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Quand la vue baisse…
S’adapter aux déficiences visuelles.
Les handicaps de la vue gagnent du terrain avec l’allongement de la durée de vie. Voici des règles pour optimiser l’accueil et sécuriser la délivrance.
Distinguer les déficiences
Les degrés du handicap
Le handicap visuel revêt des réalités plus larges que la cécité. Un malvoyant est une personne dont la déficience visuelle entraîne une incapacité dans l’exécution d’activités telles que la lecture, l’écriture, les déplacements(1)… Environ 3 millions de Français en souffrent à divers degrés. La plupart des déficiences sont liées à des maladies oculaires et acquises à l’âge adulte, vieillesse notamment.
Des difficultés spécifiques
Certaines pathologies atteignent la vision centrale ou précise (dégénérescence maculaire liée à l’âge, DMLA), les patients sont alors contrariés pour lire ou reconnaître des visages. D’autres touchent la vision périphérique, telles les rétinites pigmentaires, où le patient, qui voit comme dans un tube, est gêné pour ses déplacements. Des atteintes globales sont possibles avec une vision floue (cataracte…) ou parsemée de taches (glaucome).
Mon patient est-il malvoyant ?
Certains signes trahissent le handicap :
– une manière inhabituelle de regarder en face, la tête tournée sur le côté ;
– une maladresse qui s’accentue ;
– des vêtements tachés chez une personne habituellement soignée ;
– la recherche continuelle des effets personnels égarés, le recours à des loupes ;
– un changement de comportement ; irritabilité, agressivité ou renfermement sont des réactions fréquentes au handicap.
Si vous avez des doutes sur les capacités visuelles d’un client, osez dire : « Avez-vous des difficultés pour bien voir ? »
Adapter l’accueil
Aider n’est pas assister
Les malvoyants compensent le handicap par des moyens d’adaptation consistant à développer l’ouïe, le toucher, la mémoire, l’organisation… Le maintien d’une autonomie la plus complète possible est une préoccupation à respecter et encourager :
– n’assistez pas le patient à outrance, a fortiori s’il n’en émet pas le désir ;
– proposez, mais n’imposez pas votre aide et sondez ses limites : « Puis-je vous aider et de quelle façon ? » Ne vous offusquez pas si la réponse et négative ;
– adressez-vous directement au patient et non à un éventuel accompagnateur.
Parlez !
Faute de communication visuelle, la parole doit prendre le dessus :
– captez l’attention de la personne en l’appelant par son nom dès son arrivée ;
– présentez-vous en précisant votre nom et votre fonction : « Je suis Véronique, la préparatrice ». Certains peuvent ne pas vous reconnaître ou lire votre badge ;
– signalez-lui une éventuelle attente et sa place dans la file – « Je finis avec madame et je viens vers vous juste après » – et les faits exceptionnels qui pourraient la gêner : « Nous avons mis un nouveau présentoir juste devant vous… »
Guidez sans diriger
Si vous devez guider la personne lors d’un déplacement, respectez quelques règles :
– prendre son bras du côté opposé à celui qui tient, le cas échéant, une canne ou un chien ;
– ne poussez pas vers l’avant, mais précédez la personne ;
– énoncez la présence d’obstacles et les changements de direction, sans pour autant vous arrêter : « On va monter une marche, contourner un meuble… » ;
– devant un escalier, guidez sa main vers la rampe ; annoncez la première et la dernière marche.
Décomplexez
Face au handicap, certains sont inhibés par la peur de mal faire ou de « gaffer ». Voici quelques conseils :
– relaxez-vous, restez naturel ;
– n’ignorez pas le handicap ; en parler permet souvent de détendre la relation ;
– ne craignez pas les mots relatifs à la vision (voir, regarder…) ; les malvoyants les emploient même s’ils « voient » un objet avec leurs mains ou un film avec leurs oreilles ;
– ne prenez pas à votre compte une réaction d’irritabilité ; elle naît souvent de la frustration liée au handicap.
Sécuriser la délivrance
Sous les sunlights
Une forte luminosité aide à la perception des contrastes et des détails. Placez-vous en pleine lumière. Ajoutez si besoin une lampe d’appoint et un fond noir sur le comptoir pour accentuer les contrastes.
Une chose, une place
Évitez de ranger l’ordonnance ou la carte Vitale pour rendre service. Laissez faire le patient, dont l’organisation est un point de repère important ; pour lui, une carte mal rangée sera introuvable… Dans le cas contraire, indiquez-le systématiquement : « Je remets l’ordonnance dans la pochette face à la carte de mutuelle… »
Je dis, je fais
> Joignez le geste à la parole. Énoncez chaque étape : « Je lis votre ordonnance », « J’insère votre carte Vitale… » N’oubliez pas de dire que vous vous absentez pour éviter que le patient ne parle seul.
> Reprenez à l’oral chaque ligne de traitement en prenant pour support explicatif la boîte et non l’ordonnance ; laissez au patient la possibilité de la manipuler.
> Décrire et manipuler. Accompagnez le nom des médicaments d’une description physique : « la grosse boîte », « les gélules », « le comprimé ovale »…
Dès que possible, en cas de nouveau traitement notamment, faites une démonstration de manipulation : pipette, inhalateur… ; proposez au patient d’en faire de même devant vous.
Comme un bœuf
Marquez, balisez, grossissez, autant que vous pouvez… Peu de malvoyants lisent le braille sur les conditionnements – obligatoire depuis 2008. Dans les autres cas, et selon le degré de handicap, trouvez les moyens pour distinguer les boîtages et éviter les erreurs :
– mettre à disposition une loupe à fort grossissement ;
– des codes couleur (gommettes, feutres…) ou des repères tactiles (trombones, élastiques, feutrine, Velcro autocollant…) afin d’identifier les médicaments et le nombre de prises ;
– recopier l’ordonnance en très grosses lettres capitales en y reportant les éventuels codes couleur ;
– conseiller un pilulier, de préférence pourvu de repérages en relief (exemple : Pilbox Classic) ou dissymétrique, qui évite les confusions (exemple : Anabox).
Gaffe aux génériques
Aucune disposition ne dispense les malvoyants du dispositif tiers payant contre génériques.
Essayez tant que possible de substituer un seul produit à la fois. Délivrez toujours le même générique. Agrafez ancien et nouveau conditionnements jusqu’à mémorisation.
Recourir aux outils spécifiques
Notices des médicaments
Depuis 2008, tous les laboratoires sont tenus de mettre à disposition des notices de leurs médicaments adaptées aux déficiences visuelles. L’association HandicapZéro(2) propose gratuitement plus de 4 000 notices en braille, caractères agrandis ou au format audio via le site www.pharmabraille.fr ou le numéro vert 0 800 39 39 51.
Aides techniques
De nombreuses aides sont disponibles pour améliorer leur suivi médical : thermomètre à synthèse vocale, montre ou pilulier avec alarmes de prise… Pour répondre aux différents besoins, consultez le site de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA, www.aides-techniques-cnsa.fr) ou des Centres d’information et de conseil sur les aides techniques (Cicat, www.handicat.com).
(1) Définition de la malvoyance, Union européenne des aveugles, Athènes, novembre 2003.
(2) Association Handicapzéro, 160, rue Montmartre, 75002 Paris, www.handicapzero.org
Six erreurs à éviter
1. Donner des indications purement visuelles. « Par ici », « Là-bas », « Un peu plus loin »… n’ont pas de sens pour un malvoyant. Guidez la personne, donnez-lui des repères connus ou utilisez les aiguilles d’une montre : « Le présentoir est à 2 mètres environ, à 10 heures… »
2. Parler fort. Malvoyant ne signifie pas surdité ou incapacité mentale ! Refrénez le réflexe naturel de parler fort et lentement.
3. Cajoler un chien-guide. Il est en train de travailler, le caresser pourrait le distraire et gêner sa mission.
4. Présenter un siège sans contact. La personne risquerait de s’asseoir à côté. Guider toujours la main du malvoyant sur le dossier pour qu’il en mesure la position.
5. Penser qu’écrire c’est bien voir. L’écriture à la main est une activité « mémoire » non entravée par la baisse de la vision. Un malvoyant peut donc écrire très bien.
6. Négliger son affichage. Comme l’ordre des pharmaciens l’impose(1), l’affichage des prix à l’officine doit être de taille et de contraste suffisants pour être lu par des malvoyants.
(1) Recommandations pour l’aménagement des locaux de l’officine, Ordre des pharmaciens, 2013.
En savoir plus
– Quand la malvoyance s’installe, guide pratique à l’usage des adultes et de leur entourage, Inpes-Fondation de France, 2012.
– Pas cela… ceci, pour un contact heureux avec les personnes aveugles, édition en français réalisée par l’association Valentin Haüy, juin 2012.
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