Mobilisation générale contre l’ostéoporose

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Publié le 3 novembre 2001
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L’ostéoporose a été déclarée par l’OMS cause prioritaire pour les dix années à venir. La prévalence et les conséquences de cette pathologie silencieuse, en termes de qualité et d’espérance de vie, rendent nécessaire une mobilisation de tous les professionnels de santé, y compris les pharmaciens. Prévention et dépistage sont les mots d’ordre.

En France, 2,8 millions de femmes ménopausées souffrent d’ostéoporose : 30 % à 50 ans et 50 % après 60 ans. Les hommes de plus de 50 ans (13 %) sont eux aussi atteints, mais dans une moindre proportion. L’ostéoporose est à l’origine de fractures vertébrales (2 millions de femmes) et de fractures du col du fémur (40 000 femmes chaque année). Un nombre qui gonflera fortement dans les années à venir du fait de l’augmentation de la durée de vie.

L’ostéoporose n’est pas un processus de vieillissement normal : c’est une pathologie. Mais elle est silencieuse, comme l’hypertension artérielle ou l’hypercholestérolémie. « Un tiers des patientes souffrant d’ostéoporose n’ont jamais entendu parler de la maladie mais 85 % déclarent qu’elles auraient adopté des mesures préventives si elles avaient été informées », décompte le Pr Patrice Fardellone, membre du Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses (GRIO)(1).

Prévention, dépistage, bon usage du médicament…, les domaines d’intervention du pharmacien sont multiples. Il doit expliquer l’importance d’un régime équilibré, d’une activité physique raisonnable, d’une abstinence vis-à-vis des drogues, du tabac, de l’alcool. Il faut aussi insister, chez les plus de 60 ans, sur la nécessité d’un régime suffisant en protéines, calcium et vitamine D et d’une activité physique. « Le CESSPF soutient le pharmacien dans cette démarche avec deux fiches techniques », explique le Pr Claude Dreux, président du CESSPF (Comité d’éducation sanitaire et sociale de la pharmacie française). L’intérêt d’un traitement hormonal substitutif à la ménopause et les risques liés à une corticothérapie prolongée aussi ne doivent pas être oubliés.

La prévention des chutes prend toute son importance à mesure que l’âge avance. Les chutes constituent en effet la première cause d’accident chez les personnes âgées. Elles peuvent entraîner une fracture en cas de fragilité osseuse, conduisant généralement à une hospitalisation et à une immobilisation prolongée. Au pharmacien de délivrer des conseils (semelles antidérapantes, aménager l’habitat…) et de détecter certains facteurs de risque (médicaments altérant la vigilance, troubles sensoriels ou neurologiques devant mener vers une consultation spécialisée, lunettes inadaptées…).

A l’officine, il est possible de repérer les personnes à risque et les patientes atteintes d’ostéoporose non traitée. « Pensez à l’ostéoporose face à une patiente dont le dos a un aspect en bosse de bison ou dont la taille a notablement diminué », conseille le Pr Jean-Yves Reginster, secrétaire général de l’International Osteoporosis Foundation (IOF)(2). Autres situations d’alerte : les facteurs de risque (ménopause précoce, apports calciques faibles, corticostéroïdes au long cours, etc.), la survenue d’une fracture du poignet, d’un tassement vertébral. Les antécédents de fracture sont un bon facteur prédictif. « Une femme qui a déjà fait une fracture a 50 % de chances d’en faire une seconde liée à l’ostéoporose », précise le Pr Jean Puget du GRIO.

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Priorité au dépistage grâce à l’ostéodensitométrie

L’ostéodensitométrie mesure la densité minérale osseuse et permet de quantifier le risque de fracture. Totalement ou partiellement remboursée dans quatorze pays européens, elle ne l’est pas encore en France (son prix varie de 180 à 1 500 F). Elle permet pourtant une prise en charge précoce de l’ostéoporose, notamment chez les femmes ménopausées. La CNAM vient de lancer une étude pour évaluer son efficacité pour le dépistage dans les risques de fracture. Résultats dans quatre ans ! Tous les spécialistes militent pourtant pour le remboursement de l’ostéodensitométrie aux femmes ménopausées à risque et à celles de plus de 65 ans (près de 50 % des fractures).

« En France, nous disposons d’un outil de diagnostic (la densitométrie minérale osseuse) et de thérapeutiques mais nous ne pouvons pas les utiliser en l’absence de remboursement ! On est face à une maladie que l’on ne traite qu’en cas de complications ! », s’insurge le Dr Limouzin-Lamothe, présidente de l’Association des femmes contre l’ostéoporose. En effet, les médicaments ne sont pris en charge qu’après fracture. Or il faudrait traiter dès le diagnostic posé.

Dans le traitement curatif, les biphosphonates et le raloxifène sont remboursés dans l’ostéoporose postménopausique sévère avec au moins une fracture ostéoporotique.

Les traitements hormonaux substitutifs (THS), les biphosphonates, les SERM (selective estrogen receptor modulator) avec le raloxifène bénéficient d’une indication dans la prévention de l’ostéoporose postménopausique.

Pour être efficaces, les traitements doivent être pris pendant de nombreuses années. Il est alors nécessaire de bien expliquer les modalités de prise à respecter afin de limiter les effets indésirables et d’optimiser l’observance. « Il faut convaincre les femmes ménopausées de l’intérêt d’un THS bien suivi pendant plusieurs années et s’assurer d’une surveillance médicale régulière », insiste Claude Dreux. Par ailleurs, tous les biphosphonates par voie orale présentent une faible absorption digestive, ce qui impose une prise à jeun ou à distance de tout aliment.

Des brochures peuvent accompagner le conseil : prévenir et agir à tout âge, l’alimentation des personnes âgées, le calcium et la femme, aménager sa maison pour éviter les chutes, etc. Elles sont disponibles auprès du CESSPF. L’Ordre a profité de la Journée mondiale de l’ostéoporose, le 20 octobre, pour accueillir une exposition du Palais de la Découverte, « L’os vivant », dont sont tirées les illustrations de cet article. Le CESSPF a également constitué un groupe de travail dont l’objectif est de mettre en place un programme de formation. Animé par le Pr Pierre Delmas, président de l’IOF, il réunit, aux côtés du CESSPF, l’UTIP et des laboratoires concernés par la lutte contre l’ostéoporose. En 2002, des réunions devraient ainsi être organisées par l’UTIP dans une trentaine de villes.

(1) GRIO : http://www.osteoporose-grio.com. Tél. : 01 58 41 25 84.

(2) IOF : http://www.osteofound.org. Tél. : 04 72 91 41 77.

Exposition L’os est vivant : il faut le nourrir !

Le CERIN (Centre de recherche et d’information nutritionnelles) invite à un « Voyage au centre de l’os » à la Cité des sciences et de l’industrie. Cette exposition très documentée propose un large panorama sur l’os (découverte du squelette, comment l’os se répare, etc.) et sur le rôle du calcium dans le corps humain. A quel âge a-t-on fini son squelette ?

Comment acquérir de bons os pour toute la vie ? Peut-on prévenir l’ostéoporose ? Etes-vous une femme à risque ? A l’aide de nombreux panneaux graphiques et vidéos, l’exposition du CERIN répond aux multiples questions que tout un chacun se pose ou devrait absolument se poser sur la façon de préserver son capital osseux. Elle fait la part belle au calcium de l’alimentation (le calcium laitier est irremplaçable, l’équilibre alimentaire au quotidien…), à son rôle à chaque âge de la vie. Des bornes interactives sur le thème « Faites le plein de calcium » permettent d’évaluer sa consommation sous forme de tests. Le pharmacien puisera dans cette exposition une manière simple de sensibiliser et d’informer ses clients sur le rôle de l’alimentation, et du calcium en particulier, dans la construction du squelette et la prévention de l’ostéoporose.

Jusqu’au 21 novembre 2001. Cité des sciences et de l’industrie, 30, avenue Corentin-Cariou, 75019 Paris.