Droit du travail à la sauce officinale

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Droit du travail à la sauce officinale

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Publié le 30 octobre 2015
Par Annabelle Alix
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S’il est respecté dans ses grandes lignes, le droit du travail à l’officine est le plus souvent modulé par les titulaires, quand il n’est pas improvisé. Connaître ses droits et les faire respecter en toute clarté est possible. Nos conseils pour dialoguer sereinement et inverser la situation.

« Comment les congés payés sont-ils décomptés ? », « Je me marie, à combien de jours de repos ai-je droit ? », « Mon salaire est-il maintenu en cas d’arrêt de travail ? »… Les questions sur le droit du travail foisonnent sur les pages Facebook de préparateurs.
Au point de se demander si la convention collective est accessible en pharmacie… Et si elle est appliquée.
Si ses grandes lignes sont respectées, les subtilités du droit du travail cèdent en revanche la place au traditionnel « lien de confiance », fait d’arrangements réciproques et de compromis informels bien connus des entreprises familiales du XIXe siècle. Le Code du travail et la convention collective ont pourtant vocation à équilibrer les relations de travail, et leur application n’est pas facultative.
« Tant que le salaire est versé à l’heure, que le temps de travail est respecté et que les cinq semaines de congés payés sont accordées dans l’année », Calogero fait l’impasse sur les heures supplémentaires non majorées ou sur les deux jours de repos normalement prévus lorsqu’il prend ses congés en dehors de la période estivale. « On reste dans le non-dit pour ne pas détériorer les rapports, explique ce préparateur de 33 ans. Nous sommes déjà suffisamment sous pression et la bonne ambiance de travail n’est pas si évidente à obtenir, il faut savoir être conciliant ».

Un équilibre donnant-donnant
Il faudrait donc comprendre qu’à l’officine, dans la mesure du « raisonnable » – chacun appréciera –, certains droits doivent être sacrifiés en échange de rapports cordiaux et de certains arrangements informels. « Mon titulaire a déjà décalé mes horaires pour que je puisse assister à une réunion parents-professeurs, témoigne ainsi David Coudert, pharmacien remplaçant de 47 ans. La relation entre employeur et salarié, c’est du donnant-donnant, il faut l’envisager dans son ensemble ! » Et de comparer le travail en officine à la vie privée : « Dans un couple, ce n’est pas un détail qui nous fait partir, c’est la situation globale et son équilibre qui ne nous conviennent plus. C’est la même chose à la pharmacie. Pour s’en aller, il faut que l’effort se fasse toujours dans le même sens, qu’on ait la sensation d’être finalement pris pour un imbécile. »
Une application du droit du travail à géométrie variable en fonction de l’ambiance et des facilités quotidiennes, telle serait donc la règle. Et le titulaire tiendrait fermement les rênes de ce fragile équilibre. La demande de trop, aussi légitime soit-elle au regard du droit, pourrait tout faire basculer. Le salarié devrait alors renoncer aux facilités les plus élémentaires.

Attention aux abus

« Si vous souhaitez chercher la petite bête, nous allons faire le point sur tous vos avantages, il y a des choses qui vont sauter ! », s’est vue répondre un jour Marie, adjointe, alors qu’elle questionnait son titulaire sur les deux jours de repos supplémentaires auxquels son ancienneté lui donnait droit.

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À lire dans Porphyre n° 517 de novembre 2015