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Les dyslipidémies
l’essentiel Les dyslipidémies ont des signes cliniques souvent si discrets qu’ils rendent essentiels le dépistage biologique. Ces anomalies lipidiques peuvent évoluer vers une athérosclérose, elle-même responsable de la survenue de maladies cardiovasculaires qui ne sont rien de moins que la première cause de mortalité dans les pays riches. Ces pathologies sont favorisées par de nombreux facteurs de risque associés, parmi lesquels l’âge, le tabagisme, le diabète ou l’hypertension artérielle. Le traitement des dyslipidémies repose sur des règles diététiques rigoureuses. Lorsqu’elles sont insuffisantes, s’ajoutent des molécules. Statines, fibrates, colestyramine, ézétimibe et même acides gras de la famille des oméga-3 sont en charge de modifier les concentrations plasmatiques du cholestérol total, du HDL-cholestérol, du LDL-cholestérol et des triglycérides. Attention aux interactions médicamenteuses !
ORDONNANCE : Une patiente souffrant d’une hypercholestérolémie
Madame Thérèse D., 72 ans, est traitée pour une hypercholestérolémie. Elle arrive à la pharmacie, l’air préoccupé, avec une ordonnance rédigée par son cardiologue.
Elle comprend deux hypocholestérolémiants, Tahor et Ezetrol, et une association antih ypertensive (Hytacand).
LES PRESCRIPTIONS
Docteur Jean Durand
Cardiologue
2, place du Marché
94130 Nogent-sur-Marne
Tél. : 01 41 29 75 78
94 3 99999 8
Le 2 janvier 2006
Mme Thérèse D.
72 ans
Tahor 40 mg : 1 cp par jour
Tahor 20 mg : 1 cp par jour
Ezetrol : 1 cp par jour
Hytacand : 1 cp par jour
Traitement pour 4 semaines
LE CAS
Ce que vous savez de la patiente
– Madame D. était jusqu’à présent traitée pour une hypercholestérolémie familiale sévère par Tahor 80 et pour une HTA par Hytacand. Elle a « hérité » du cholestérol de ses parents décédés. Elle a déjà pris du Questran mais a dû arrêter à cause d’une mauvaise tolérance. Elle n’a jamais fumé et ne fait pas d’excès alimentaire.
Ses analyses biologiques
– Cholestérol total : 6,17 mmol/l (2,39 g/l)
– Triglycérides : 1,40 mmol/l (1,22 g/l)
– HDL cholestérol : 1,43 mmol/l (0,55 g/l)
– LDL cholestérol : 4,09 mmol/l (1,60 g/l)
– Les enzymes musculaires et le bilan hépatique sont normaux.
Ce que le cardiologue lui a dit
Au regard de l’analyse, Tahor 80 mg ne suffit plus à normaliser son bilan lipidique. Le cholestérol est trop élevé compte tenu des facteurs de risque : antécédents familiaux, plus de 60 ans et HTA. Madame D. va prendre Ezetrol, pour atteindre la valeur cible de LDL cholestérol de 1,3 g/l soit 3,4 mmol/l. Il décide aussi de diminuer la dose de Tahor à 60 mg/jour.
Ce dont la patiente se plaint
Elle se plaint de douleurs musculaires et demande si son nouveau traitement ne va pas les aggraver.
DÉTECTION DES INTERACTIONS
Cette ordonnance ne comporte pas d’interactions médicamenteuses délétère. L’association à doses fixes candésartan/hydrochlorothiazide résulte d’une interaction positive puisqu’il existe une synergie d’action entre ces deux molécules d’actions pharmacologiques différentes.
ANALYSE DES POSOLOGIES
Les médicaments de l’ordonnance sont prescrits à des posologies conformes aux AMM.
Le médecin n’a pas précisé le dosage d’Hytacand. À la question « le médecin a -t-il modifié votre traitement contre la tension ? », la réponse est non. L’historique de la patiente montre qu’elle prend d’habitude le dosage à 8 mg de candésartan (et non à 16). Il est donc une nouvelle fois dispensé.
Pour Tahor, les comprimés à 20 et 40 mg sont à prendre en même temps.
AVIS PHARMACEUTIQUE
Face à une dose maximale de 80 mg par jour d’atorvastatine qui ne permet pas d’atteindre la valeur cible de LDL cholestérol de 3,4 mmol/l (1,3 g/l) recherchée chez Thérèse D. (selon les recommandations concernant la prise en charge thérapeutique du patient dyslipidémique, AFSSAPS mars 2005), quatre alternatives se présentent au prescripteur.
-#gt; L’association au fénofibrate, alternative discutable puisque les triglycérides (TG) sont normaux. Le seul intérêt serait de porter la valeur du HDL cholestérol à un niveau supérieur ou égal à 0,60 g/l (facteur protecteur) mais ceci ne justifie pas de prendre le risque de l’association (risque de rhabdomyolyse).
-#gt; L’association à la colestyramine, qui permettrait une diminution supplémentaire du cholestérol total et du LDL mais qui ne modifierait pas les taux de HDL et risquerait d’augmenter le taux de TG. De plus, une précédente tentative d’instauration de Questran s’est soldée par un échec dû à une mauvaise tolérance digestive.
-#gt; Le recours à la rosuvastatine qui a montré une légère supériorité sur l’abaissement du LDL cholestérol par rapport aux autres statines aux doses maximales, mais dont le manque de preuves sur la mortalité limite l’utilisation.
-#gt; L’association à l’ézétimibe, premier représentant d’une nouvelle classe d’hypolipémiants qui inhibent sélectivement l’absorption du cholestérol. Dans l’hypercholestérolémie primaire, l’ézétimibe a significativement réduit, comparativement au placebo, le cholestérol total (13 %), le LDL cholestérol (19 %), les TG (8 %) et a augmenté le HDL cholestérol (3 %).
Compte tenu du bilan lipidique (LDL haut, TG normaux, HDL à augmenter), du manque de recul sur l’utilisation de la rosuvastatine, du risque potentiel accru de rhabdomyolyse en cas d’association à un fibrate et enfin de la synergie d’action attendue lors de l’association atorvastatine/ézétimibe, l’ajout d’Ezetrol semble être la meilleure solution.
– Pourquoi diminuer la dose d’atorvastatine ?
Plusieurs études ont montré que l’ajout de 10 mg par jour d’ézétimibe à 80 mg par jour d’atorvastatine permettait une réduction supplémentaire de 7 % à 21 % du LDL par rapport à une monothérapie par 80 mg d’atorvastatine. La tolérance de l’association est comparable à celle des statines administrées isolément. De ce fait, la diminution de dose d’atorvastatine à 60 mg par jour reflète un geste de précaution de la part du prescripteur. Après quelques mois de traitement associant 10 mg d’Ezetrol et 60 mg de Tahor, en fonction de la cholestérolémie et des objectifs à atteindre, une augmentation de dose de Tahor à 80 mg sera toujours possible pour abaisser encore le LDL-Cholestérol si nécessaire.
VALIDATION DU CHOIX DES MÉDICAMENTS
-#gt; Tahor (atorvastatine)
– Hypocholestérolémiant inhibiteur de l’HMG Co-A réductase.
– Indiqué dans la réduction des hypercholestérolémies pures ou mixtes, en complément d’un régime adapté et assidu ; dans le traitement des hypercholestérolémies familiales homozygotes, en addition à d’autres traitements hypolipémiants et dans la réduction des événements coronaires chez des patients hypertendus traités avec trois facteurs de risque en prévention primaire avec ou sans hyperlipidémie associée.
– La posologie initiale de cette statine est de 10 mg par jour et la dose maximale de 80 mg par jour.
-#gt; Ezetrol (ézétimibe)
– Inhibiteur de l’absorption intestinale du cholestérol.
– Indiqué dans le traitement des hypercholestérolémies primaires, en association avec une statine ou seul.
Autres indications : les hypercholestérolémies familiales homozygotes en association avec une statine et le traitement adjuvant au régime chez les patients ayant une sitostérolémie familiale homozygote.
– La posologie est de un comprimé à 10 mg par jour.
-#gt; Hytacand (candésartan/hydrochlorothiazide)
– Association d’un antagoniste de l’angiotensine II, le candésartan et d’un diurétique thiazidique, l’hydrochlorothiazide.
– Indiqué dans le traitement de l’hypertension artérielle essentielle.
– La posologie usuelle est de un comprimé par jour, de préférence le matin.
INITIATION DU TRAITEMENT
Me Thérèse D. vient d’avoir des dosages des enzymes musculaires et un bilan hépatique qui se sont révélés normaux, il convient donc de la rassurer sur ses douleurs musculaires.
SUIVI DU TRAITEMENT
– Évaluation de l’efficacité du traitement hypolipémiant
-#gt; Faire une exploration des anomalies lipidiques dans les 3 mois suivant l’instauration du traitement par Ezetrol (efficacité maximale du traitement après un mois). Ce bilan lipidique doit être pratiqué après 12 heures de jeûne. En cas de valeurs anormales, une confirmation est indispensable.
-#gt; Avec Tahor, la surveillance hépatique doit être renforcée. Le contrôle des transaminases est impératif dans les 3 mois qui suivent l’instauration du traitement. Une élévation des transaminases supérieure à 3 fois la limite supérieure conduit à l’arrêt du traitement. Aucune donnée scientifique ne permet de proposer par la suite une périodicité de ce contrôle. Une fois l’objectif thérapeutique atteint, un contrôle biologique annuel semble suffisant.
-#gt; En ce qui concerne le risque musculaire, l’AFSSAPS a conclu en juin 2002 qu’il n’existe pas de justifications scientifiques à réaliser une surveillance systématique des CK en l’absence de signes cliniques évocateurs. Le médecin vient juste de les faire contrôler suite aux plaintes de madame D. Des taux supérieurs à cinq fois la normale auraient imposé l’arrêt du traitement.
– Avec le traitement antihypertenseur
-#gt; Avec Hytacand, une surveillance clinique (poids, tension artérielle), biologique et biochimique régulière est indispensable. Les dosages doivent comprendre un bilan hydro électrolytique : natrémie (risque d’hyponatrémie), kaliémie (le candésartan étant hyperkaliémiant et l’hydrochlorothiazide hypokaliémiant), calcémie (risque d’hypercalcémie). La surveillance de la fonction rénale est indispensable : créatininémie, clairance à la créatinine (les diurétiques thiazidiques sont contre indiqués en cas d’insuffisance rénale chronique sévère).
PLAN DE PRISE CONSEILLÉ-#gt; Tahor 20 et 40 mg : avaler en même temps les comprimés à 20 et 40 mg. La prise est indépendante des repas.-#gt; Ezetrol : la prise a lieu à 8 heures, mais elle peut se faire à tout moment de la journée, pendant ou en dehors des repas.-#gt; Hytacand 8 mg/12,5 mg : prise de préférence le matin, lors du petit déjeuner ou en dehors.CONSEILS À LA PATIENTE
Insister sur l’observance
– Avec Tahor
-#gt; Continuer à prendre les deux comprimés à la même heure qu’avant, avec le dosage à 80 mg.
-#gt; Des troubles digestifs à type de constipation, flatulences et douleurs abdominales peuvent survenir.
-#gt; Madame D. doit signaler la prise de ce médicament à tous les médecins susceptibles de lui prescrire un antibiotique. Il y a en effet un risque majoré de rhabdomyolyse avec la télithromycine.
– Avec Ezetrol
Des effets indésirables à type de nausées, flatulences et constipation peuvent aussi survenir mais il faut insister sur le fait qu’ils sont mineurs et transitoires.
– Avec Hytacand
-#gt; Les effets indésirables les plus fréquents avec les inhibiteurs de l’angiotensine II sont l’hypotension orthostatique, les céphalées et les migraines. Ces effets ne motivent pas nécessairement l’arrêt du traitement. Des conseils simples (se lever lentement, ou simplement, pour les céphalées, la prise d’antalgiques de palier 1 type paracétamol) permettent de les diminuer. Une attention particulière est à porter au risque de déshydratation. L’hyponatrémie avec hypovolémie peut être à l’origine d’une déshydratation et d’une hypotension orthostatique. La déshydratation peut conduire à un état confusionnel. Mieux vaut s’astreindre à boire régulièrement.
-#gt; L’effet diurétique peut être gênant pendant la nuit, donc la prise le matin est à privilégier.
Règles hygiéno-diététiques
Elles doivent faire l’objet d’un rappel systématique.
Le régime alimentaire vise à diminuer les apports en graisses saturées afin de limiter la synthèse endogène de LDL cholestérol. Bien suivi, ce régime peut permettre une réduction du LDL cholestérol de 15 à 20 %.
-#gt; Diminuer la consommation de beurre, fromages, viandes grasses, charcuteries et préférer les graisses poly-insaturées (huile de tournesol, maïs, colza et margarines) et mono insaturées (huile d’olive et colza).
-#gt; Les apports lipidiques ne doivent pas dépasser 30 % de la ration calorique. Ce régime n’est pas hypocalorique. L’apport glucidique doit donc compenser la réduction calorique liée à la restriction lipidique. Les glucides complexes sont préférables.
-#gt; Dans la mesure du possible, préparer les aliments sans graisse de cuisson. La chaleur élevée sature les acides gras mono et polyinsaturés et les transforme en acides gras athérogènes.
-#gt; Privilégier la consommation de fruits, de légumes, de pain, de céréales et de féculents.
-#gt; La consommation d’alcool est possible, mais dans tous les cas doit être limitée à un à deux verres de vin par jour.
-#gt; Marcher tous les jours : aller faire ses courses à pied ou faire une promenade d’au moins 30 minutes par jour.
Par Khallil Dib, Vanessa Bloch et Olivier Bourdon, pharmaciens, Pharmacie clinique, Université René Descartes, Paris-V
PATHOLOGIE : Qu’est ce qu’une dyslipidémie ?
Les dyslipidémies sont un facteur de risque d’athérosclérose, responsable de la surven ue de maladies cardiovasculaires, première cause de mortalité dans les pays riches.
EPIDÉMIOLOGIE
Parmi les dyslipidémies, l’hypercholestérolémie concerne une proportion importante de la population.
D’ailleurs, en ville, une consultation sur dix lui est consacrée pour la tranche d’âge 45-74 ans (6 % pour les plus de 75 ans).
Il y a d’autre part peu d’écart entre les hommes et les femmes.
Dans une récente enquête ayant étudié la part des différentes dyslipidémies dans trois villes françaises (Lille, Strasbourg, Toulouse), 30 % des adultes âgés de 35 à 64 ans présentaient une hypercholestérolémie pure, anomalie la plus fréquente. Au sein de ce groupe, le dosage de LDL-cholestérol (LDL-C) s’est avéré supérieur à 1,9 g/l pour 40 % des patients, compris entre 1,6 et 1,9 g/l pour 46 %, et inférieur à 1,6 g/l pour les 14 % restants. La seconde anomalie est l’hypo-HDL-cholestérolémie (12 % des sujets), suivie par l’hyperlipidémie mixte (5 %) et l’hypertriglycéridémie pure (4 %).
Finalement, au total, 52 % des sujets étudiés avaient une dyslipidémie !
PHYSIO-PATHOLOGIE
Les lipoprotéines
-#gt; Une partie des lipides sanguins est d’origine alimentaire. Il s’agit majoritairement de triglycérides, dans une moindre proportion, de cholestérol (qui ne représente que 5 à 10 % du cholestérol circulant) et de phospholipides.
Dans le tube digestif, les lipides alimentaires subissent d’abord l’action des sels biliaires et d’une lipase pancréatique. Ils pénètrent à l’intérieur des villosités intestinales où ils se combinent à des protéines – ils deviennent donc des lipoprotéines – pour former les chylomicrons, que l’on retrouve ensuite dans la circulation sanguine.
Les chylomicrons subissent l’action de la lipoprotéine lipase. Cette hydrolyse libère les triglycérides, sources d’acides gras pour les tissus et quelques phospholipides qui vont contribuer à former des HDL naissantes.
Les chylomicrons résiduels sont ensuite épurés par le foie qui en utilise les composants (esters de cholestérol et triglycérides), soit pour synthétiser de nouvelles lipoprotéines, soit pour fabriquer de la bile.
-#gt; L’autre partie des lipides plasmatiques résulte de la synthèse hépatique (triglycérides et cholestérol). Ces lipides endogènes, pour être distribués aux tissus, sont transportés à l’intérieur d’autres lipoprotéines : les VLDL (very low density lipoprotein), riches en triglycérides, et les LDL (low density lipoprotein), qui véhiculent les 2/3 du cholestérol circulant (d’où le nom de LDL-cholestérol).
Les HDL (high density lipoprotein) quant à elles, proviennent soit de la synthèse hépatique et intestinale endogène, soit de la lyse des chylomicrons. Elles interviennent dans la voie du transport inverse du cholestérol, processus par lequel la plus grande partie du cholestérol est ramenée vers le foie (HDL-cholestérol ou HDL-C).
Les HDL ont aussi pour fonction « d’échanger » des lipides avec les autres lipoprotéines.
L’athérogénèse
En cas d’hyperlipidémie, les LDL s’accumulent passivement dans la paroi artérielle, où elles subissent un phénomène d’oxydation.
– Constitution d’une plaque d’athérosclérose
Les LDL oxydées sont captées par des macrophages : ces derniers, en s’emplissant de cholestérol, se transforment en cellules spumeuses, principaux constituants des « stries lipidiques », prélude à la formation d’une plaque d’athérosclérose constituée. De plus, les LDL oxydées ont par elles-mêmes des propriétés délétères sur la paroi artérielle : cytotoxicité, action sur la production de cytokines par les macrophages, contribuant ainsi à générer et maintenir un état inflammatoire.
Par ailleurs, on sait que les LDL sont hétérogènes. Certaines sont petites et denses, d’autres moins denses et de diamètre plus élevé. Les premières pénètrent plus facilement sous l’endothélium vasculaire et ont une oxydabilité plus forte, accélérant le processus athérogène.
Les HDL à l’inverse, sont connues pour leur capacité anti-athérogène et leur rôle protecteur sur le plan cardiovasculaire. Elles captent le cholestérol excédentaire au niveau des tissus, paroi artérielle comprise. Après une série de réactions métaboliques, c’est sous forme estérifiée que le cholestérol est ramené par les HDL vers le foie, seul organe capable d’assurer son élimination biliaire. A cela s’ajoutent les propriétés bénéfiques propres des HDL (antioxydantes, anti-inflammatoires, antithrombotiques…) sur la paroi artérielle.
– Évolution d’une lésion athéroscléreuse
Dans la paroi artérielle, les lipides s’accumulent d’abord au niveau intracellulaire (stries lipidiques), puis extracellulaire. Ils finissent par se regrouper pour former un « coeur lipidique » ou « centre athéromateux ». Une chape fibreuse se constitue ensuite autour de ce coeur lipidique : la plaque est alors adulte et sa stabilité dépend de l’intégrité de la chape fibreuse. In fine, soit la plaque entraîne une sténose de la lumière artérielle, soit elle se rompt (plaque instable), libérant les éléments du centre lipidique, eux-mêmes thrombogènes.
SIGNES CLINIQUES
En dehors des complications de l’athérosclérose, les manifestations cliniques des hyperlipidémies sont rares, et n’apparaissent qu’inconstamment au cours des hypercholestérolémies majeures. On peut observer des dépôts lipidiques extravasculaires – les xanthomes – au niveau des tendons d’Achille et des tendons extenseurs des doigts.
Au niveau des paupières, ces dépôts jaunâtres prennent le nom de xanthélasma. On peut en trouver également au niveau de la cornée (arc cornéen). Cette quasi absence de signes cliniques patents rend essentiel le dépistage biologique des troubles lipidiques.
FACTEURS DE RISQUE ET ÉTIOLOGIES
Anomalies génétiques
La régulation du métabolisme des lipides peut être perturbée par des anomalies génétiques. Ces dyslipidémies primitives, dont il existe plusieurs types (I, IIa, IIb, III, IV, V, déficit génétique en HDL-C), sont rares, mais elles débutent dès l’enfance, parfois même dès la naissance et sont généralement très athérogènes.
Origine secondaire
La plupart des dyslipidémies sont d’origine secondaire.
-#gt; Une alimentation trop riche en cholestérol et en graisses saturées élève le niveau plasmatique du cholestérol total et du LDL-C.
-#gt; L’excès de glucides est associé à une hypertriglycéridémie et à une diminution du HDL-C.
-#gt; L’excès d’alcool est associé à une hypertriglycéridémie.
Surpoids et obésité (surtout androïde) sont fréquemment associés à une hyperlipidémie mixte ou à une hypertriglycéridémie.
-#gt; Le diabète peut être responsable d’une augmentation de la concentration des VLDL et des triglycérides, et d’une réduction du HDL-C.
-#gt; L’hypothyroïdie, le syndrome néphrotique, l’insuffisance rénale chronique, une cholestase, la ménopause, la grossesse sont aussi des causes d’hyperlipidémies secondaires.
-#gt; Enfin, les dyslipidémies peuvent être secondaires à le prise de certains médicaments : corticoïdes, diurétiques thiazidiques (à fortes doses), oestroprogestatifs, rétinoïdes, antiprotéases, tamoxifène, bêtabloquants.
ÉVOLUTION ET COMPLICATIONS
Les dyslipidémies peuvent évoluer vers la survenue de maladies cardiovasculaires qui sont la première cause de mortalité dans les pays industrialisés.
Le pronostic des dyslipidémies tient donc à ce risque de complications cardiovasculaires induites par l’athérosclérose : maladie coronaire et infarctus du myocarde, accident vasculaire cérébral, artériopathie oblitérante des membres inférieurs.
Ces pathologies peuvent résulter de la libération d’embols lipidiques thrombogènes, après rupture d’une plaque d’athérome ou de la réduction du diamètre artériel consécutive à la progression de la plaque.
Ces maladies sont plurifactorielles. Elles sont favorisées non seulement par les dyslipidémies, mais aussi par d’autres facteurs de risque cardiovasculaire : âge supérieur à 50 ans chez l’homme, à 60 ans chez la femme ; tabagisme actuel ou arrêté depuis moins de 3 ans ; antécédents familiaux précoces d’infarctus du myocarde, de mort subite ou d’AVC ; diabète (même traité) ; hypertension artérielle (même traitée).
L’obésité, la sédentarité et la consommation excessive d’alcool ne sont pas listées dans les facteurs de risque, mais sont à prendre en compte.
Un patient qui cumule plusieurs facteurs de risque voit son risque cardiovasculaire global augmenter. Celui-ci doit être évalué chez tout sujet porteur d’une dyslipidémie, en procédant au comptage des facteurs de risque qui s’ajoutent à la dyslipidémie.
Un taux biologique de HDL-C supérieur à 1,60 g/l est considéré comme un facteur protecteur et doit faire soustraire un facteur de risque au nombre total.
Par le Dr. Pascale Naudin Rousselle en collaboration avec le Pr. Eric Bruckert, service d’endocrinologie-métabolisme, groupe hospitalier Pitié Salpêtrière (Paris)
L’AVIS DU SPÉCIALISTE : « Les phytostérols abaissent le LDL-cholestérol si leur apport journalier est suffisant »
En post-infarctus immédiat, faut-il ramener le LDL-cholestérol en dessous de 0,7 g/l, comme certains le suggèrent ?
Ce n’est pas facile à réaliser. Le combat à mener c’est 1 g/l ! Rien n’est venu prouver de manière incontestable qu’il fallait descendre plus bas. Après un événement coronaire aigu, il faut « taper » fort d’emblée, car les résultats sont meilleurs si on administre de fortes doses de statines pour stabiliser les plaques d’athérome. Après 3 à 4 mois, la maladie est stabilisée, on peut donc penser à passer à des doses plus faibles, mais en maintenant l’objectif de moins de 1 g/litre de LDL-cholestérol.
Une mutuelle veut réduire les cotisations de ses adhérents consommant une marque de margarine enrichie aux phytostérols. Qu’en pensez-vous ?
La politique des mutuelles est ce qu’elle est, je ne souhaite pas discuter ce choix. En revanche, les margarines contenant des phytostérols font diminuer le LDL-cholestérol de 10 à 15 % selon les études. Mais attention, à condition que l’apport journalier soit suffisant, c’est-à-dire 30 grammes par jour environ, ce qui est beaucoup. D’où l’intérêt de diversifier les apports (pâte à tartiner, margarine de cuisson, yaourts…). Les phytostérols inhibent l’absorption et la réabsorption du cholestérol intestinal. Ces sortes de leurre sont probablement intéressants en complément d’un régime approprié et si besoin, d’un traitement, même si on ne connaît pas leurs effets à long terme. Je les conseille régulièrement, assortis de recommandations qui étonnent parfois mes patients. En effet, ce n’est pas facile de faire comprendre à des gens faisant attention aux graisses, qu’avec les phytostérols il faut en utiliser beaucoup !
Et les acides gras oméga-3 en prévention cardiovasculaire ?
Avec les oméga-3, la situation est particulière. Les preuves épidémiologiques démontrant le bienfait d’une alimentation riche en oméga-3 sont irréfutables. En revanche, l’intérêt d’une supplémentation n’a pas encore été réellement prouvé. De nombreuses études ont livré des résultats soit non reproductibles, soit franchement discordants. C’est la raison pour laquelle a été lancée en France l’étude Su.Fol.Om3, dans le but de voir si une supplémentation en oméga-3 et folates améliore le pronostic de patients ayant été victimes d’un AVC ou d’un infarctus.
Pr Nicolas Danchin, vice-président de la Société française de cardiologie, interrogé par Laurent Lefort
THÉRAPEUTIQUE : Quels sont les traitements des dyslipidémies ?
Les médicaments hypolipidémiants modifient les concentrations plasmatiques des quatre variables biologiques : cholestérol total, LDL-cholestérol (LDL-C), triglycérides et HDL-cholestérol (HDL-C) afin de diminuer le risque d’infarctus du myocarde et de décès de cause cardio-vasculaire.
La mise en place du traitement des dyslipidémies ne dispense surtout pas de la diététique hypolipémiante qui potentialise l’efficacité des médicaments. Le traitement diététique est d’ailleurs la base de la prise en charge des patients. Théoriquement, trois mois de régime sont nécessaires avant de prendre la décision d’instaurer un traitement si le taux de cholestérol n’est pas corrigé.
On dénombre quatre classes principales de médicaments hypolipidémiants :
– les statines ou inhibiteurs de la 3 hydroxy-3 méthyl glutarylcoenzyme A réductase (HMG-CoA réductase) ;
– les fibrates ;
– les inhibiteurs de l’absorption intestinale du cholestérol ;
– la colestyramine, une résine échangeuse d’ions.
Il est recommandé de prescrire plutôt des traitements ayant démontré leur efficacité sur des événements cliniques par rapport à ceux n’ayant démontré qu’une efficacité biologique.
Une association d’hypolipémiants est possible, en deuxième intention, chez les patients à haut risque.
MÉDICAMENTS
Les statines
Les statines ont une analogie structurale avec la HMG-CoA réductase permettant de l’inhiber spécifiquement et de façon réversible. Le blocage de cette enzyme empêche la transformation de l’acétyl-coenzyme A en mévalonate, premier stade de la synthèse du cholestérol.
Quand une thérapeutique médicamenteuse est indiquée, il s’agit le plus souvent d’une statine, sauf dans les trois circonstances suivantes :
– intolérance aux statines ;
– LDL-cholestérol #lt; 1 g/l associé à des triglycérides élevés et un HDL-cholestérol bas ;
-hypertriglycéridémie sévère isolée (triglycérides supérieurs à 4 g/l).
– Rôle
-#gt; Les statines diminuent la synthèse du cholestérol, principalement au niveau hépatocytaire et stimulent la synthèse des récepteurs hépatiques du LDL-cholestérol. Elles augmentent donc l’épuration du LDL-cholestérol circulant.
-#gt; Les statines diminuent la concentration plasmatique des triglycérides et augmentent celle des HDL-cholestérol.
-#gt; A côté de ces effets sur les lipides, les statines ont un effet vasculaire :
– elles stabilisent la plaque d’athérome grâce à des propriétés anti-inflammatoire et anti-proliférative au niveau des cellules vasculaires lisses ;
– en plus de la diminution du taux du LDL-cholestérol, elles diminuent son oxydation, ce qui contribue à une activité anti-thrombotique par inhibition de l’activation plaquettaire.
– Efficacité
Après un traitement de 4 à 6 semaines par les statines et des règles hygiéno-diététiques adaptées, on peut observer :
– une diminution du cholestérol total de 20 à 50 % ;
– une diminution du LDL-cholestérol de 25 à 60 %, l’effet est dose-dépendant ;
– une diminution des triglycérides de 15 à 30 % ;
– une augmentation du HDL-cholestérol de 5 à 12 %.
– Indications
-#gt; Les statines, hormis la rosuvastatine, sont indiquées en première intention dans les hypercholestérolémies pures (type IIa) ou dans l’hyperlipidémie mixte avec une élévation modérée des triglycérides (type IIb), en complément d’un régime adapté et assidu.
-#gt; Toutes, hormis la rosuvastatine dont les études de morbi-mortalité sont en cours, ont démontré une réduction significative de la morbi-mortalité coronaire et du risque d’accident vasculaire cérébral.
-#gt; Les statines ne sont pas indiquées dans les hypertriglycéridémies isolées.
-#gt; L’atorvastatine, la fluvastatine, la pravastatine et la simvastatine sont indiquées dans la prévention des complications cardiovasculaires. La pravastatine nécessite une adaptation posologique chez les insuffisants rénaux.
-#gt; L’atorvastatine, la simvastatine et la rosuvastatine sont indiquées dans le traitement des hypercholestérolémies familiales homozygotes.
Les fibrates
Les fibrates diminuent la synthèse hépatique des lipoprotéines (VLDL) qui assurent le transport des triglycérides dans le plasma et augmentent leur catabolisme.
– Rôle
Les fibrates agissent à trois niveaux sur le métabolisme des lipides et des lipoprotéines.
-#gt; Ils activent des facteurs de transcription intranucléaires au niveau hépatique. Il en résulte notamment une oxydation accrue des acides gras et une dégradation des lipoprotéines riches en triglycérides.
-#gt; Ils inhibent la transcription du gène de l’apo C-III provoquant une diminution de la production du LDL-cholestérol.
-#gt; Ils augmentent l’expression des transporteurs d’acides gras tel le FATP (Fatty Acid Transporter protein) qui facilite la capture cellulaire des acides à chaîne longue. Ils agissent également sur les concentrations plasmatiques des apolipoprotéines A-I et A-II contenues dans les HDL-cholestérol aux effets protecteurs vis-à-vis du risque vasculaire.
Les fibrates auraient également une action anti-inflammatoire au niveau vasculaire par inhibition de la synthèse des cyclo-oxygénases de type 2 (Cox-2) et des cytokines pro-inflammatoires telles que l’interleukine II-6.
Par ailleurs, ils réduisent le volume des lésions artérielles au cours de la maladie athérosclérose.
– Efficacité
Après un traitement de 4 à 6 semaines par les fibrates et un bon suivi hygiéno-diététique, on peut observer :
– une diminution des triglycérides de l’ordre de 40 à 50 % ;
– une diminution du LDL- cholestérol de 10 à 30 % ;
– une augmentation du HDL- cholestérol de 10 à 15 %.
– Indications
Les hypercholestérolémies et hypertriglycéridémies isolées ou combinées.
Seul le gemfibrozil (Lipur) a fait la preuve de son efficacité clinique en prévention primaire et secondaire. Cependant il est contre-indiqué en association avec le répaglinide (Novonorm), car il peut provoquer une hypoglycémie sévère, voire un coma par augmentation des concentrations de l’antidiabétique oral.
QUELLES SONT LES INTERACTIONS AVEC LES STATINES ?L’ézétimibe
L’ézétimibe est le premier agent d’une nouvelle classe d’hypolipémiants qui inhibe de façon sélective l’absorption intestinale de cholestérol et des phytostérols apparentés.
– Rôle
Il agit au niveau de la bordure en brosse de l’intestin grêle et diminue ainsi les apports au foie du cholestérol intestinal (biliaire et hépatique) alors que les statines réduisent la synthèse hépatique du cholestérol.
Ainsi, ces deux molécules administrées simultanément avec des mécanismes distincts entraînent une diminution complémentaire du cholestérol.
– Efficacité
L’ézétimibe inhibe l’absorption du cholestérol mais n’a pas d’effet sur l’absorption des triglycérides, des acides gras, des acides biliaires, de la progestérone, de l’éthinyl estradiol ou des vitamines liposolubles.
– Indications
En monothérapie, Ezetrol est indiqué comme traitement complémentaire au régime alimentaire chez les patients souffrant d’une hypercholestérolémie primaire (hétérozygote familiale ou non-familiale) lorsqu’une statine semble inappropriée ou mal tolérée.
Une association entre l’ézétimibe et une statine est indiquée en tant que traitement complémentaire au régime alimentaire chez les patients souffrant d’une hypercholestérolémie primaire (hétérozygote familiale ou non-familiale, homozygote familiale) insuffisamment contrôlée par une statine seule. La sitostérolémie familiale homozygote est également une indication de l’ézétimibe.
Les études démontrant l’efficacité de ce médicament dans la prévention des complications de l’athérosclérose ne sont pas encore terminées.
La colestyramine
La colestyramine (Questran) est une résine basique échangeuse d’ions.
– Rôle
Elle agit en chélatant dans l’intestin les sels biliaires sous forme d’un complexe insoluble. Elle bloque le cycle entérohépatique de ces sels et augmente ainsi leur excrétion fécale, d’où la réduction des taux de cholestérol intrahépatocytaire, et, en réponse, l’augmentation de l’expression des récepteurs aux LDL-cholestérol.
– Efficacité
La colestyramine a démontré son efficacité à réduire la mortalité coronaire en prévention primaire, sans réduire la mortalité globale.
Les résines augmentent la triglycéridémie d’environ 10 % chez les normotriglycéridémiques. Pour cette raison, on doit éviter de l’utiliser dans les cas d’hypertriglycéridémies et les hyperlipidémies mixtes.
L’usage de la colestyramine entraîne une réduction d’environ 20 % du « LDL-cholestérol » sans agir sur le taux de « HDL-cholestérol ».
– Indication
L’indication thérapeutique de la colestyramine est l’hypercholestérolémie essentielle. Si l’hypercholestérolémie est modérée, la résine est administrée isolément. Si la maladie est plus sévère elle est associée à un fibrate (effet additif) ou à une statine (effet synergique).
Les oméga-3
Les huiles de poisson riches en acides gras poly-insaturés en oméga 3 (Maxépa, Omacor, Triglistab) peuvent être associées au traitement hypolipidémiant.
Elles ont fait leurs preuves dans la diminution de la récidive des accidents coronaires et de la mortalité globale.
Ces acides ne sont pas « anticholestérol », même s’ils peuvent modifier le profil lipidique, en abaissant les triglycérides et en augmentant le HDL-C.
Leur intérêt tient essentiellement au fait qu’ils sont à la fois antiagrégant plaquettaire, antiarythmique et anti-inflammatoire. De plus, ils ont la capacité de restaurer la fonction endothéliale, stabilisant ainsi la plaque athérome.
Les acides oméga-3 polyinsaturés sont contenus dans l’huile de chair de poissons gras (harengs, sardines, thons, maquereaux, saumons, truites).
Leur tolérance est bonne mais une surveillance étroite des patients sous traitement anticoagulant s’impose.
Les autres hypolipémiants
Divers hypolipidémiants ont un mode d’action mal élucidé Leur dossier clinique ancien, insuffisant, ne satisfait pas aux exigences méthodologiques actuelles.
– Le tiadénol
Le tiadénol (Fonlipol) indiqué dans les hypercholestérolémies agit d’une façon encore mal documentée et se révèle moins actif que les produits de référence du groupe, mais sa tolérance est bonne et il ne donne pas lieu à des interactions médicamenteuses. Son efficacité dans la prévention primaire ou secondaire des complications de l’athérosclérose n’a pas été démontrée.
– Le benfluorex
Adjuvant au régime alimentaire des hypertriglycéridémies, le benfluorex (Mediator) n’a pas prouvé son activité dans la prévention primaire et secondaire des complications de l’athérosclérose. Ce principe actif réduit l’absorption intestinale des triglycérides en inhibant partiellement l’activité de la lipase pancréatique. Il réduirait aussi la synthèse hépatique des triglycérides et du cholestérol. Il est préconisé en adjuvant au régime adapté dans les hypertriglycéridémies.
La vitamine E
La vitamine E ou alphatocophérol (Toco 500, Tocolion, Tocopa) est retrouvée parfois comme adjuvant du régime à raison de 500 mg/j. Elle n’a pas d’effet hypolipémiant mais elle est prescrite en raison de son activité antioxydante qui permettrait de ralentir l’oxydation des LDL-cholestérol, impliquée dans le développement des lésions athéromateuses. Cependant, aucune étude n’a apporté la preuve d’une efficacité clinique dans le traitement des hyperlipidémies.
La vitamine E s’intègre avec précaution dans le traitement de l’hyperlipidémie, surtout chez les patients polymédicamentés.
Les associations
Les associations statine/ézétimibe et statine/résine sont possibles pour abaisser le LDL-cholestérol.
L’association statine/fibrate est classiquement déconseillée mais peut se discuter après un avis spécialisé (l’initiation d’une telle association doit être réservée à des équipes spécialisées). Cependant, elle nécessite une surveillance clinique et biologique régulière, renforcée et rigoureuse.
CHOIX DU TRAITEMENT D’UNE DYSLIPIDÉMIEPERSPECTIVES
-#gt; Le colesevelam, une résine commercialisée dans certains pays, est en cours d’enregistrement en France.
-#gt; L’acide nicotinique (Maspan) devrait être prochainement disponible en France sous forme de comprimés à libération modifiée pour essayer de minimiser les effets indésirables à type de flushs associés ou non à un prurit.
Son intérêt repose sur sa capacité à augmenter le HDL-cholestérol. Il sera indiqué chez les sujets atteints d’une dyslipidémie mixte ou combinée ou d’une hypercholestérolémie primaire.
Il sera prescrite en association à une statine ou en monothérapie, en cas d’intolérance aux statines.
Par Nanen Men, Nicole Terrier et Olivier Bourdon, pharmaciens, Pharmacie clinique, Université René Descartes, Paris-V
CONSEILS AUX PATIENTS
Pourquoi l’hyperlipidémie est dangereuse
-#gt; Rappeler que l’augmentation du taux de cholestérol et/ou de triglycérides dans le sang augmente le risque de maladies cardiaques, d’accident vasculaire cérébral et d’artérite des membres inférieurs.
-#gt; Ce n’est pas une fatalité, car le risque cardiovasculaire diminue en même temps que le taux de LDL-cholestérol (« mauvais » cholestérol).
-#gt; Préciser la valeur de LDL-C que le sujet doit s’efforcer de ne pas dépasser. Insister sur le fait que cette valeur est de plus en plus basse lorsque le nombre de facteurs de risque cardiovasculaire augmente. Pour cette raison, il est inutile de comparer ses résultats biologiques avec ceux de son voisin : il n’a sans doute pas le même risque cardiovasculaire, donc pas le même seuil de LDL-C à atteindre.
-#gt; Les patients âgés dyslipidémiques doivent continuer à se traiter, car même après 70 ans, la baisse du LDL-C est bénéfique.
Insister sur l’importance du mode de vie
-#gt; Préciser que les mesures hygiéno-diététiques font partie intégrante du traitement, dès que le taux de LDL-C excède 1,60 g/l. Elles sont efficaces sur la baisse de ce paramètre et peuvent éviter de prendre un médicament hypolipémiant ou permettre d’en diminuer la dose. De plus, elles agissent sur les autres facteurs de risque cardiovasculaire : hypertension artérielle, surpoids…
-#gt; Poursuivre les mesures hygiéno-diététiques même lorsqu’un traitement médicamenteux est instauré, et ne pas les réserver à la période précédant le bilan de contrôle !
-#gt; Éviter de parler de « régime » : employer plutôt des termes moins décourageants aux oreilles du patient, à qui l’on explique somme toute que c’est « pour la vie » ! Des formules telles que « traitement diététique » ou « rééquilibrage alimentaire » ou « adaptation alimentaire » peuvent convenir.
Pour l’hypercholestérolémique
-#gt; Limiter la consommation d’aliments susceptibles d’élever le LDL-C : acides gras saturés contenus dans les graisses animales (beurre, fromage, viandes grasses, charcuterie) et la mayonnaise ; acides gras trans présents dans les produits manufacturés (biscuits industriels, viennoiseries, pâte feuilletée). L’apport en cholestérol alimentaire ne doit pas excéder 0,3 g/jour. A titre indicatif, on trouve environ 2,35 grammes de cholestérol dans 100 g de cervelle ; 1,26 g dans 100 g de jaune d’oeuf (pas plus de 2 oeufs par semaine) ; 0,23 g dans 100 g de beurre, 0,07 à 0,12 g dans 100 g de fromage ou de crème fraîche.
-#gt; Remplacer le beurre par des matières grasses dont les composants sont susceptibles d’abaisser le LDL-C : huiles et margarines végétales contenant des acides gras mono-insaturés (olive, colza, arachide) et des acides gras poly-insaturés de type oméga 6 (tournesol, maïs, pépins de raisin, colza), margarines enrichies en stérols végétaux. Veiller toutefois à ce que les lipides ne dépassent pas 30 % de la ration calorique.
-#gt; Consommer régulièrement des fruits et légumes car les fibres peuvent améliorer le profil lipidique (diminution du LDL-C). Idem pour le pain, les féculents et les céréales. Les fruits oléagineux et le soja sont riches en phytostérols qui réduisent le LDL-C.
-#gt; Les acides gras poly-insaturés de type oméga 3 sont bénéfiques au plan cardiovasculaire et ils réduisent le taux de triglycérides, mais ils n’ont aucune action sur le LDL-C. Ils ne font donc pas « baisser le cholestérol », y compris lorsqu’il s’agit de produits enrichis (en oméga 3). Ils sont contenus dans les huiles de colza, de soja et de noix, ainsi que dans la chair et l’huile de poissons marins gras (sardines, thon, saumon). Il est donc fortement recommandé de consommer du poisson 2 à 3 fois par semaine, qu’il soit maigre ou gras, afin de diminuer le risque cardiovasculaire.
-#gt; Ne pas supprimer les produits laitiers, sources de calcium et de protéines. Il faut en revanche éviter les fromages les plus gras (emmental, roquefort, Saint-Nectaire, gruyère, comté) et choisir des produits « allégés » en matières grasses, en veillant à ne pas en consommer trop par rapport à une ration normale.
Pour l’hypertriglycéridémique
-#gt; Limiter la consommation de sucres simples qui élèvent la triglycéridémie. Mais comme pour l’hypercholestérolémique, les glucides complexes (pain, céréales, féculents) doivent figurer au menu, sans dépasser 50 à 55 % de la ration calorique journalière.
-#gt; L’abus d’alcool contribue à élever la triglycéridémie. Si l’hypertriglycéridémie est totalement alcool-dépendante, la suppression des boissons alcoolisées suffit à normaliser le taux.
Pour tous les hyperlipidémiques
-#gt; Perdre du poids si nécessaire. La réduction pondérale est active sur plusieurs facteurs de risque : baisse de la pression artérielle, de la glycémie à jeun, du cholestérol total, du LDL-C, des triglycérides ; augmentation du HDL-C.
-#gt; Pratiquer une activité physique régulièrement – si possible 30 minutes chaque jour – en fonction de ses capacités. L’exercice physique est bénéfique au plan cardiovasculaire : il élève le HDL-C et fait baisser les triglycérides, il favorise la vasodilatation artérielle, diminue le risque de thrombose et peut éventuellement faire perdre du poids.
-#gt; Arrêter le tabac.
Par le Dr. Pascale Naudin Rousselle en collaboration avec le Pr. Eric Bruckert
POUR EN SAVOIR PLUS
INTERNET
Prise en charge thérapeutique du patient dyslipidémique-Recommandations
Ce document est une actualisation des Recommandations de Bonne Pratique « Prise en charge des dyslipidémies » publiées par l’Afssaps en septembre 2000 et « Modalités de dépistage et de diagnostic biologique des dyslipidémies en prévention primaire » publiées par l’Anaes en janvier 2000. Cette actualisation date de mars 2005 et détaille notamment les modalités de réalisation du bilan lipidique, l’évaluation du risque cardiovasculaire global, les objectifs thérapeutiques et le traitement du patient dyslipidémique. Dix pages incontournables.
LIVRES
Le cholestérol
Ziad Massy, Michel Brazier, Eric Housieaux, Saïd Kamel, Alice Wattel – Éditions Le Moniteur des pharmacies, collection Le suivi du patient à l’officine, 2006
Co-écrits par des médecins et pharmaciens, ce titre à paraître fin février suit la démarche de la dispensation à l’officine, adaptée aux patients dyslipidémiques. Points forts : des orientations pour adapter votre conseil en fonction du profil du patient et deux chapitres : « Halte aux idées reçues ! » et « Les contacts utiles ».
Cholestérol et triglycérides
Ziad Massy, Fabrizio Andreelli, Michel Andrejak, Bernard Lacour, Editions Doin, collection conduites, 2004
Ce livre est une synthèse des connaissances sur la prise en charge de l’hyperlipidémie dans la population générale et chez deux catégories de patients : les diabétiques et les insuffisants rénaux chroniques. Son contenu permet d’amorcer le traitement d’un grand nombre de patients à risque cardiovasculaire non ou insuffisamment pris en charge. Une limite toutefois : l’ouvrage a été publié avant la mise à jour des recommandations de l’Afssaps sur la prise en charge thérapeutique du patient dyslipidémique.
Le diagnostic se fait au laboratoire
Le diagnostic de dyslipidémie est établi lorsque le bilan lipidique montre des valeurs anormales sur prélèvement sanguin, réalisé après 12 heures de jeûne. La glycémie à jeun doit être mesurée systématiquement en cas de dyslipidémie.
En l’absence d’un changement des habitudes alimentaires ou d’une intervention médicamenteuse spécifique, d’un événement cardiovasculaire ou d’une augmentation du poids, la répétition d’un bilan lipidique plus d’une fois tous les cinq ans n’est pas justifiée.
En première intention, l’EAL (exploration d’une anomalie lipidique) comporte le dosage des taux sériques du cholestérol total, des triglycérides et du HDL-C.
Si le taux de triglycérides est inférieur à 4 g/l (4,6 mmol/l), le LDL-C est calculé grâce la formule de Friedewald.
En g/l : LDL-C = cholestérol total – [HDL-C + triglycérides/5]
En mmol/l : LDL-C = cholestérol total – [HDL-C + triglycérides/2,2]
Si la triglycéridémie est supérieure à 4 g/l, un dosage direct du LDL-C est possible.
Lorsqu’il n’existe aucun facteur de risque, les valeurs normales sont :
– LDL-C #lt; 1,60 g/l (4,1 mmol/l)
– Triglycérides #lt; 1,50 g/l (1,7 mmol/l)
– HDL-C #gt; 0,40 g/l (1,03 mmol/l)
Hypertriglycéridémie
Définie par un taux de triglycérides sanguins supérieur à 1,50 g/l, l’hypertriglycéridémie peut être induite par l’excès de glucides alimentaires et d’alcool. Elle peut aussi avoir une origine endogène (origine génétique ou secondaire au surpoids et à l’obésité, au diabète, à l’insuffisance rénale, à la prise de certains médicaments). Elle est en soi un facteur de risque de maladie coronaire et de mortalité d’origine cardiovasculaire. L’hypertriglycéridémie sévère (plus de 10 g/litre) expose également au risque de pancréatite aiguë.
Diététique et médicament
– En prévention primaire
Le traitement diététique doit être instauré en monothérapie pour une période d’au moins 3 mois avant d’envisager un traitement médicamenteux. Il sera accompagné d’une prescription adaptée d’exercice physique. Ces simples mesures peuvent corriger bon nombre d’hyperlipidémies légères ou modérées. Si l’objectif thérapeutique n’est pas atteint avec la diététique seule, un traitement médicamenteux en monothérapie doit alors être ajouté.
– En prévention secondaire
Débuter simultanément l’intervention hygiénodiététique et médicamenteuse le plus précocément possible.
Suivi du patient
Suivi clinique
– Dépister les effets indésirables.
Les statines et les fibrates peuvent entraîner des effets indésirables hépatiques ou musculaires. Toutes les statines sont susceptibles d’induire des troubles musculaires. Si la plupart concernent des symptômes mineurs (douleur et sensibilité musculaire, fatigue musculaire, crampes), la rhabdomyolyse parfois fatale par l’insuffisance rénale qu’elle peut induire est rare. Certaines situations la favorisent : forte posologie, association de statines ou avec des inhibiteurs enzymatiques, avec les fibrates et notamment le gemfibrozil. Les signes avant-coureurs sont de fortes myalgies et des faiblesses musculaires importantes. L’analyse des données françaises de pharmacovigilance n’identifie à ce jour aucun cas de rhabdomyolyse avec l’ézétimibe. Une soixantaine de cas de myalgies a été rapportée. Ces effets surviennent le plus souvent chez des patients ayant déjà présenté une atteinte musculaire sous statines. L’évolution est favorable à l’arrêt du médicament, avec disparition progressive des symptômes.
– Rechercher de nouveaux facteurs de risque cardio-vasculaires (diabète, tension, surpoids…).
– Évaluer l’abstinence tabagique.
Suivi biologique
– Surveillance des ASAT et ALAT, au moins une fois dans les 3 mois qui suivent l’instauration d’une statine ou d’un fibrate. Il n’existe pas de périodicité pour les contrôles ultérieures. Chez les patients dont les transaminases sont normales, un contrôle annuel est ensuite recommandé.
Le traitement par statine ou fibrate doit être arrêté si la valeur limite supérieure de l’ALAT ou de l’ASAT dépasse de 3 fois les valeurs normales (ALAT #lt; 35 UI, ASAT #lt; 30 UI). Lorsque l’objectif thérapeutique est atteint, un contrôle biologique annuel est suffisant.
– Surveillance musculaire : le dosage initial systématique des CK est inutile. Il doit être réservé aux situations suivantes : insuffisance rénale, hypothyroïdie, antécédents personnels ou familiaux de maladie musculaire génétique, antécédents d’effet indésirable musculaire avec une statine ou un fibrate, abus d’alcool, plus de 70 ans.
Tout symptôme musculaire inexpliqué doit faire pratiquer un dosage des CK.
Si le taux des CK est supérieur à 5 fois la normale (valeurs normales : homme : æ 195 UI/l, femme : æ 170 UI/l), le traitement par statines est arrêté.
– Surveillance rénale
La rosuvastatine à une dose journalière de 40 mg peut entraîner une protéinurie. Dans la plupart des cas, la protéinurie diminue ou disparaît spontanément à la poursuite du traitement.
Une surveillance de la fonction rénale doit être régulière pour les patients traités par une dose de 40 mg de rosuvastatine.
La posologie des fibrates et de la pravastatine doit tenir compte de la fonction rénale.
Contre-indications
– Statines : myopathie, affection hépatique évolutive et/ou élévation prolongée des transaminases, insuffisance rénale sévère (pravastatine), grossesse et allaitement.
– Fibrates : insuffisance rénale et insuffisance hépatique, affections de la vésicule biliaire, réaction connue de photoallergie ou de phototoxicité, grossesse et allaitement.
– Ézétimibe : affection hépatique évolutive ou élévation persistante et inexpliquée des transaminases plasmatiques, grossesse et allaitement.
– Colestyramine : insuffisance hépatique (en particulier obstruction complète des voies biliaires), constipation chronique sévère, phénylcétonurie.
– Benfluorex : pancréatites chroniques avérées.
Attention au pamplemousse
La simvastatine et à un degré moindre l’atorvastatine ne doivent pas être administrées avec du jus de pamplemousse. L’un des constituants du jus, la narringine, inhibe la biotransformation de ces deux statines, favorise donc leur absorption, entraînant un risque d’augmentation de leur concentration sanguine. La variabilité interindividuelle est très importante quant à l’influence du jus de pamplemousse. En cas d’augmentation des effets indésirables à type de douleurs musculaires intenses ou de crampes, le patient doit arrêter son médicament et prendre contact avec son médecin. Celui-ci prescrira un dosage des enzymes musculaires et hépatiques et pourra décider d’interrompre ou non le traitement hypolipémiant.
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