Biosimilaires : ce qu’attendent les patients de la substitution

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Biosimilaires : ce qu’attendent les patients de la substitution

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Publié le 31 juillet 2025
Par Matthieu Vandendriessche
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Avec l’intégration de sept groupes supplémentaires de médicaments biologiques, la substitution progresse. Mais, pour les patients, il ne s’agit pas simplement de changer de molécule : ils souhaitent recevoir des explications précises et compréhensibles concernant leur traitement.                                     

Le top départ pour la substitution par un biosimilaire a été donné pour sept nouveaux groupes de médicaments biologiques en février dernier. Si les taux de substitution varient encore fortement selon les molécules, une marche à suivre a été précisée, censée garantir un accompagnement adapté des patients pour pouvoir répondre à leurs préoccupations. Voici trois exigences majeures et les moyens de les satisfaire.

Avoir confiance dans leurs professionnels de santé

Selon l’arrêté du 20 février 2025 publié au Journal officiel du 27 février 2025, le prescripteur doit informer le patient de la possibilité d’une substitution par un biosimilaire en officine. Déjà ouverts à la prescription de ces médicaments, un grand nombre de médecins hospitaliers ne devraient pas se montrer opposés à cette substitution. «Si nous-mêmes, nous ne sommes pas convaincus que le biosimilaire n’est pas un sous-médicament, nous aurons du mal à faire passer un message positif auprès du patient», estime toutefois Alain Toledano, cancérologue et radiothérapeute au centre Hartmann (Hauts-de-Seine). Selon l’arrêté ministériel, le pharmacien doit informer le prescripteur du médicament qui a été dispensé, par exemple au moyen d’une messagerie sécurisée. «Cette information devrait aussi être transmise à l’infirmière qui va pratiquer l’injection », considère Mehdi Djilani, titulaire à Saint-Pierre-d’Oléron (Charente-Maritime), responsable des relations extérieures du groupement Totum Pharmaciens et initiateur du site de référence biomedinfo.fr. Dans le meilleur des cas, le médecin prescrit un biomédicament et, ne s’opposant pas à la substitution, il confie au pharmacien le soin de faire choisir au patient la référence qui lui convient le mieux en particulier du point de vue de ses modalités d’emploi. «Il y a une décision partagée sur le traitement avec le prescripteur qui peut ainsi être remise en cause par le pharmacien, considère Sonia Tropé, directrice de l’Association nationale de défense contre l’arthrite rhumatoïde (Andar). Lorsque le médecin a réussi à équilibrer une maladie grave et qu’il oriente le patient vers une substitution de ce traitement, cela peut remettre en cause la confiance qu’il lui porte.» Et cette perte de confiance peut aussi rejaillir sur l’officine. Au bout du compte, la représentante des patients leur livre ce message : «La substitution est possible mais vous n’êtes pas obligé de l’accepter. Il y a la prise de risque d’une efficacité moindre, de la survenue d’effets indésirables et aussi d’une rupture dans l’adhésion thérapeutique.» Pour le patient, qui reste le coordonnateur de son traitement, un temps d’acceptation et d’adaptation au biosimilaire peut être nécessaire. Il est aussi possible de revenir à la spécialité initialement délivrée si nécessaire.

Cerner l’intérêt des biosimilaires

Dans leur majorité, les patients comprennent l’intérêt économique de la démarche. «C’est le seul intérêt et il est crucial dans le contexte actuel, pointe Sonia Tropé. Mais en lui exposant, il peut y avoir une culpabilité du patient à coûter cher au système de santé. Et si, finalement, il ne prend pas son médicament, le bénéfice économique n’existe plus.» Selon Stéphane Mouly, professeur en médecine interne et pharmacologue, «il faut substituer les biomédicaments pour que tous les malades puissent continuer à être traités. La dimension économique est majeure mais elle ne se substitue pas à l’efficacité et à la sécurité des produits qui ont été démontrées.» En pratique, le pharmacien doit expliquer les modalités de la substitution et mentionner le nom du médicament dispensé sur l’ordonnance. «Les termes de biosimilaire et de biothérapie sont techniques et ils sont mal connus des usagers et des patients», rappelait Françoise Alliot-Launois, présidente de l’Association française de lutte antirhumatismale (Aflar), lors d’un webinaire organisé l’automne dernier*. Selon une récente enquête en ligne menée par cette association (432 répondants), 8 patients sur 10 seraient d’accord pour recevoir un biosimilaire sur proposition des professionnels de santé et après explication. Une même proportion de patients juge que ces médicaments ont des effets identiques à la biothérapie et que leur pharmacien a une bonne connaissance de leur traitement. De son côté, Sonia Tropé relève que pour les thérapies de la polyarthrite rhumatoïde peu de pharmaciens demandent l’accord pour substituer et donnent des explications qui, souvent, ne sont pas claires pour les personnes concernées. Il convient de les informer correctement et de les rassurer. «Un médicament biosimilaire doit faire ses preuves lors des essais cliniques mais aussi en vie réelle dans le cadre d’un plan de gestion des risques (PGR), argumente Stéphane Mouly. Les rapports de pharmacovigilance ont démontré l’absence d’effets immunogéniques, c’est-à-dire inducteurs d’anticorps, qui seraient supérieurs avec les biosimilaires par rapport aux produits biologiques de référence.» Selon cet expert, «tous les patients qui sont diagnostiqués et déjà traités par des produits biologiques peuvent recevoir leur équivalent biosimilaire sans augmenter le risque de perte d’efficacité et de réaction immunitaire». La substitution est ainsi possible en instauration et en cours de traitement. Cependant, préconise Mehdi Djilani, mieux vaut amorcer la pratique de la substitution dans les situations les plus simples, soit lorsque le patient reçoit un traitement pour la première fois.

Taux de pénétration des biosimilaires substituables en 2025

Pegfilgrastim : 90 %

Filgrastim : 96 %

Ranibizumab : 6 %

Adalimumab : 58 %

Énoxaparine : 21 %

Époétine : 88 %

Étanercept : 58 %

Follitropine alfa : 71 %

Tériparatide : 69 %

Source : Iqvia, données sell-out en 2024.

Savoir comment utiliser ces médicaments

Les médicaments biologiques sont essentiellement administrés par voie injectable. Ils sont disponibles sous forme de seringue ou de stylo autoinjectable. « Le passage à un biosimilaire, ce n’est pas rien pour un patient. Parce qu’un changement de médicament, cela peut renvoyer à une aggravation de la maladie et cela fait parfois appel à un système d’administration plus complexe», souligne Sonia Tropé. Pharmaciens et patients sont en attente de dispositifs d’injection de démonstration qui doivent être fournis par les laboratoires. Leur ergonomie et leurs différences avec le biomédicament de référence sera plus facilement exposée au patient. Dans cet apprentissage, celui-ci doit se familiariser avec la fenêtre de visualisation des doses et la notion de dose unique ou ajustable. Ces explications peuvent être données, si besoin, dans un espace confidentiel, mais Mehdi Djilani n’est pas favorable à l’instauration d’un entretien conventionné spécifique à la substitution par les biosimilaires, qui pourrait alourdir et complexifier la démarche.

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* Webinaire proposé le 17 septembre 2024 et disponible en replay sur le site de l’Observatoire national des médicaments biosimilaires.