La mode des « boissons fonctionnelles » : Comment se faire des ronds dans l’eau

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Publié le 2 octobre 2004
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A mi-chemin entre les compléments alimentaires et les alicaments, le marché des eaux « améliorées » ou « functional drinks » émerge. Le concept ? Boire non seulement par nécessité mais aussi pour « rester beau » et en forme. La pharmacie et son « atout santé » a toutes les raisons d’exploiter cette nouvelle tendance.

L’eau, c’est la vie… et la santé. Les géants de la grande distribution ne manquent pas de faire passer le message et attribuent aux eaux de boisson classiques des vertus antifatigue ou antistress, à l’image de Perrier Fluo ou de Lipton Aquaé Equilibre. La recette est simple : l’ajout d’extraits de plantes pour justifier les promesses de bien-être et pour construire l’argumentaire marketing. Même les eaux minérales ont adopté un langage scientifique.

« On assiste actuellement à un changement dans le paysage des eaux qui communiquent à fond sur les oligoéléments qu’elles contiennent. Les eaux minérales deviennent des eaux de santé », constate Olga Champain, responsable marketing au sein du groupe pharmaceutique Omega Pharma, détenteur de la marque Hydroxydase depuis le début de l’année.

Cette eau de source, qui a connu ses heures de gloire dans les années 1960-1970, est en pleine phase de repositionnement. « Nous avons lancé une campagne de communication très esthétique au printemps dernier dans la presse féminine. Alors qu’elle est actuellement en perte de vitesse, Hydroxydase présente de nombreux atouts : garanties de sérieux et de pureté, non enrichie, encapsulée à la source… Et elle contient plus de magnésium qu’Hépar. A l’heure actuelle, nous nous demandons jusqu’où l’on peut aller dans la médicalisation du produit », s’interroge Olga Champain.

Côté conseils à l’officine, Hydroxydase s’intègre parfaitement dans le cadre d’une cure de détoxication de l’organisme ou d’un régime amaigrissant, surfant sur la tendance actuelle des « eaux améliorées ».

Première boisson aux oméga-3.

Le boom des boissons à valeur ajoutée n’est pas étranger à la naissance, fin 2003, de Microfluid, une eau conçue par le laboratoire du même nom. Le procédé de fabrication utilise l’osmose inverse et une méthode brevetée diminuant la taille des polymères d’eau, d’où la revendication d’une meilleure pénétration cellulaire. Bref, le discours se veut résolument scientifique et high-tech autour de cette eau de synthèse « hyperhydratante » présentée comme « la plus pure du monde ».

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De Mincifluid, la référence phare, à Sun Water, l’« eau bronzante », la gamme Microfluid compte désormais huit produits se différenciant par les principes actifs ajoutés, très vendeurs. Ainsi, Omegafluid, la première boisson aux oméga-3, est disponible depuis le mois dernier. Le concept novateur de ces eaux vient directement des Etats-Unis où les « functional drinks » font fureur. Les Américains peuvent acheter leur « smartwater » ou leur « vitaminwater » dans les épiceries, les cafétérias, les musées ou bien encore les club de gym. Pour véhiculer une véritable image de santé et de sérieux, Philippe Bruneau, P-DG des laboratoires Microfluid, a choisi la pharmacie comme réseau de distribution prioritaire. « Les produits ont des dosages d’actifs proches des compléments alimentaires et captent le même type de consommateurs, c’est-à-dire des femmes au profil très urbain qui recherchent la nouveauté », confie-t-il.

Innovation galénique, innovation produit, packaging étudié sont autant d’éléments qui séduisent une certaine catégorie de Françaises prêtes à dépenser entre 20 et 25 euros pour une cure de 9 jours (soit un pack de neuf bouteilles). Distribuée en pharmacie par la force de vente du groupe Batteur, Microfluid est référencée dans 1 200 officines. « Notre objectif est d’atteindre les 3 500 points de vente pour pouvoir passer à une offensive publicitaire. L’été prochain, nous allons proposer des miniréfrigérateurs à présenter sur les comptoirs pour favoriser l’achat réflexe et pour écouler les bouteilles à l’unité », informe Philippe Bruneau.

Pharmacies et parapharmacies n’ont cependant pas l’exclusivité des ventes. On trouve Microfluid dans les magasins diététiques, aux Galeries Lafayette Gourmet à Paris, mais aussi à la carte du restaurant Martinez à Cannes. « Aujourd’hui, les différents secteurs de distribution se rejoignent sur ce même marché au profit des ventes », constate Philippe Bruneau, qui ne compte cependant pas démarcher la GMS de peur de décrédibiliser le produit. A noter cependant qu’une autre petite bouteille d’eau minceur fabriquée par Microfluid joue les vedettes au téléachat. Baptisée Aquaslim, elle est devenue l’une des premières ventes de M6 Boutique.

Les compléments alimentaires se liquéfient.

Phénomène de mode éphémère ou changement profond des habitudes de consommation ? Eau « de santé » ou eau de table ? Aliment ou complément nutritionnel ? Au pharmacien qui détient ces produits d’un nouveau genre de trancher pour construire son conseil, tout en prenant en compte l’ascension actuelle des compléments alimentaires liquides. Ils se distinguent sur le segment de la minceur où le succès de 4321 Minceur (Arkopharma) est spectaculaire.

Autre fait significatif, le laboratoire Ortis, numéro un des compléments alimentaires en Belgique, a fondé sa notoriété sur les produits phythotérapeutiques à boire comme Tonidraine. Il s’immisce aujourd’hui en dermatologie avec Skinéo, le draineur cutané au goût abricot, à prendre tous les matins, dilué dans un verre d’eau. « Le goût procure un effet particulièrement bien apprécié, il renvoie à l’image d’une peau parfaite et évoque une action concrète. Nos animations de dégustation ont beaucoup de succès », rapporte Gaëtane Krings, responsable marketing chez Ortis, qui reconnaît que les formes liquides sont difficiles à transporter. Mais elles représentent aujourd’hui une alternative séduisante aux gélules pour les femmes toujours avides de changement.

A retenir

– Ciblez juste

Les produits de ce marché sont plutôt chers et visent une clientèle féminine, aisée, souvent urbaine.

– Exposez

Le stockage peut être problématique en raison de l’encombrement des bouteilles. Pour rendre l’offre visible, jouez sur la masse et n’hésitez pas à exposer vos stocks.

– Conseillez

Certains produits conditionnés comme de l’eau ne se consomment pas à la bouteille ou au verre mais à la cuillère. Sachez mettre en garde vos clients.

Expérience

VIRGINIE BONIFAY

Responsable de la parapharmacie à la Pharmacie franco-anglaise (Cannes)

Nous proposons la gamme Microfluid en remplacement des compléments alimentaires classiques. Les femmes en ont assez d’avaler des gélules, elles apprécient aussi le côté « cure rapide » et le goût des eaux. Et elles ne sont pas indifférentes à la jolie forme de la bouteille, au packaging haut de gamme du produit. Nous sommes spécialisés en diététique et nous conseillons Mincifluid dans le cadre des régimes. L’Eau Solaire a également eu beaucoup de succès. Les packs se trouvent à l’entrée de la parapharmacie, l’effet de masse attire automatiquement l’oeil.