1   euro ma pharmacie, qui en veut ?

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Publié le 23 novembre 2019 | modifié le 5 septembre 2025
Par Francois Pouzaud
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A 71 ans, Claude Le Poultier, installé dans la Manche, a réussi une astucieuse «   tempête médiatique   » autour de la vente de son officine qui ne trouvait pas de repreneur depuis plus de 5 ans. Il se dit prêt à la transmettre pour 1   € symbolique. Les choses n’ont pas traîné. Plusieurs acquéreurs ont déjà mordu à l’hameçon.

Installé depuis 42 ans à Saint-Martin-de-Landelles (Manche), un village de 1 200 habitants, Claude Le Poultier subit la dure réalité des déserts médicaux, mais aussi le sort réservé aux petites officines dont le chiffre d’affaires (500 000 €) est trop faible pour intéresser des acquéreurs. Il y a plus de 5 ans, à l’âge de la retraite, il décide de mettre en vente son entreprise individuelle à 250 000 €, soit 50 % du chiffre d’affaires (CA).

Pour compliquer sa tâche, l’environnement médical de son officine n’est pas au mieux. « Au moment de la mise en vente de l’officine, le seul médecin du village était proche de la retraite. Outre mon faible chiffre d’affaires, son âge a effrayé plus d’un acquéreur », explique-t-il. Résultat : pas une touche, pas de repreneur à l’horizon. « J’ai sollicité les cabinets de transactions mais aucun d’eux ne s’est vraiment intéressé à la vente de mon officine », ajoute-t-il. L’espoir renaît lorsqu’il y a 2 ans un médecin désormais âgé de 49 ans débarque à Saint-Martin-de-Landelles et rejoint la maison médicale de la commune, s’installant aux côtés d’un cabinet d’infirmières et d’un kiné exerçant à proximité.

Là n’est pas le seul regain d’intérêt de sa pharmacie. Dans cette commune qui a fusionné avec Saint-Hilaire-du-Harcouët et Virey, totalisant plus de 6 000 habitants, « la population est stable depuis plusieurs années », indique Claude Le Poultier. Malgré tout, la demande ne se manifeste toujours pas et le titulaire décide de brader son officine. Il y a plus de 1 an, il met sa pharmacie en vente pour un prix de 60 000 €. Sans plus de succès.

Tout faire pour éviter la fermeture !

C’est donc en désespoir de cause que ce titulaire décide de céder son officine pour 1 € symbolique. « Je m’étais fixé une date butoir, si je ne parvenais pas à trouver un repreneur d’ici fin décembre, je rendrais ma licence à l’agence régionale de santé, mais je ne voulais pas non plus abandonner ma patientèle en laissant le vide après mon départ », raconte-t-il.

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Tout mais pas la fermeture. Cette stupéfiante mais légale proposition a fait mouche. « Tout a commencé par un reportage dans un journal local qui s’est ému de ma situation , glisse-t-il. Ça a été ensuite l’émeute médiatique. Très rapidement, je suis passé sur France 3 , BFM TV et j’ai été sollicité par des radios nationales : Europe 1 , RTL » Comme par miracle, le téléphone s’est remis à sonner. « En seulement une semaine, une vingtaine de contacts se sont manifestés. Trois acquéreurs potentiels dont 2 de la région parisienne ont fait le déplacement à Saint-Martin et je les ai reçus dans mon officine. Il semble que mon initiative ait également fait des émules, 2 titulaires bretons auraient pris la même décision, faute de repreneur. »

Claude Le Poultier reprend espoir car l’exploitation est viable. Son officine, sur 100 m², a été rénovée il y a 12 ans et présente une bonne rentabilité qui peut encore être améliorée. « Je suis pharmacien de profession et commerçant par obligation, il y a donc du potentiel pour un repreneur qui souhaite développer les aspects commerciaux », lance-t-il. Selon lui, son successeur peut décemment vivre de sa pharmacie et s’octroyer facilement une rémunération mensuelle de 3 500 à 4 000 €.

Reste ce prix de vente accrocheur et provocateur de 1 €. « Si je ne peux pas faire autrement, je tiendrai parole », assure-t-il. Mais il espère que la fourchette du prix de cession se situera entre 1 € et 60 000 €. Même s’il n’attend pas vraiment après ce capital. Souhaitant conserver les murs dont il est propriétaire par le biais d’une société civile immobilière (SCI), Claude Le Poultier, qui n’a pas de gros besoins, pourra vivre décemment de sa retraite et des loyers perçus. 