Épisode 43 Le ski, ce n’est pas sans risque !

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Publié le 3 mars 2018
Par Florence Bontemps
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Lola, 17 ans, la fille de madame Martin, est partie au ski avec une association sportive de son quartier. Pas de chance, son séjour ne se termine pas très bien !

– Madame Lesky,directrice du Centre de vacances Les Chamois : Allô, madame Martin ?

– Valérie Martin : Oui ?

– Bonjour madame. Voilà, votre fille Lola a fait une chute à ski et les secouristes de la station pensent qu’elle s’est cassée la jambe. Elle a été transportée au CHU de Grenoble.

– Oh là ! Mais ça s’est passé comment ?

– Apparemment, c’est un autre skieur qui lui est rentré dedans. Elle descendait une piste rouge avec son groupe.

– Mais c’est grave ? Elle a perdu connaissance ? Vous croyez que je peux l’appeler à l’hôpital ?

– Je ne pense pas que vous pourrez la joindre facilement, mais je vais vous donner le numéro de l’hôpital.

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Deux heures plus tard, à son domicile…

– Valérie Martinà son mari : J’ai eu l’hôpital, et j’ai même pu parler à Lola… Elle a passé une radio, effectivement c’est cassé au niveau du tibia, mais le médecin lui a dit que ce n’était pas déplacé. Elle va avoir un plâtre pendant 6 semaines !

– Paul Martin : 6 semaines ! Elle va pouvoir aller au lycée avec ?

– J’imagine ! Tu sais les jeunes, ils cavalent avec leurs béquilles !

– Ils vont la rapatrier en ambulance ?

– La directrice m’a demandé ce que je préférais, mais comme de toute façon ils rentrent dans 3 jours, je crois que c’est plus simple qu’elle rentre en car avec le centre.

Deux jours plus tard, à l’arrivée de l’autobus

– Madame Lesky :Donc voilà le dossier d’hospitalisation de Lola et ses médicaments. Elle a des comprimés contre la douleur si elle en a encore besoin, et des piqûres. Et voilà l’ordonnance.

– Lola : Oui maman, j’ai des piqûres tous les matins…

– Madame Martin : C’est quoi ces piqûres ? C’est contre la douleur ?

-Madame Lesky :Non madame, le médecin nous a expliqué que c’était un anticoagulant, parce que Lola avait la jambe immobilisée, pour éviter la formation de caillots.

– Donc il faut qu’une infirmière passe tous les jours ?

– Oui, il y a une ordonnance. Mais je crois que très vite Lola pourra les faire elle-même…

– Lola :Il est hors de question que je fasse des piqûres moi-même !

A la pharmacie

– Valérie Martin : Bonjour madame Dorvault… Cette fois-ci, c’est pour Lola qui s’est cassé la jambe au ski !

– Mme Dorvault, pharmacienne : Ah, ça ce sont des choses qui arrivent. Rien de trop grave ?

– Non, mais l’année du bac, c’est quand même ennuyeux… Elle a une prescription d’anticoagulant…

– Je vais vous chercher ça… Voilà les boites d’enoxaparine et une boite de récupération des déchets. Lola a donc une injection par jour. Vous devez avoir une ordonnance pour le laboratoire d’analyses pour contrôler les plaquettes ?

– Non, je n’ai rien pour le laboratoire d’analyses.

– Ah bon ? Il faut contrôler les plaquettes deux fois par semaine le premier mois puis une fois par semaine! Vous êtes sûr que vous n’avez pas l’ordonnance ?

— Ah si… Donc une prise de sang en plus des piqûres ? Quand je vais dire ça à Lola, elle va hurler ! C’est indispensable ?

– Oui, car dans de rares cas l’enoxaparine provoque des chutes de plaquettes. On appelle ça la thrombopénie induite par l’héparine. Et si jamais c’est le cas, il faut arrêter les injections immédiatement.

– Mais il n’y a pas d’autres symptômes ?

– Non, c’est asymptomatique au moins au début. C’est vraiment le contrôle sanguin qui s’impose.

A la maison, le soir :

– Madame Lide, l’infirmière : Bonjour Lola. Alors ton séjour au ski ne t’a pas trop réussi ! Tu en as pour combien de temps de plâtre ?

– Lola : J’en ai pour 6 semaines ! Et 3 mois sans sport ! C’est nul, je vais rater toutes les compétitions de basket…

– Ce n’est pas de chance ! Et tu vas pouvoir aller en classe ?

– Pas avant deux semaines. Du coup il va falloir que je rattrape les cours…

– Je te fais ta piqûre et je te montre en même temps comment faire ?

– Mouais…

– Donc première chose tu te laves les mains avec du savon. Puis tu prépares tout ce dont tu auras besoin sur une assiette propre par exemple : la seringue, une compresse, de l’alcool à 70°, la boite jaune pour les déchets. Tu peux t’allonger, c’est plus pratique, ou semi-assise.

– D’accord…

– Tu choisis la zone où tu vas faire l’injection, un jour à droite, un jour à gauche, au niveau de l’ombilic mais pas trop près. Tu nettoies cette zone avec une compresse et de l’alcool.

– Euh… d’accord…

– Tu retires le bouchon de protection de l’aiguille et si il y a une goutte de produit, tu tapotes comme ceci pour l’éliminer. Tu ne dois pas purger la seringue. Maintenant tu attrapes la peau entre le pouce et l’index pour former un pli cutané. Tu introduis l’aiguille perpendiculairement et tu piques jusqu’à la butée sans lâcher le pli ! Il faut appuyer bien à fond sur le piston pour déclencher le système de sécurité. Voilà, on peut ensuite retirer l’aiguille et lâcher le pli. Ça t’a fait mal ?

– Non en fait… C’est déjà fini ?

– Oui. Tu as entendu le clic ? C’est le système de sécurité pour éviter qu’on ne se pique avec l’aiguille après l’injection. Tu n’as plus qu’à mettre la seringue dans le container jaune… Si tu veux, je viens demain pour la prochaine injection, et si tout va bien après tu les fais toute seule ?

– C’est sûr que ce serait bien pratique que je les fasse toute seule, question horaires… Mais ok, je préfère pour demain… Et… j’ai aussi une question… : je prends la pilule mais ma mère ne le sait pas. Et j’avais lu dans la notice qu’il fallait l’arrêter si on avait un plâtre. Ca m’avait fait rire parce que quand on a un plâtre, de toute façon, c’est pas très cool pour, enfin, bon voilà… on n’a pas besoin de pilule…

– Et bien tu as raison, il vaut mieux arrêter ta pilule pendant tout le temps du plâtre… Mais attention, n’oublie pas les préservatifs si jamais !

– Ah mais de toute façon en ce moment, je n’ai plus de petit copain… 

Nous remercions le D r Brice Le Taillandier pour son aimable relecture. Sources : « Petite traumatologie chez l’enfant », La Revue du praticien, vol. 65 – mai 2015 – pp. 653-659 ; « Surveillance d’un malade sous plâtre – ECN », P r Laffosse Jean-Michel – MAJ janvier 2014 –Université Toulouse III ; « Éducation sur les immobilisations plâtrées », pôle médecine d’urgences, Centre hospitalier universitaire de Toulouse ; « Modification des recommandations sur la surveillance plaquettaire d’un traitement par héparine de bas poids moléculaire », Afssaps, octobre 2011 ; RCP Leeloo ; RCP Lovenox.

•  Le traitement des fractures de l’enfant est orthopédique : immobilisation de 3 à 6 semaines et jusqu’à 3 mois pour une fracture diaphysaire. La durée d’arrêt de sport est le double de la durée d’immobilisation plâtrée, à l’exception de la piscine qui peut être pratiquée dès l’ablation du plâtre.

•  L’immobilisation plâtrée associée à la lésion sous-jacente constitue une cause de ralentissement du flux veineux entraînant une stase secondaire. Celle-ci peut-être à l’origine d’accidents thromboemboliques. Toutefois, les thromboses étant exceptionnelles chez l’enfant sans facteur de risque, la prescription d’un anticoagulant ne se justifie qu’à partir de la puberté.

•  Le traitement par héparine de bas poids moléculaire est poursuivi jusqu’à l’ablation du plâtre et nécessite une surveillance biologique régulière dans ce contexte post-traumatique (contrôle des plaquettes 2 fois par semaine le premier mois puis une fois par semaine).

•  Il faut éviter l’alitement prolongé et surélever le membre immobilisé au-delà de l’horizontal le plus souvent possible. Tout traitement hormonal doit être interrompu.