titulaire vous embauche à un coefficient 280 pour vous offrir un meilleur taux horaire, la prime d’ancienneté sera également calculée sur ce coefficient. S’il vous embauche au coefficient 230 mais vous paye à un taux horaire de 280, l’ancienneté sera calculée sur la base du 230, donc ce sera plus intéressant pour lui financièrement…

Cas pratique Laure, préparatrice, a effectué la saison d’hiver à Courchevel. Alors qu’elle débute dans le métier, le titulaire lui a attribué le coefficient 280. Fiches de paie à l’appui, pourra-t-elle exiger ce coefficient lors de sa prochaine embauche ?

Son futur employeur ne sera absolument pas tenu de lui accorder la promotion qui lui a été offerte dans son précédent emploi. La décision du premier employeur ne lie pas le second, dont la seule obligation est de rémunérer Laure à hauteur du coefficient correspondant à son expérience professionnelle, soit le coefficient 230. La jeune préparatrice pourra néanmoins utiliser ses fiches de paie pour négocier son salaire à l’embauche.

Cas pratique Jérôme est préparateur. Plutôt qu’un poste fixe, il préfère travailler comme saisonnier. Est-ce un frein à sa progression de carrière ?

L’évolution dans la classification des emplois est directement liée au nombre d’années de pratique professionnelle acquises dans une ou plusieurs pharmacies. Le changement d’entreprise ne fait pas obstacle à la progression vers le coefficient hiérarchique supérieur. En revanche, l’ancienneté est perdue puisqu’elle s’apprécie au sein d’une même entreprise.

Cas pratique « Pharmacie située à St-Tropez recrute pour la période estivale un préparateur/une préparatrice à temps plein. Salaire à négocier et logement fourni. »

La mise à disposition gratuite d’un bien permettant de faire l’économie de frais constitue un avantage en nature qui s’ajoute au salaire. Le montant de cet avantage, évalué selon un barème fixé par l’Urssaf, ne peut être retranché de la rémunération.

Info+ : le barème de l’Urssaf tient compte du nombre de pièces du logement et de la rémunération du salarié (voir sur www.urssaf.fr). Le montant de cet avantage est soumis à cotisations sociales, et imposable. Le salarié doit le déclarer.

Comment sont rémunérées les heures supplémentaires ?

Elles donnent lieu à un paiement majoré : 25 % de la 36e à la 43e heure incluse et 50 % au-delà de la 43e heure.

Cas pratique En haute saison, Antoine effectue régulièrement 45 heures par semaine. Est-ce légal ?

La durée de travail en pharmacie est plafonnée à 10 heures par jour ; 46 heures par semaine ; 44 heures par semaine en moyenne sur douze semaines consécutives.

Info+ : en cas de contrôle de l’inspection du travail, l’employeur risque une amende de 1 500 €.

Quelle est la durée du congé hebdomadaire ?

Il doit être au minimum d’un jour et demi, dont une demi-journée accolée au dimanche.

Info+ : en cas de travail exceptionnel un dimanche, le salarié doit bénéficier d’un repos compensateur d’égale durée.

Cas pratique Julie travaillera le 15 août. Son salaire sera-t-il majoré ?

Non. Le travail un jour férié, autre que le 1er mai, n’ouvre droit à aucune majoration de salaire. En contrepartie, la convention collective prévoit un repos compensateur d’égale durée.

Quel est le droit à congés payés ? En CDD saisonnier, le salarié acquiert 2,5 jours ouvrables de congés par mois de travail. Soit les jours de congés sont soldés au cours de l’exécution du contrat, soit ils sont payés sous forme d’une indemnité compensatrice égale au dixième de la rémunération totale brute perçue.

Fabienne Rizos-Vignal